Le message de la remise des Oscars 2017
La confusion n’aura duré que quelques minutes : ce n’est pas à La La Land mais à Moonlight que revenait l’Oscar du meilleur film. Autrement dit, au drame d’un jeune noir homosexuel, et non pas à la comédie musicale au casting majoritairement blanc. Beaucoup de commentateurs y ont vu un message politique clair - auquel la bévue initiale n’a fait que donner encore plus de sel.
Un faux pas révélateur
La méprise lors de la remise de l’Oscar du meilleur film en dit long sur l’histoire d’Hollywood et pourrait plaire aux amateurs d'art de la performance, se réjouit The Independent :
«La débâcle Moonlight/La La Land peut être lue comme une allégorie de ces 50 dernières années de l’histoire du cinéma. Oui, ce prix aurait dû revenir au film le plus difficile à financer, à écrire de manière authentique et à vendre à la conscience de masse commerciale, et qui a dû franchir des milliers de différents obstacles. Mais la statuette a été décernée aux blancs pour un film basé sur un genre cinématographique qui a été ovationné il y a 50 ans. Ou du moins a-t-elle failli l’être. L’épisode de deux minutes qu’aura duré ce faux pas peut être interprété comme une performance artistique glorieuse et qui dit oui à la vie. Un peu comme un court-métrage projeté dans le cadre d’une exposition sur le prix Turner et visionné depuis l’exiguïté d’un wigwam.»
Des Oscars qui ne plairont guère à Trump
La décision du jury est un pied de nez au président américain Donald Trump, écrit le journaliste Cristian Tudor Popescu sur le blog republica :
«Moonlight est une prestation très moyenne mais politiquement correcte, dénuée d’idée originale, mais avec un acteur principal noir actuellement à la mode : Mahershala Ali. L’évolution du protagoniste, qui s’apparente à un roman d’éducation sur un mineur qui grandit dans un milieu défavorisé, sans père et dont la mère se drogue, est une succession de clichés. Tout le 'mérite' du film est le fait que le personnage central soit un homme de couleur et homosexuel. … Cet Oscar a été une gifle cinglante pour Trump. Et il en a même reçu une seconde : L’oscar du meilleur film étranger à été remis au film Le Client du réalisateur iranien Asghar Farhadi, ressortissant d’un pays visé par le décret anti-immigration de Trump, et qui ne s’est pas rendu à la cérémonie en signe de protestation.»
Un nouveau jury sous le signe de la diversité
La remise de l’Oscar du meilleur film à une œuvre mettant en scène un afro-américain n’est pas étrangère aux revendications et aux réformes de ces dernières années, se réjouit La Vanguardia :
«L’absence de nomination d’acteurs afro-américains en 2015 et en 2016 avait entraîné un mécontentement social et abouti à un certain nombre de réformes au sein de l’académie du cinéma. ... Pour promouvoir la diversité, le nombre des membres votants de l’académie a été considérablement augmenté. Sa composition a alors tenu compte de critères géographiques (personnes issues de 59 pays), du genre (47 pour cent de femmes) et de la diversité ethnique (41 pour cent de non-blancs). Une initiative louable pour encourager la diversité dans la remise des Oscars. Il n’en reste pas moins que la remise des prix repose bien sûr en tout premier chef sur la qualité cinématographique des œuvres.»