La BCE n'est pas convaincue par les propositions d'Athènes
Les banques grecques ne pourront plus donner des titres de la dette grecque lorsqu'elles voudront retirer des liquidités auprès de la BCE. C'est la décision prise par la BCE à l'issue de la rencontre entre le président de la BCE Mario Draghi et le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis. La BCE affirme ainsi clairement qu'elle défendra l'euro, se réjouissent certains commentateurs. Les autres critiquent une position qui suit la ligne allemande et qui ne fera qu'aggraver la crise grecque.
La stratégie de défense de la BCE
La décision de la BCE montre clairement que son propos est la protection de la monnaie unique, se félicite l'économiste Francesco Giavazzi dans le quotidien libéral-conservateur Corriere della Sera : "La grande vague de sympathie que suscite le nouveau gouvernement grec et l'indulgence envers un pays dont les conditions sociales se détériorent dramatiquement depuis quelques années nous tendent un piège. Un piège qui pourrait bien sonner le glas de l'euro. L'objectif stratégique de ceux qui se sont montrés compréhensifs envers Tsipras était de mettre la BCE échec et mat. Ils voulaient forcer la banque d'émission à commettre une violation ouverte des traités européens. Indirectement, ils comptaient faire barrage à l'assouplissement quantitatif, autrement dit au programme de rachat d'obligations annoncé par la BCE le 22 janvier. Ils auraient ainsi neutralisé le parachute de l'euro et mis en danger l'architecture de l'Union monétaire. Depuis hier, les opposants à l'euro doivent comprendre que Francfort reste et demeure la gardienne de la monnaie unique."
Francfort oublie sa véritable mission
La BCE n'est plus une institution indépendante, critique le portail alternatif ThePressProject, suite à la décision prise par Francfort : "La décision de la BCE est politique et identique à la ligne allemande. Pour une Banque centrale, la Banque centrale de tous les Etats membres de la zone euro, et donc y compris de la Grèce, c'est une attitude irresponsable. Cette décision n'a visiblement rien à voir avec la solvabilité des banques grecques - celles-ci ont récemment passé les tests de résistance de la BCE, elles ont été contrôlées et suffisamment recapitalisées. … Pourquoi, dès lors, vouloir restreindre leur accès au crédit ? La réponse de la BCE est claire et repose sur des justifications politiques : la révision du nouveau programme de crédit à la Grèce n'est pas encore achevée. La décision de la BCE ne correspond pas à la mission qui incombe à une banque centrale : le rôle de celle-ci est de faire office de prêteur en dernier ressort, là où il existe un besoin à court terme."
Le plan d'Athènes est raisonnable
Après avoir rencontré le président de la BCE Mario Draghi, le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis rencontrera ce jeudi son homologue allemand Wolfgang Schäuble et présentera le projet de son gouvernement pour régler le problème de la dette grecque. Celui-ci prévoit entre autres l'émission d'obligations indexées sur la croissance. Une proposition raisonnable, estime le journal économique Äripäev : "Les contribuables de Grèce, mais aussi d'Allemagne et des autres pays de la zone euro, profiteraient d'un tel règlement. La Grèce continuerait ainsi de servir sa dette, sans craindre toutefois que celle-ci ne devienne intenable ou que le pays ne soit exclu de l'Union monétaire, et ne menace ainsi l'économie européenne et le système financier. Les réformes envisagées par le nouveau gouvernement visent essentiellement à lutter contre les cartels, contre la corruption et contre les riches, lesquels ont su jusque-là se soustraire au versement de l'impôt. Et contrairement aux autres grands partis, Syriza affirme n'avoir aucun lien avec les oligarques."
La BCE jette de l'huile sur le feu
La décision de la BCE aura de graves conséquences pour la Grèce et révèle toute la rigidité de la gestion de crise européenne, critique le quotidien libéral-conservateur Jornal de Négocios : "Des idées innovantes pour résoudre la sempiternelle crise de l'euro ? Il ne manquait plus que ça ! Mieux vaut s'en tenir au modèle rigide et antidémocratique, même si cela génère de nouveaux coûts pour le contribuable, ou si cela rend la vie des Grecs plus difficile encore. Et même si nous continuons tous d'attendre la prospérité, tandis que l'extrême gauche et l'extrême droite ne cessent de progresser en Europe. Voilà le message de la BCE. … Personne ne veut réellement résoudre la crise de l'euro. Il s'agit uniquement de prouver que tel ou tel modèle est le bon. Et que les choses doivent être faites de la façon prescrite. Jeter de l'huile sur le feu, c'est précisément ce que les gouverneurs de la BCE viennent de faire dans la zone euro : ils ont aggravé la crise grecque."