Giscard d'Estaing : disparition d'un grand Européen
L'ancien président de la république française, Valéry Giscard d'Estaing, est décédé le 2 décembre à l'âge de 94 ans des suites du Covid-19. A l'Elysée de 1974 à 1981, Giscard avait bâti sa politique extérieure autour de la réconciliation avec l'Allemagne. En France, il a fait figure de modernisateur, désireux de transformer le pays. Pour son bilan dans ces deux domaines, la presse européenne lui tire son chapeau.
L'homme qui a modernisé la France
Giscard d'Estaing était un conservateur, mais un président du progrès, rappelle le correspondant de Corriere della Sera à Paris, Massimo Nava :
«Plus jeune président à entrer à l'Elysée à l'âge de 48 ans - un record qu'Emmanuel Macron a récemment battu - il incarnait la modernisation de la société française et le renouvellement de la droite, jusque là gaulliste. Son septennat a été marqué par d'importantes réformes sociétales, l'abaissement de la majorité et de l'âge du droit de vote, la dépénalisation de l'IVG et une politique de libéralisation économique. ... Le projet du TGV, la relance décisive du nucléaire et les premiers pas de la technologie de l'information - avec le fameux minitel - sont de cette époque.»
Quand des ennemis héréditaires deviennent amis
Hospodářské noviny rend surtout hommage au tandem VGE/Helmut Schmidt :
«Ils avaient en commun une intelligence hors pair et une expérience de la guerre, même s'ils l'avaient faite sur des fronts opposés. Mais au fond, ils se différenciaient sur l'origine sociale et sur la sensibilité politique. D'un côté le grand marquis français favorable à la libéralisation économique dans son pays. De l'autre le dirigeant de la social-démocratie allemande, partisan de l'Etat providence. ... Le duo Giscard-Schmidt ressemblait à celui qu'avaient formé Adenauer et de Gaulle, puis au tandem Mitterrand/Kohl. Ce qui les unissait, c'était la croyance en la nécessité de travailler en bonne intelligence, tout 'ennemis héréditaires' qu'ils étaient, et de favoriser la réconciliation européenne plutôt que de faire voler en éclats le continent en attisant les vieux conflits.»
Le moule est cassé
Pour Vzglyad, VGE était un de ces visionnaires européens qui n'existent plus à notre époque :
«Aujourd'hui, l'hégémonie allemande étreint ses voisins européens avec la poigne d'une grand-mère étouffante, tuant dans l’œuf une politique dynamique qui aille de l'avant. La vitalité française est supplantée par une économie pour les retraités et par la rigueur budgétaire allemande, qui imposent leur diktat. Les grandes envolées sous les premières présidences de la Ve république devaient être les dernières dans l'histoire de la grandeur de la France. Depuis trois mandats présidentiels, la France se débat dans un océan de problèmes sans qu'aucune solution ne se profile à l'horizon. ... Comparé aux responsables politiques européens d'aujourd'hui, Giscard d'Estaing était une personnalité d'exception, qui aura marqué l'histoire.»