Les Allemands se mobilisent contre PEGIDA
Suite à des manifestations contre le mouvement islamophobe PEGIDA dans plusieurs villes allemandes lundi, des personnalités de la vie politique et économique ont également signé un appel contre la xénophobie. PEGIDA oblige les Allemands à s'investir pour la démocratie, écrivent certains commentateurs. D'autres reprochent à la politique extérieure suivie par Angela Merkel d'attiser l'islamophobie.
PEGIDA, un signal d'alarme pour les démocrates allemands
Parallèlement aux manifestations du mouvement PEGIDA dans plusieurs villes allemandes lundi soir, des milliers de personnes se sont mobilisées pour s'opposer à ces cortèges. Ces contre-manifestants montrent qui est vraiment le peuple, estime le quotidien de centre-gauche Frankfurter Rundschau : "S'il existe une once de positif dans le mouvement PEGIDA, c'est bien cela : la prise de conscience des citoyens, nouvelle ou réitérée, que notre Etat de droit démocratique n'est pas une évidence, mais qu'il nécessite une mobilisation active. … Au moment même où la politique traditionnelle perd de sa force d'attraction, les manifestations peuvent influer sur les discussions et les processus décisionnels, et imposer une plus grande proximité citoyenne. … [Les manifestants de PEGIDA] obligent la majorité silencieuse à s'exprimer, à prendre position, à ne pas laisser l'espace public aux autres. On observe ainsi une réaffirmation des démocrates au sein de la République allemande : Nous sommes le peuple [slogan de 1989, repris par PEGIDA]. Plus nous le dirons clairement, moins la tâche sera facile pour les démagogues de Dresde et d'ailleurs."
La politique extérieure de Merkel attise l'islamophobie
L'Allemagne doit se pencher davantage sur les raisons du nombre croissant des partisans de PEGIDA, demande le quotidien de centre-gauche Dnevnik : "La politique allemande doit prendre conscience du fait que depuis le départ de [l'ex chancelier allemand] Gerhard Schröder [en 2005], le gouvernement mené par Angela Merkel adhère trop à la politique américaine, qui agit dans le monde islamique tel un éléphant dans un magasin de porcelaine, ce qui a pour conséquence d'aiguillonner les extrémistes religieux. La diabolisation des régimes séculiers autocratiques en Irak, en Libye et en Syrie n'a pas abouti à la démocratisation souhaitée, mais à de grands flux de réfugiés, dont 200.000 ont obtenu le droit d'asile en Allemagne l'an dernier. Ce n'est pas [le chef de PEGIDA] Lutz Bachmann qui a ouvert la boîte de Pandore, mais la politique occidentale, artisan de l'Etat islamique."
L'extrême droite occulte l'histoire multiculturelle de l'Europe
Les mouvements opposés à l'immigration comme PEGIDA oublient que d'un point de vue historique, l'Europe a toujours été un creuset de différentes cultures en perpétuelle évolution, analyse le quotidien de centre-gauche The Guardian : "Les choses n'ont jamais été stables et la composition des populations n'a jamais été 'gravée dans la roche'. L'Europe constitue finalement l'appendice d'une masse continentale immense et contrastée. Elle a donc toujours été vouée à être un carrefour. Il se peut que nous soyons perturbés par ces changements, mais d'autres époques de l'histoire étaient caractérisées par une bien plus grande diversité. … La seule période pendant laquelle les Européens ont connu une relative homogénéité démographique - cette ère de tranquillité présumée - a été consécutive aux destructions perpétrées par Hitler et Staline. De telles réflexions ne suffiront peut-être pas à calmer les masses islamophobes. Mais elles peuvent y contribuer un peu."
L'UE doit faire front contre la xénophobie
PEGIDA en Allemagne, mais aussi des mouvements d'extrême droite en France et en Grèce ont le pouvoir de détruire l'UE, avertit le quotidien de centre-gauche El Paìs, qui propose des mesures pour lutter conjointement contre les positions extrémistes : "Il faut s'opposer aux flux d'immigration clandestins et aux structures mafieuses, à l'aide d'une action coordonnée et résolue, tout en encourageant et en promouvant ouvertement l'immigration légale. Nous avons également besoin d'une politique énergique et concertée des membres de l'UE contre les mouvements racistes : par des moyens juridiques, chaque fois que c'est possible, et par des mesures politiques dans tous les cas. Soit l'UE saura disperser ces mouvements désagrégeants, soit ce sont eux qui finiront par dissoudre l'UE. Nous ne pouvons pas laisser l'Allemagne, la France ou la Grèce affronter seules notre ennemi commun."