Le Nobel de la paix décerné à Kyiv, Minsk et Moscou
Le prix Nobel de la paix 2022 est décerné à des défenseurs des droits humains du Bélarus, de Russie et d'Ukraine : le militant Ales Beljazki, actuellement incarcéré au Bélarus, l'organisation Memorial, récemment dissoute et interdite par le régime russe et le "Centre pour les libertés civiles", sis à Kyiv. Quel message peut-on tirer de cette remise de prix ?
On ne peut diviser les peuples entre 'bons' et 'mauvais'
L'écrivain Vasile Ernu salue dans Libertatea le fait que le prix ait été attribué à des représentants de trois pays :
«C'est une décision des plus sages et des plus judicieuses, puisqu'elle permet de combattre la tentative de diviser les peuples entre bons et mauvais. La décision arrive à un moment important et vient contrecarrer un discours impitoyable, aujourd'hui très en vogue, selon lequel les peuples 'mauvais' ne compteraient pas dans leurs rangs de gens bien, honnêtes et dotés d'une certaine carrure. Cette décision vient nous montrer qu'il existe bel et bien de telles personnalités, mais aussi des organisations, des groupes organisés qui s'engagent pour les droits humains dans les pays autoritaires et dictatoriaux et qui ont la force de lutter pour la liberté et la paix alors même que la guerre fait rage. »
Un symbole d'espoir
Le prix Nobel de la paix est l'expression d'un soutien moral accordé aux organisations de défense des droits humains menacées dans leur existence, croit savoir NRC Handelsblad :
«Le comité Nobel reconnaît le courage et la persévérance dont il faut faire preuve pour s'opposer à ces autocrates [Poutine et Loukachenko]. Les trois lauréats sont actuellement mis à rude épreuve et ont bien besoin d'un soutien moral. ... Mieux vaut néanmoins ne pas se faire d'illusion en croyant que pareille reconnaissance pourrait changer quelque chose. ... Mais cela ne diminue en rien l'importance du prix Nobel. De par le monde, il constitue avant tout un symbole d'espoir dont on ne pourrait se passer.»
Le Kremlin ne peut dissoudre 'Memorial'
L'ONG russe Memorial est lauréate du Nobel de la paix tout en étant interdite en Russie. Une situation nullement paradoxale, juge le professeur d'économie Konstantin Sonine dans un post Facebook :
«Comme chacun sait, le prix Nobel n'est pas attribué à titre posthume. ... Lors de la remise du prix à Memorial, le comité a souligné n'avoir aucun doute quant à l'existence et à la bonne santé de l'ONG. ... Le pseudo-légalisme de Poutine - soit sa capacité à déclarer 'légales' des décisions arbitraires et illégales par un tour de passe-passe et un peu de paperasse - s'est profondément ancré dans l'esprit des citoyens. ... Il n'existe nulle part - ni en Russie, ni ailleurs - d'organe d'Etat qui soit en mesure de nier l'existence de Memorial. Cela impliquerait de liquider, outre l'ensemble de ses collaborateurs actuels, tous ceux qui chérissent la mémoire, la Russie, le droit et la liberté.»