Vers une réconciliation en Croatie ?
Mercredi, la Croatie a commémoré l'"Opération Tempête", menée du 4 au 7 août 1995 par les forces croates au cours de laquelle ces dernières avaient repris à des francs-tireurs serbes d'importants territoires. L'opération est critiquée pour les crimes commis envers des civils serbes et l'exode massif de Serbes qu'elle a provoqué. Pour la première fois, un représentant de la minorité serbe a participé aux commémorations. Un premier pas, selon les commentateurs.
Une étape historique
Večernji list évoque une grande avancée :
«Lors des commémorations du 25e anniversaire de l''opération Tempête' à Knin, les élites politiques croates ont ouvert un nouveau chapitre dans les relations serbo-croates, qui en étaient restées au niveau de la fin de la guerre. ... Le gouvernement estime donc que le moment est venu d'engager un dégel dans les relations entre Serbes et Croates. Il a ainsi d'abord confié un poste au parti de la minorité serbe SDSS, en la personne du vice-Premier ministre Boris Milošević, avant de le faire venir à Knin [pour assister à la cérémonie]. On verra au quotidien comment la population accueillera la démarche de rapprochement de ses dirigeants.»
Sortir les cadavres du placard
Les Croates doivent maintenant se pencher sur leur passé pendant la guerre, rappelle Index.hr :
«Aujourd'hui, lors du 25e anniversaire de l'opération Tempête ayant mis de fait fin aux guerres en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, il serait temps que la génération d'après-guerre pose cette question aux pères, mais également aux mères : 'Qu'avez-vous fait pendant la guerre ?' Et au lieu de ressasser des lieux communs empreints de glorification et d'invoquer de manière pathétique la défense du pays, ce serait l'occasion d'avouer tous les dessous scabreux de la guerre, de parler des prisonniers torturés et assassinés, des civils, des vieillards qui pensaient être trop vieux pour représenter une menace pour qui que ce soit. ... La mémoire vive dure trente ans, avant de devenir l'Histoire. Tôt ou tard, elle rattrapera ceux qui se sont tus, qui ont menti et fuient leur propre culpabilité.»
Des blessures ne se sont pas encore refermées
Cette année, le travail de mémoire s'est effectué à deux niveaux, souligne Delo :
«Il y a d'abord les gestes officiels, empreints d'optimisme, puisque tous les dirigeants politiques croates ont participé à la commémoration. Sont également réjouissantes la présence de Boris Milošević, membre de la minorité serbe, et la visite du représentant du gouvernement croate, le ministre Tomo Medved, dans le village serbe de Grubori, où les vainqueurs croates avaient exécuté six civils âgés. ... Il aura fallu attendre un quart de siècle pour qu'une telle visite se fasse. Mais il y a aussi un autre niveau, qu'il ne faut en aucun cas négliger. ... Les plaies béantes du passé continuent de tourmenter plus de la moitié des Croates. Les accrochages entre Serbes et Croates, mais aussi le cauchemar que représentent les dates anniversaires d'opérations militaires et leurs commémorations, un des obstacles entre les voisins, perdurent.»