Antisémitisme : quelle doit être la réponse de l'Europe ?
Assassinat de Mireille Knoll dans son appartement parisien en mars, agression d'un Israélien portant la kippa dans une rue de Berlin en avril : ces récentes attaques antisémites ont fait les gros titres de la presse européenne - et déclenché un débat sur la sécurité des juifs en Europe et sur les mesures à prendre pour les protéger.
Les juifs abandonnés à leur sort
Etre juif en Europe aujourd'hui est à nouveau une raison d'avoir peur, déplore le journaliste et écrivain Pierluigi Battista dans Corriere della Sera :
«Hélas, l'antisémitisme n'est pas l'apanage d'une bande de têtes néonazies vides et tondues. Porter une kippa déchaîne la haine de ceux qui, en plus de vouloir éliminer les juifs, veulent détruire Israël, les infidèles qui profanent et salissent la 'Terre sainte'. ... Dans une Europe où une majorité apeurée et résignée tolère passivement l'antisémitisme sans la moindre velléité de s'insurger, en dépit des paroles creuses prononcées lors des cérémonies officielles de commémoration de l'Holocauste. Abandonnés à leur sort, les juifs doivent donc eux-mêmes prendre les choses en main : se cacher, dissimuler les symboles de leur identité. Une triste dérive. Les juifs sont en proie à une peur légitime et à un sentiment d'isolement dont l'Europe entière devrait avoir honte.»
Contre l'antisémitisme et toutes les autres haines
Le Parisien a publié dimanche un manifeste, signé par 300 personnalités d'horizons divers, dénonçant un 'nouvel antisémitisme'. Dans une tribune au Monde, l'historienne Marie-Anne Matard-Bonucci fait valoir que la lutte doit porter sur toutes les discriminations :
«Si l'on ne peut que partager les inquiétudes des auteurs de ce texte, il nous rappelle aussi que la lutte contre l'antisémitisme comme le combat contre d'autres formes d'hostilités identitaires ne saurait se résumer à quelques recettes simples. Elle ne peut être menée séparément du combat contre d'autres formes d'hostilités identitaires qui existent dans notre pays : le racisme anti-arabe ou anti-noir, les préjugés contre les musulmans stigmatisés pour leurs pratiques religieuses quand bien même ils ne sont pas solidaires des islamistes, le racisme anti-asiatique ou la 'romophobie'.»
Recontextualiser les écrits religieux
Le manifeste appelle les autorités théologiques de l'Islam à frapper d'obsolescence des versets du Coran appelant à la violence contre les personnes d'autres confessions. Le rédacteur en chef de La Libre Belgique, Dorian de Meeûs, doute de l'efficacité de la mesure :
«S'il faut bien admettre et regretter que des versets du Coran appelant à combattre des juifs, chrétiens et mécréants puissent être compris au premier degré et de manière anachronique, reconnaissons qu'il existe des interprétations plus modérées de ces textes du VIIe siècle. Et cette réflexion passe par un enseignement moderne des religions. Vouloir changer les textes fondateurs de l'islam paraît être un vœu pieux vu le rapport des musulmans aux textes sacrés. Et puis, cela n'éradiquerait en rien l'antisémitisme. Ce qu'il faut, c'est changer les perceptions et recontextualiser les écrits religieux suivis parfois à la lettre.»