Réforme de la politique migratoire de l'UE : quel impact ?
Après de longs débats, les institutions de l'UE se sont entendues sur une réforme du système d'asile, qui sera globalement durci. Les migrants dont la demande d'asile est peu susceptible d'être acceptée seront enregistrés par le biais d'une procédure simplifiée aux frontières extérieures de l'UE et rapidement expulsés en cas de rejet. Les principaux pays d'arrivée, notamment l'Italie et la Grèce, seront soulagés par le biais d'un mécanisme de solidarité obligatoire. La presse est divisée.
Un premier jet imparfait
La réforme étant encore fragmentaire, il faut s'attendre à ce que les populistes la mettent en pièces, prédit Kurier :
«Le pacte migratoire est le fruit des efforts de la politique pour trouver des solutions techniques au niveau européen, afin de ne pas se retrouver avec des Etats décidant qui de fermer ses frontières, qui de les maintenir ouvertes, selon une logique puérile. Ce n'est qu'une première tentative, avec toutes les erreurs et les lacunes que cela suppose. Les populistes sont prêts à bondir pour la dépecer. Qui accepterait de céder le terrain sur lequel il a si longtemps dicté les règles du jeu ?»
En l'état, un accord qui ne vaut pas grand chose
La réforme soulève des questions centrales, souligne De Volkskrant :
«Jusque-là, l'absence totale de solidarité entre les Etats membres a systématiquement sapé la politique d'asile européenne. ... C'est donc un progrès que les Vingt-Sept aient à nouveau entrepris, mercredi, de changer d'approche et de concentrer le système d'asile sur les frontières extérieures de l'Union. Dans le même temps, le projet soulève des questions fondamentales. Premièrement, quid des nombreuses personnes qui n'auront pas été enregistrées aux frontières extérieures et qui continueront leur voyage ? ... Deuxièmement, l'UE affirme pour la énième fois vouloir renvoyer les personnes dans leur pays d'origine, sans pour autant conclure d'accords définitifs avec ces mêmes pays. Quelle valeur, dès lors, peut avoir ce pacte ?»
Vers un système à l'australienne
Die Welt appelle de ses vœux des mesures allant au-delà du régime d'asile européen commun (RAEC) :
«Le RAEC n'est qu'un premier pas dans le sens d'une solution axée sur un Etat tiers, similaire au modèle australien. Dans celui-ci, tous les réfugiés sont immédiatement envoyés en Papouasie-Nouvelle-Guinée, où leur demande d'asile est examinée. En dépit de difficultés initiales, pratiquement plus un seul navire de réfugiés n'arrive en Australie. Et ce sans que Canberra ne bafoue la Convention de Genève sur les réfugiés. En contrepartie, l'Australie accepte des réfugiés que lui désigne le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (UNHCR), et qui sont vraiment éligibles à l'asile. Un règlement similaire verra le jour dans l'UE. La plupart des Etats membres y sont favorables. ... Même Berlin se résoudra à l'adopter.»
La Belgique doit stopper ce projet
La Belgique doit profiter de la présidence de l'UE pour impulser un nouveau cap, font valoir 17 ONG dans une tribune au journal Le Soir :
«Seule une vision juste et positive de la migration qui respecte le droit à l'asile, assure la solidarité intra- et extra-européenne, répartit équitablement les demandeurs d'asile entre Etats membres et garantit des voies sûres et légales de migration constitue un réel changement et une véritable solution durable pour tous et toutes. Nous appelons donc les autorités belges à ne pas soutenir ce pacte au cours des prochains trilogues et à profiter de la présidence de l'UE pour redémarrer les discussions en vue d'établir une politique basée sur les droits humains, la solidarité et l'ouverture.»
Une action inefficace et inhumaine
Deník N critique le pacte d'asile :
«L'UE joue la montre en durcissant la politique migratoire. Nous n'arrêterons pas l'immigration. Avec le temps, celle-ci ira plutôt en s'amplifiant, un nombre croissant de régions du monde étant de plus en plus souvent affectées par des sécheresses. Dans les prochaines décennies, des pénuries d'eau pourraient pousser des millions d'Africains à se mettre en route vers l'Europe. Que ferons-nous alors ? Devrons-nous rendre nos frontières encore plus hermétiques et nous efforcer d'oublier notre humanité ?»