Quels lendemains pour la trêve au Proche-Orient ?
Le ministre américain des Affaires étrangères, Antony Blinken, s'est rendu mardi à Jérusalem et Ramallah pour discuter avec des représentants israéliens et palestiniens. L'administration Biden entend s'engager pour la reconstruction à Gaza et allouer des fonds en contournant le Hamas. Si la trêve négociée entre Israël et le Hamas tient toujours, les éditorialistes ne sont pas convaincus que la solution soit pérenne.
Personne ne veut aborder le problème de fond
Il n'y aura pas de véritable solution, estime Revista 22 :
«Le conflit a également révélé le désintérêt international pour le conflit israélo-palestinien. Il suffit de regarder la carte pour constater qu'une solution à deux Etats n'est plus possible. C'est aussi la raison pour laquelle les grandes puissances, Etats-Unis en tête, se limitent à tenter de mettre fin aux hostilités, sans vouloir résoudre le problème de fond. Biden est parfaitement conscient des obstacles auxquels s'était heurté Barack Obama en son temps, et ne disposant probablement que d'un seul mandat devant lui, il ne cherche pas à engager un processus voué à rester infructueux.»
Tout le monde veut prendre pied à Gaza
L'Egypte a contribué au cessez-le-feu à Gaza, d'autant que Le Caire a des liens étroits aussi bien avec Israël qu'avec le Hamas. Des convois humanitaires égyptiens ont également pris la route de Gaza. Une initiative intéressée, croit savoir La Repubblica :
«Tout le monde veut entrer à Gaza, tout le monde veut y jouer un rôle. On veut l'utiliser géopolitiquement. ... Les derniers en date à s'y précipiter, ce sont les Egyptiens : ils y ont dépêché 500 camions d'aide humanitaire, ils y distribuent des paquets de pâtes et de riz. La caravane de véhicules arbore la bannière égyptienne et la photo d'Al-Sissi, le grand médiateur. Les Gazaouis, pour leur part, n'en font pas grand cas : ils veulent partir. Ceux qui ont compris dans quel piège ils se trouvent voudraient fuir Gaza, le Hamas, Israël et la guerre.»
Le compromis, une vue de l'esprit
Pour Diena, les problèmes au Proche Orient sont foncièrement insurmontables :
«Certes, il faut trouver les bons compromis permettant de rendre possible une cohabitation amicale entre deux pays et deux peuples. Mais ce ne sont que de belles paroles impossibles à mettre en œuvre et qui ne seront plus défendables après une analyse des nombreuses causes du problème. Dans la vraie vie, il s'agit d'une utopie irréalisable qui se heurte à des obstacles insurmontables : l'Etat israélien doit garantir la sécurité de ses citoyens en les protégeant non seulement du Hamas mouvement islamiste radical et ouvertement terroriste, mais également d'un certain nombre d'Etats musulmans qui contestent la raison d'être d'Israël en général.»
Gaza a besoin d'une perspective
Pour Frankfurter Rundschau, le cessez-le-feu annonce un nouveau statu quo :
«Sans perspective d'avenir pour les 2,2 millions de Palestiniennes et Palestiniens enfermés dans cette bande de Gaza qui abrite une armée de chômeurs, mais où l'ensemble de la population n'a même pas accès à une eau potable propre, une autre explosion de violences peut se produire du jour au lendemain. Bien que la force de frappe du Hamas soit énormément affaiblie, on ne peut pas en dire autant du réservoir de jeunes hommes désœuvrés, souvent prêts à se faire enrôler contre paiement. ... Les dernières guerres à Gaza [nous ont appris ceci] qu'elles n'apportaient aucune amélioration fondamentale. ... Le Hamas et Benyamin Nétanyahou ont très bien su s'accommoder de cette situation.»
Peu probable que les lignes bougent
La Repubblica a peu d'espoir quant à l'issue des négociations :
«Les éléments clés de l'accord concerneraient Jérusalem, une sorte de 'ligne rouge' pour les deux parties. Le Hamas veut soulever la question de Sheikh Jarrah, ce quartier de Jérusalem-Est dans lequel se trouvent les maisons à l'origine de la crise actuelle. Il veut également aborder le statut de la mosquée al-Aqsa, le troisième lieu saint de l'islam. Il ambitionne par ailleurs une contribution financière d'Israël à la reconstruction de la bande de Gaza, dont le coût est estimé à 320 millions de dollars. Mais Israël n'a pas l'intention de changer les paramètres de sa relation avec le Hamas, ni de les faire appliquer au-delà de la bande de Gaza.»
Israël n'a pas de stratégie à long terme
Der Standard explique ce qui, dans la politique israélienne, fait obstacle à un plan de paix avec les Palestiniens :
«[L]e pays est divisé. Une grande majorité aspire tout simplement à vivre en sécurité et serait même prête à céder en contrepartie une grande partie des régions occupées. Mais pour une minorité influente, la paix est moins importante que la domination de la Cisjordanie, la Judée et la Samarie de la Bible. Elle ne veut pas d'un processus de négociations susceptible d'aboutir à un Etat palestinien. … Occuper la Cisjordanie, isoler la bande de Gaza et engager régulièrement des hostilités contre le Hamas : voilà à quoi se résume le seul consensus de la politique israélienne. Le conflit avec les Palestiniens était la grande absente de la dernière campagne électorale. Une large majorité prête à s'engager en faveur d'une solution pacifique n'est pas en vue.»