Pourquoi le Kremlin veut généraliser la censure
Un projet de loi qui prévoit de sanctionner les propos offensants envers l'Etat et ses représentants, ainsi que la diffusion délibérée de 'fake news', a été présenté cette semaine à la Douma. Les éditorialistes s'interrogent sur les objectifs de cette nouvelle loi.
Les gilets jaunes inquiètent Poutine
Si le Kremlin lance ce paquet de mesures, c'est pour plusieurs raisons, estime Radio Kommersant FM :
«Les émeutes de Paris n'ont pas échappé à l'attention du pouvoir russe. Un premier signal a été émis la semaine dernière par l'émission télévisée 'Vesti nedeli', ou la contestation des gilets jaunes a été présentée comme une 'révolution de couleur' fomentée par les Etats-Unis. ... Les protestations en France créent une certaine nervosité, car certaines personnes feront inévitablement des parallèles. C'est précisément la perspective qu'il convient d'éviter ici. D'autant plus que la hausse de la TVA entre en vigueur au 1er janvier et qu'on ignore si les prix des carburants resteront stables. Dans ce contexte, la nouvelle mesure de 'prévention de la contestation' paraît logique.»
L'arme fatale
Vedomosti voit dans le projet de loi un dispositif fatal à la liberté de la presse et d'opinion :
«L'amendement peut devenir un instrument pratique de répression des publications et du journalisme indépendants. ... La possibilité d'infliger des sanctions à un individu qui tient des propos gênants pour le pouvoir enfreint grossièrement les normes européennes en matière de liberté de critiquer. ... Difficile de dire comment on arrivera à faire le distinguo entre les propos 'acceptables' et ceux qui ne le sont pas - il faudra faire une demande officielle d'expertise. Cette proposition, en soi, souligne la volonté du système de mettre en place un système dans lequel les 'sectateurs de l'Etat' veillent à ce que tout affront à leur encontre soit poursuivi en justice.»