Avec Assad pour combattre Daech ?
Dans le débat sur la recherche d'une solution au conflit syrien, les voix se multiplient en Europe en faveur d'une coopération avec Bachar Al-Assad pour lutter contre le groupe terroriste Daech. Les ministres des Affaires étrangères autrichien et espagnol appellent notamment à négocier avec le dictateur. Pas d'issue sans Assad en Syrie, affirment aussi certains commentateurs. De telles considérations stratégiques n'atténueront pas les souffrances des réfugiés, rétorquent les autres.
Assad, interlocuteur incontournable
Tant que l'opposition syrienne restera trop faible pour mettre en place des structures publiques, il n'y a pas d'autre issue que de négocier avec le dirigeant syrien Bachar Al-Assad, souligne le quotidien libéral La Libre Belgique : "Refuser de parler avec Assad, c'est aussi refuser de parler à un régime laïc, un Etat certes policier mais qui fonctionne, avec des écoles, des ministères et des services municipaux. Seul Daech a été jusqu'ici en mesure de reconstituer des services publics dans les zones qu'il occupe. Mais on ne pourra sans doute jamais parler avec Daech, chantre d'une idéologie totalitaire. Ne répétons pas les erreurs de l'Irak et de la Libye, où nous avons cru qu'en abattant un dictateur, on réglait la question. L'opposition syrienne est encore trop faible pour faire l'impasse sur Bachar al-Assad."
Pour un changement de pouvoir en Syrie
L'armée de l'air française a effectué mardi de premiers vols de reconnaissance au-dessus de la Syrie afin de rassembler des informations en vue d'attaques potentielles. Celles-ci doivent impérativement s'accompagner d'une offensive diplomatique, juge le quotidien libéral-conservateur Corriere della Sera : "Pour l'Occident, il n'y a que des ennemis jurés en Syrie : les groupes terroristes Daech et Al-Qaida d'un côté et les forces armées d'Assad de l'autre. Or les frappes aériennes visant l'ennemi numéro un, à savoir Daech et Al-Qaida, aident indirectement Assad. C'est la raison pour laquelle la tentative de mettre fin aux massacres doit passer par une offensive de nature plus diplomatique. Parallèlement à la recrudescence des frappes aériennes contre Daech, il faut s'efforcer d'amorcer un processus politique, en concertation avec la Russie, l'Iran et l'Arabie Saoudite, qui permette un changement de pouvoir à Damas et un départ d'Assad dans la dignité. … Il n'y a pas d'alternative, si ce n'est la désintégration de la Syrie et l'arrivée de nouveaux flux de réfugiés en Europe."
Une aide humanitaire plutôt qu'une intervention militaire
Choisir entre une intervention militaire en Syrie ou des négociations avec Assad revient à choisir entre la peste et le choléra, estime le quotidien libéral Kurier, qui préconise plutôt l'apport d'une aide humanitaire : "La communauté internationale est encore à des années-lumière d'un mandat de l'ONU. Il n'y a ni cessez-le-feu, ni négociations portant sur une telle option. Il n'y a pas de zones d'interdiction aérienne, encore moins de zones de protection au sol. La position du ministre autrichien des Affaires étrangères Sebastian Kurz, par contre, est claire : il a indiqué qu'il fallait impliquer le dirigeant syrien Bachar Al-Assad dans le combat contre Daech. Entre la peste et le choléra, il choisit donc le choléra. … Les réfugiés quittant les camps de Jordanie ou du Liban en quête d'espoir ne sont pas intéressés par ces petits jeux. Une aide de plusieurs milliards, en revanche, pourrait grandement soulager les pays voisins de la Syrie et les millions de déracinés qui y ont trouvé refuge."
Comment Poutine pourrait retrouver les grâces de l'Ouest
D'après les informations des services de renseignements américains, Moscou serait en train de renforcer le soutien militaire qu'elle apporte aux troupes du dirigeant syrien Bachar Al-Assad, en leur livrant notamment chars d'assaut et avions de combat. Le président russe Vladimir Poutine pourrait ainsi se réhabiliter aux yeux de ses partenaires européens, écrit le journal économique Verslo žinios : "Si la Russie décide d'apporter un soutien significatif à l'actuel leader syrien Bachar Al-Assad et l'aide à remporter la guerre civile, alors ceci contribuera à apaiser la région. … L'action de la Russie pourrait s'avérer salutaire et permettre de réduire les flux de réfugiés. Une initiative que se refuse à prendre l'Occident - en est-il seulement capable ? La logique occidentale est très simple : les sanctions ont montré leur efficacité depuis longtemps, Moscou est affaiblie économiquement. Si Moscou participe à la basse besogne au Proche-Orient, ceci pourrait séduire une partie des pays occidentaux."