Un déserteur russe assassiné en Espagne
De concert avec les renseignements ukrainiens et contre une somme de 500 000 euros, le pilote Maxime Kouzminov avait déserté l'armée russe à l'été 2023 et fait atterrir son hélicoptère sur le territoire de l'Ukraine. Il semblerait que le corps criblé de balles retrouvé la semaine dernière dans un parking souterrain de Villajoyosa soit celui de l'ancien pilote, qui s'était installé dans cette localité espagnole sous une fausse identité. De l'avis des chroniqueurs, tout semble indiquer un meurtre commandité par Moscou.
Le régime meurtrier de Poutine ne change pas
Cette affaire recèle deux enseignements pour l'Occident, juge Frankfurter Allgemeine Zeitung :
« Le premier, c'est que le pouvoir russe, en dépit des sanctions, des restrictions de déplacement et de l'expulsion de diplomates, reste en mesure d'organiser des commandos en pleine Europe occidentale. Cela n'est pas flatteur pour les services de renseignements européens. Le second, c'est la confirmation de la nature meurtrière immuable du régime de Poutine, car l'assassinat du pilote succède à ceux de Skripal à Londres ou Khangochvili à Berlin. Tous ceux qui préconisent de se rabibocher avec la Russie voient ici à qui ils ont vraiment affaire.»
Un avertissement pour Madrid
El Español s'inquiète pour l'image de l'Espagne :
«Bien qu'il ne s'agisse pas du premier meurtre perpétré par le Kremlin ou la mafia russe sur le territoire européen, le gouvernement espagnol ne doit pas gérer la chose comme s'il s'agissait d'un crime parmi tant d'autres. ... La possibilité qu'un escadron de la mort russe soit en train d'agir impunément en Espagne représente un problème majeur. ... L'assassinat de Kouzminov doit être perçu comme un avertissement au gouvernement. ... L'Espagne ne peut devenir le théâtre d'exécutions extrajudiciaires, et celles-ci ne peuvent rester impunies. Le problème est de nature policière, mais aussi diplomatique, et il affecte l'image de notre pays dans le monde.»
Traître ou héros ?
La Stampa se penche sur la figure du déserteur :
«Le traître en uniforme est un personnage ambivalent, pris dans un cercle vicieux entre le Bien - éviter d'être tué, ne pas être complice du massacre - et le Mal - renier ses frères de souffrance. ... Il n'a pas l'alibi commode du traitre politique, même lorsque celui-ci se sert d'un poignard. Brutus trahit et tue, mais il peut devenir un héros, en affirmant 'avoir éliminé un tyran'. Peut-être que le pilote russe sera l'un des premiers martyrs de la troisième révolution, celle qui abattra Poutine. Mais ses compagnons d'armes, qui sont restés panteler dans la neige d'Avdiivka, penseront-ils la même chose ?»