Le débat sur l'Holocauste ravive les tensions entre Pologne et Israël
Un sommet initialement prévu cette semaine et devant rassembler à Jérusalem Israël et les pays du groupe de Visegrád a été annulé suite au désistement de Varsovie. A l'origine de cette volte-face, des articles de presse relayant les déclarations du Premier ministre, Benyamin Nétanyahou, et du chef de la diplomatie israélienne, Israel Katz, sur la collaboration de Polonais avec le régime nazi. Les chroniqueurs estiment que dans cette débâcle diplomatique, les torts sont partagés.
Le bilan désastreux du PiS en politique étrangère
La Pologne se marginalise sur la scène internationale, souligne Deutschlandfunk :
«Le gouvernement ultraconservateur avait recouru à une image frappante pour décrire sa politique extérieure : la Pologne se relevant de sa sempiternelle génuflexion. Selon eux, le pays avait toutes les raisons d'être fier de lui et de son passé. Résultat : le monde n'aura jamais autant parlé de la collaboration de Polonais avec l'occupant allemand pendant la Seconde Guerre mondiale. En outre, jamais la Pologne n'a été autant isolée. Ses relations jadis étroites avec ses partenaires, l'Allemagne et la France, se sont refroidies. Même ses alliés les plus proches, les pays du groupe de Visegrád, se montrent de plus en plus distants envers Varsovie. ... Le bilan de politique étrangère du PiS est proprement désastreux. Il faut espérer qu'il en prendra de la graine.»
Les effets collatéraux des campagnes électorales
Selon Adevărul, le conflit suit une logique assez évidente :
«Tout porte à croire que Nétanyahou est en mode électoral quand il parle de 'nation polonaise' dans le contexte de la collaboration avec les nazis. La réaction du chef du gouvernement polonais, Mateusz Morawiecki, a été immédiate : il a dénoncé des déclarations 'racistes et inacceptables'. ... Cette passe d'arme s'inscrit dans le débat plus vaste actuellement mené aux niveaux européen et international sur la résurgence des sentiments antisémites. ... Elle découle de la montée en puissance de mouvements et de partis politiques dont l'idéologie puise aux traditions du fascisme et de l'époque nazie. Ce débat est actuellement en train de s'enflammer et avant les européennes, tout le monde est en campagne. On recycle des arguments qui rouvrent d'anciennes plaies et rappellent de douloureux souvenirs.»
Le travail de mémoire pour désamorcer les tensions
Rzeczpospolita prodigue des conseils au gouvernement polonais :
«Il faut solliciter l'adhésion d'un public le plus vaste possible à une thèse simple : les Polonais ne sont pas tous sortis de la Seconde Guerre mondiale les mains propres. Il y a ceux qui ont participé à l'extermination des juifs. Sur les quelque trois millions de juifs polonais massacrés, plusieurs milliers ont été les victimes de leurs concitoyens polonais - que ceux-ci les aient assassinés ou trahis. ... C'est un chiffre important, que l'on ne peut ni taire ni oublier. Il ne s'agit cependant pas de victimes de l'Etat polonais ou de la 'nation polonaise'. Sans compter que dans ce bilan macabre, les Polonais s'en tirent mieux que beaucoup d'autres sociétés d'Europe centrale ou orientale ou d'Europe occidentale.»