La Suède à l'aube de bouleversements politiques ?
Le Premier ministre suédois, Stefan Löfven, a perdu la confiance du Parlement. Il a été mis en minorité par l'opposition conservatrice, le Parti de gauche (V) et la formation Démocrates de Suède (SD), jusqu'ici isolée. Celle-ci avait déposé la motion de censure, exploitant un désaccord entre le gouvernement social-démocrate/vert et la gauche, laquelle, si elle soutenait globalement le gouvernement, voulait peser de tout son poids contre un projet de libéralisation des loyers.
Les nationaux-conservateurs ont le vent en poupe
Dagens Nyheter fait part de son inquiétude :
«Quel impact des élections anticipées auront-elles sur la participation ? A quels responsables politiques les électeurs feront-ils payer le prix de ces désaccords ? Des questions que plusieurs partis se poseront sûrement. Dans le pire des cas, M [Moderaterna, conservateurs], KD [Chrétiens-démocrates] et SD [Démocrates de Suède] auront la majorité dans la nouvelle assemblée. Le risque est grand que Jimmie Åkesson [chef de file de SD] obtienne son bloc national-conservateur, et que la Suède ait donc un gouvernement de la même couleur.»
L'extrême droite n'est plus pestiférée
Kai Strittmatter, correspondant de Süddeutsche Zeitung pour la Scandinavie, gage que la marginalisation de SD est devenue obsolète :
«Son chef de file, Jimmie Åkesson, à l'origine de ce vote de défiance, se voit déjà en gagnant. Il n'y a pas si longtemps, SD - qui ne manquait pas une occasion d'exprimer son mépris pour le système démocratique en place - était vu comme le paria de la politique suédoise : personne ne voulait s'allier à lui. Ces temps sont révolus. Succombant à la séduction du pouvoir, le camp conservateur a brisé le tabou qui isolait l'extrême droite. Le SD est aujourd'hui courtisé. Peut-être que cette fois-ci sera la bonne.»
Cesser d'ostraciser SD
Berlingske ne partage pas les craintes de Süddeutsche Zeitung :
«Heureusement, les partis conservateurs ne snobent plus une coopération avec les Démocrates de Suède. ... Stefan Löfven a désormais une semaine pour former un nouveau gouvernement ou annoncer la tenue d'élections. Quel que soit son choix : l'heure est venue de traiter SD comme un parti normal dans le paysage politique suédois.»
Pas de stabilité en perspective
Gazeta Wyborcza décrit une situation enlisée :
«Pour éviter la tenue de deux élections à des intervalles rapprochés, il devrait être possible de trouver une majorité favorable à un gouvernement de transition. Stefan Löfven pourrait à nouveau le diriger, il resterait alors en fonction jusqu'à 2022. Le problème est que même si élections anticipées il y avait, il est peu probable qu'une majorité claire s'en dégage. Si l'on en croit les prévisions des sondages, les résultats d'un nouveau scrutin ressembleraient à ceux de 2018 : deux blocs sans majorité, l'un à la droite du centre, l'autre à sa gauche, entourés d'une myriade de petits partis poursuivant chacun des objectifs tellement contradictoires avec ceux des autres qu'une coalition gouvernementale avec une identité politique claire en devient impossible.»