Brexit : Bruxelles hausse le ton
Le négociateur de l'UE pour la sortie du Royaume-Uni de l'Union, Michel Barnier, a indiqué que le Brexit devrait être achevé en octobre 2018. Il a souligné mardi à Bruxelles que les négociations pourraient durer au maximum 18 mois, dans la mesure où Londres sollicitait leur lancement au plus tard en mars 2017, comme annoncé. Pour les éditorialistes, les choses sont claires : Bruxelles est en position de force et Londres n'est pas en mesure de dicter les conditions du Brexit.
Londres en plein désarroi
Les exigences de Bruxelles et les réticences nationales mettent le gouvernement britannique en difficulté, constate le journal Wiener Zeitung :
«Barnier a voulu fixer une date limite pour le lancement officiel des négociations. Mais le gouvernement de Theresa May subit aussi une pression croissante sur le plan intérieur. Une pétition - signée également par des députés Tories - vient d'être lancée pour demander au cabinet de tenir la population informée des plans concernant le Brexit. La Cour suprême doit par ailleurs décider jeudi si le Parlement doit être consulté ou non sur la question du Brexit. Autant d'éléments qui affaiblissent la position du gouvernement dans les négociations et lui font perdre du temps. La Première ministre semble de plus en plus impuissante et le climat commence lui aussi à changer au sein de la population. De plus en plus de Britanniques reconnaissent visiblement qu'une sortie de la Grande-Bretagne de l'UE n'est pas une si bonne idée finalement. Lors d'une récente législative partielle, c'est une candidate anti-Brexit qui a été élue - haut la main.»
Pourquoi Londres préfère jouer la montre
Il Sole 24 Ore explique pourquoi, selon lui, la Grande-Bretagne n'est pas pressée de lancer le Brexit :
«Londres ne veut pas se soumettre à un échéancier qui la contraigne à prendre des décisions rapides, d'autant plus que l'establishment du pays n'a toujours pas dit ce qu'il désirait. Certains représentants ont laissé penser que le pays était prêt à contribuer au budget communautaire en contrepartie d'un accès au marché unique, suivant le modèle norvégien. D'autres y sont opposés. Outre les doutes politiques du gouvernement, les interrogations juridiques de la magistrature retardent également la notification officielle de la volonté de sortir de l'Union. La Cour suprême britannique doit statuer sur le recours présenté par le gouvernement May contre la décision du tribunal londonien qui, au mois de novembre, avait demandé au Parlement de confirmer l'issue du référendum du 23 juin en faveur du Brexit.»
Londres n'a pas de marge de manœuvre
L'UE est en position de force dans les négociations du Brexit, analyse l'historien britannique Timothy Garton Ash dans El País :
«Le débat actuel sur un Brexit 'hard' ou 'soft' est absurde. Ceci dépendra davantage des autres que de nous. Nous sommes en position de faiblesse, car il faudra convaincre 27 Etats en deux ans. L'Europe semble par ailleurs à court de bonne volonté vis-à-vis de la Grande-Bretagne, car nous avons toujours été un partenaire désagréable. ... A cela s'ajoute la perspective d'élections aux Pays-Bas, en France et en Allemagne, qui pourraient influer sur les négociations en 2018. ... A une époque aussi incertaine, il ne reste donc qu'une option : suivre un cap strictement parlementaire, informer les citoyens, multiplier les efforts diplomatiques, n'exclure aucune option, profiter des opportunités. C'est barbant, certes, mais qui a dit que le Brexit serait plaisant ? »
La Grande-Bretagne a besoin des migrants intracommunautaires
La question du statut futur des citoyens de l'UE habitant en Grande-Bretagne constitue l'une des pierres d'achoppement des négociations du Brexit. Il est honteux et contreproductif que Theresa May refuse de leur garantir un droit de séjour, critique The Times :
«Comme le montrent les statistiques, les ressortissants intracommunautaires établis en Grande-Bretagne sont nettement plus jeunes que la moyenne nationale et ils occupent un emploi. Cela signifie que si nous décidions de tous les expulser, nous serions les premiers à être pénalisés. ... Bien entendu, il y a également les centaines de milliers d'autres jeunes Britanniques embauchés dans d'autres Etats de l'UE. Mais ils sont, pour leur part, disséminés ça et là. Leur départ soudain n'aurait pas d'effets funestes sur les secteurs du tourisme, du BTP ou de la santé des multiples pays hôtes. Mais serait-ce aussi le cas en Grande-Bretagne, si tous les citoyens de l'UE pliaient bagages ? Voilà la raison pour laquelle la menace ne fonctionne pas.»