Enquête PISA : quel enseignement pour l'Europe ?
Après la publication des résultats de l'enquête PISA pour l'année 2016, l'ensemble des pays européens s'interrogent sur les moyens d'améliorer leurs systèmes scolaires. Pour les chroniqueurs, les inégalités sociales sont responsables des mauvaises performances. Seul un pays est satisfait de sa prestation.
Bravo aux élèves estoniens
Les élèves estoniens se sont classés au troisième rang mondial à l’enquête Pisa, et au premier rang européen. Si Eesti Päevaleht se réjouit de ce résultat, il n’en pointe pas moins la nécessité d'améliorations :
«Les aspects les plus performants du système scolaire estonien pourraient devenir un article d’exportation. Au demeurant, la joie ne devrait pas occulter la réalité. Nous devons nous demander pourquoi le stress et l’insatisfaction des écoliers sont relativement élevés. Est-ce le revers inévitable de la réussite ? Si c’est le cas, nous devrions nous demander ce qui est le plus important et comment retrouver l’équilibre. Enfin et surtout, la qualité de notre système éducatif ne devrait-elle pas avoir un impact plus fort sur la croissance ?»
Césure éducative en Finlande ?
Le lieu de résidence et le contexte socio-économique de la famille ont une influence plus forte que par le passé sur les résultats de l’enquête PISA en Finlande. Karjalainen redoute une division du pays :
«Les disparités régionales se sont accentuées. Si les écoles de la capitale et de sa région ont eu des résultats nettement meilleurs que le reste du pays, on note un déséquilibre notable entre filles et garçons. Grâce aux filles, la Finlande s’est bien classée. En revanche, la part de ceux qui sont à la traîne semble être bien supérieure chez les garçons que chez les filles. L’incidence du contexte familial sur les résultats est elle aussi plus marquée que par le passé. Pour une raison obscure, l’école ne parvient plus à compenser les différences socio-économiques comme elle le faisait jusqu’ici. Cette dernière enquête PISA fait un portrait plus nuancé de la Finlande. Si cette tendance devait se confirmer, la Finlande serait bientôt un pays fortement divisé sur les plans territorial et socio-économique - bien loin de la situation idéale actuelle.»
En Wallonie, la sélection fait des ravages
Les résultats des élèves wallons à l'étude PISA sont nettement en deçà de ceux de leurs camarades flamands. Le Soir tente d'expliquer ces disparités :
«Nous sommes une région de plus en plus duale. Avec, ici, une élite où la télévision, le soir, reste froide. Avec, là, et en mode croissant, une population qui a dur, très dur. … Des familles où l’argent manque. Où le livre n’existe pas. Où l’information a libéré le terrain au divertissement. Si nos résultats sont faibles, c’est parce que notre système scolaire est au moins doué pour une chose : trier. Les forts avec les forts. Les faibles avec les faibles. Les premiers se stimulent. Les autres coulent ensemble. Aux faibles, bien parqués à l’Institut, on ne leur offre à voir aucun autre modèle que le leur. Pas de Julie pour tirer Jules vers le haut. Jules ne connaît que des Jules. Et il fait tout comme eux.»
L'enseignement bulgare est trop théorique
A la 45e place de l'étude PISA, les élèves bulgares sont la lanterne rouge de l’UE. Le quotidien 24 Chasa prend la défense des élèves et fait l’inventaire des lacunes du système scolaire :
«Premièrement, nos élèves ne sont pas suffisamment préparés à ce genre d’épreuves. Pour réussir au test PISA, il faut s’être préalablement entraîné, car un bon résultat ne surgit pas du néant. Deuxièmement, les tests de l’enquête PISA évaluent la capacité des élèves à mettre en application dans la vie pratique ce qui a été appris en cours ; or c’est précisément là que le bât blesse depuis toujours en Bulgarie. Le système scolaire bulgare est éminemment théorique, ce qui explique que la plupart des élèves sont dépassés par les tâches pratiques, même les plus simples.»
L'échec de la politique d'éducation en France
Cinquième économie mondiale, la France n’a pourtant guère brillé à l’étude PISA. Ceci atteste l’échec patent de la politique du gouvernement socialiste en matière d'éducation, vocifère Le Figaro :
«La France se distingue précisément dans ce classement mondial par sa capacité à reproduire les inégalités sociales ! Belle performance. Les chercheurs internationaux ont aujourd’hui établi noir sur blanc que les pays qui ont choisi d’encourager l’excellence sont également ceux qui sont le mieux parvenus à soutenir les élèves en difficulté. Ils ont également listé quelques traits communs aux systèmes éducatifs les plus performants, comme la valorisation du travail scolaire, le respect des professeurs. Ainsi donc, supprimer les notes, le redoublement, les classes bilangues ou encore le latin ne permettrait pas d’abolir l’échec scolaire, ni de rétablir l’égalité des chances ? Fallait-il vraiment une étude mondiale pour s’en convaincre ?»
Il faut des enseignants plus nombreux et mieux formés
Cette année, les résultats des élèves allemands à l’étude PISA ne se sont pas améliorés. La politique doit donc enfin traduire le bilan de cette sixième évaluation par une réforme de l’éducation, préconise le site de la radio Deutschlandfunk :
«Les comparaisons internationales sont certes intéressantes et importantes. Mais le tout n’est pas de comparer, comme on le voit maintenant. Pour progresser réellement, il faut faire en sorte que les effets soient tangibles, en cours ou au niveau des conditions d’enseignement, sans ménager ses efforts. ... On constate un manque d’enseignants spécialisés, des professeurs non remplacés, une fusion de la biologie et de la physique-chimie, une perte d’intérêt pour les sciences et la technologie chez les élèves. Dans les cursus universitaires formant au métier d'enseignant, une place insuffisante est accordée à la pédagogie. Il faut palier cette carence. Sans enseignants bien formés et en mesure d’enseigner leur matière correctement, la qualité de l’enseignement ne progressera pas.»
Il n'y a pas de quoi se réjouir
Même si cette fois-ci, la Suède se classe au-dessus de la moyenne des pays de l’OCDE, il n’y a pas de quoi ouvrir le champagne, écrit Aftonbladet :
«Les résultats ne sont pas tous réjouissants. Le fossé s’est creusé entre les différentes écoles du pays. Il y a une quinzaine d’années, la Suède pouvait présenter avec fierté le bilan d’un système scolaire garantissant largement l’égalité des chances. Les enfants bénéficiaient d’une éducation comparable, indépendamment de leur provenance sociale. On ne peut plus en dire autant aujourd’hui : nous sommes en milieu de classement. Et selon que les enfants sont issus de milieux suédois ou étrangers, les différences sont plus marquées que dans d’autres pays. ... Le Chili vient de décider d’interdire des écoles à buts lucratifs, qui sont délétères pour la société à long terme. On n’éduque pas les citoyens de demain comme on construit des voitures. … De par le monde, aucun système éducatif n’est autant orienté vers le marché que le nôtre.»