Allemagne : la présidente de la CDU entre à la Défense
Annegret Kramp-Karrenbauer (AKK), présidente de la CDU, a été investie mardi nouvelle ministre allemande de la Défense. Elle succède ainsi à Ursula von der Leyen, qui a été élue à la tête de la Commission européenne. L'opposition s'est offusquée de la nomination d'AKK car jusqu'ici, celle-ci avait publiquement exclu d'accepter un portefeuille de ministre. Les commentateurs se demandent si AKK peut être la femme de la situation.
Un signal désastreux
Le quotidien Bild tance Annegret Kramp-Karrenbauer pour son revirement :
«Alors qu'elle briguait encore la présidence de la CDU, elle avait dit la chose suivante : 'Pour rien au monde on ne devrait créer l'impression de se servir d'un mandat comme d'un tremplin pour parvenir à une autre mandat au service de l'Etat. Ce serait proprement fatal.' C'est pourtant bien ce qu'AKK vient de faire, émettant du même coup un signal désastreux : mécontente de sa cote de popularité en tant que présidente de la CDU, par crainte de son concurrent Jens Spahn [ministre de la Santé incarnant l'aile droite de la CDU] en pleine ascension, on a l'impression qu'elle veut lui damer le pion en devenant elle-même ministre de la Défense. L'armée allemande, qui accumule les problèmes et compte 180.000 soldats, va être dirigée par une femme qui a toujours affirmé que la responsabilité de la direction de la CDU constituait à ses yeux la plus haute priorité.»
AKK ne peut que mieux faire
Annegret Kramp-Karrenbauer se gardera bien de répéter les erreurs de sa devancière, observe Neue Zürcher Zeitung :
«Depuis que celle qui l'a précédée avait déploré une 'attitude problématique' généralisée parmi les troupes, cela en était fait de sa réputation aux yeux des soldats. Il y avait certes eu d'inquiétants épisodes d'extrême droite [glorification du nazisme], mais le discrédit généralisé publiquement jeté sur les troupes était mal passé. Dans une première brève allocution prononcée mercredi, AKK a montré qu'elle avait pleinement conscience de cet écueil. Elle n'a pratiquement parlé que des soldats, et souligné que leur bien-être était la plus haute priorité. 'En cet instant, mes pensées vont surtout vers les hommes et les femmes qui participent actuellement à des opérations', a-t-elle déclaré. Si la ministre réussit, dans les semaines et les mois à venir, à poursuivre dans cet esprit, tout devrait bien se passer pour elle.»
Un premier test difficile
Le portefeuille de la Défense sera la première grande épreuve pour celle qui est pressentie pour reprendre le flambeau d'Angela Merkel, analyse Večernji list :
«L'opinion allemande attend beaucoup d'Annegret Kramp-Karrenbauer : tout d'abord qu'elle soit prête à prendre le relais de Merkel quand celle-ci se retirera de la vie politique, au plus tard en 2021. ... Le ministère de la Défense est un maroquin difficile et l'opinion allemande observera de très près comment Kramp-Karrenbauer s'en sortira. L'armée allemande souffre d'un budget trop faible, ce qui a valu des critiques au travail de sa prédécesseure à ce poste, Ursula von der Leyen. C'est donc une patate chaude qui vient d'être refilée à Kramp-Karrenbauer.»