Qu'adviendra-t-il du Nobel de littérature ?
L'Académie suédoise, qui décerne le prix Nobel de littérature, est en crise. Suite à un scandale de corruption et de harcèlement sexuel visant l'époux de l'une des membres de l'institution, Katarina Frostenson, trois autres membres, pourtant nommés à vie, ont renoncé à leur fonction. Une affaire qui interpelle les éditorialistes, de Suède et d'ailleurs.
La Suède discréditée
Upsala Nya Tidning craint que cette affaire n'écorne l'image du Nobel et celle de la Suède :
«Le scandale autour de l'Académie suédoise ne fait que grandir au fil des jours. Au cœur de l'imbroglio, Katarina Frostenson, mariée avec un individu soupçonné de harcèlement sexuel et avec lequel elle dirige un institut culturel qui, pendant des années, a perçu des sommes importantes de l'Académie. ... Dans cette situation, il serait judicieux que Frostenson, par instinct d'auto-préservation et par égard pour l'institution qu'elle représente, renonce à sa fonction. Or elle semble vouloir s'accrocher à son fauteuil. ... La poursuite de ce scandale ne fait que mettre à mal, chaque jour un peu plus, la réputation du prix Nobel et celle, in fine, de la nation suédoise.»
Les apôtres de la morale pris en faute
Jyllands-Posten jette un regard narquois sur le scandale qui touche le pays voisin :
«Nos voisins ont de nombreuses qualités, mais ils ont par trop tendance à se poser en parangons de vertu, ce qui finit par leur jouer des tours. Leurs gouvernements prêchent la paix et la concorde, mais cela ne les empêche pas d'exporter des armes. ... La Suède a longtemps reproché aux autres, Danemark inclus, de ne pas accueillir suffisamment de demandeurs d'asile, avant de se résoudre à fermer elle-même ses frontières. ... Voilà que l'Académie suédoise est ébranlée par un scandale. ... Le prix Nobel pourrait être menacé, même si Per Wästberg, président de l'institution, assure que le Nobel ne fera pas faillite. La faillite morale, elle, paraît indéniable.»
Internationaliser l'institution
La crise que traverse l'Académie suédoise lui offre l'occasion de se renouveler enfin, estime Neue Zürcher Zeitung :
«La brouille et la vague de départs subséquente ne font que révéler un problème manifeste : l'Académie s'est trop longtemps complu dans son provincialisme. Voilà qu'intervient le roi suédois Carl XVI Gustaf dans le débat. Peut-être faudrait-il néanmoins une immixtion plus ferme ? Pour éviter que l'institution ne devienne qu'une relique superflue, le monarque pourrait, par sa fonction, trancher le nœud gordien, trouver une issue et refonder l'académie sur une base nouvelle et - pourquoi pas ? - internationale.»