In or out ? Le référendum tient l'Europe en haleine
46,5 millions de votants doivent se prononcer aujourd'hui sur le maintien de la Grande-Bretagne dans l'UE. Les bureaux de vote fermeront leurs portes à 22 heures (heure locale), et les premiers résultats ne seront pas connus avant vendredi matin. Brexit ou Bremain ? Si certains éditorialistes ne cachent pas leur nervosité, d'autres relativisent la portée de ce scrutin.
Bouffons hier, leaders aujourd'hui...
Le référendum est pour le Tagesspiegel la preuve que les populistes occupent désormais le devant de la scène :
«L’heure n’est plus à la plaisanterie ni à la contestation. La décision qui sera prise aujourd’hui sera lourde de conséquences. En Europe et aux Etats-Unis, les populistes sont en pleine ascension. Ils ont une caractéristique en commun : initialement tournés en ridicule comme autant de bouffons de la politique et de fauteurs de troubles, diabolisés ensuite, ils se retrouvent aujourd’hui en position de force. … [Le leader de UKIP Nigel] Farage illustre le phénomène mieux que quiconque. Sans lui, il n’y aurait probablement pas de référendum sur le Brexit. … 'Les petites gens contre les grands d'en-haut' : avec cette formule, les populistes mobilisent massivement partout. Mais depuis la fin de la guerre, jamais les conséquences n’ont été aussi tangibles et aussi potentiellement fatales que celles du scrutin d’aujourd’hui au Royaume-Uni. Il semblerait que les électeurs commencent à prendre la mesure de la réalité du risque. Si les pro-Brexit ont longtemps été donnés vainqueurs dans les sondages, le camp du 'Remain' les a maintenant rattrapés.»
Le camp du Brexit séduit les impuissants
Les tenants du Brexit appâtent par de vaines promesses les perdants de la mondialisation dans la société britannique, critique The Irish Times :
«Le Brexit donne un nom et une explication à leur douleur : les migrants et les bureaucrates de Bruxelles. Le Brexit oppose à leur sensation d’impuissance l'illusion d’un pouvoir réel. Le Brexit serait vraiment un gros coup. Et pourtant, ce serait une automutilation. Les cyniques leaders pro-Brexit aspirent à une liberté qui leur permettrait de détricoter les normes de protection sociale et de protection de l’environnement, de même que les droits des travailleurs, qui ne sont que 'bureaucratie' à leurs yeux. Ils veulent faire tomber les dernières barrières qui s’opposent aux forces du marché - ces forces mêmes qui sont à l’origine de la douleur. A ceux qui sont en détresse et en marge de la société, ils présentent la lame de rasoir d'un incohérent nationalisme anglais en leur disant : 'Allez-y, tranchez-vous les chairs, ça fait du bien'.»
Ne prêter aucun crédit à la propagande mensongère pro-UE
Les opposants au Brexit mettent en garde contre les conséquences économiques d’une sortie de l’UE. Pour le Daily Mail, tout cela n’est que du vent :
«La vérité est que personne ne sait - à l’exception, semble-t-il, d’une élite ploutocratique - ce qu’il adviendra si nous faisons le choix du Brexit. Or en tant que cinquième puissance économique mondiale, nous savons qu'il devrait nous être possible de passer des accords avec des pays qui veulent vendre leurs produits et leurs services à nos consommateurs solvables. Nous savons que les Allemands auront encore très envie de nous vendre leurs voitures. Que les Espagnols continueront d’accueillir à bras ouverts nos vacanciers chargés de devises. Et que le monde entier continuera à faire appel aux compétences inégalées de la City. Et si le cours de la livre fléchit, eh bien ce sera bon pour les exportations.»
Le statu quo reste la meilleure option
Si les partisans du Brexit en Tchéquie espèrent que l’édifice européen s’effondrera entièrement, Lidové noviny pour sa part est alarmé par ce scénario :
«L’effondrement de l’UE entraînerait une volonté de s’imposer encore plus grande, surtout de la part des puissants Etats-nations. Notre pays, de même que d’autre pays coincés entre la grande Allemagne et la grande Russie, n’aurait plus la chance de former des coalitions spontanées, tantôt avec les Britanniques, tantôt avec les Français, tantôt avec les Allemands ou avec les Scandinaves. Nous serions écrasés par l’hégémonie des puissants. Il est certain que la démocratie allemande est préférable à l'autocratie russe. Et ce qui est préférable encore, c’est la situation actuelle, qui nous laisse le choix. Parmi toutes les mauvaises solutions, le statu quo est la moins mauvaise.»
Un penchant suicidaire
Les sociétés européennes sont en train de creuser leur propre tombe, affirme le quotidien ABC :
«L’abîme au bord duquel se trouve aujourd’hui la société britannique est révélateur des pulsions autodestructrices que ressentent les démocraties occidentales gâtées. Celles-ci semblent avoir oublié ce qu’il en a coûté de bâtir l’Etat providence et des institutions stables. L’essor de Podemos en Espagne, de Le Pen en France et des mouvements racistes en Europe centrale et septentrionale est symptomatique de tendances dangereuses, qui canalisent de façon irrationnelle des craintes citoyennes justifiées, mais largement ignorées par les institutions politiques et les dirigeants. Le cliché des 'dysfonctionnements du système' sert d’argument aux opportunistes qui répètent sempiternellement le même refrain.»
Calmer le jeu
De Standaard ne veut pas jouer les Cassandre :
«Les Britanniques ne courent pas à leur perte. De même que la culture européenne ne sera pas engloutie dans un trou noir au lendemain du Brexit. … La Manche ne s’en trouvera ni élargie ni rétrécie. On a beau en vouloir à ces insulaires rebelles, il est impératif d’entretenir le dialogue. Il faut accepter l’Europe telle qu’elle est. Avec son histoire, ses différences et l’incompréhension qu’elle suscite. Mais nous n’avons pas le droit d’abandonner l’Europe. Quel que soit le résultat ce soir, il ne faudra pas y répondre par une dissolution de l’Union. Dans la quête d’'unité dans la diversité', on a fortement privilégié l'unité. Mais pour être uni, il faut commencer par accepter la diversité.»
Qui fera le ménage demain en Grande-Bretagne ?
La campagne pro-Brexit a souvent exacerbé des sentiments hostiles à l'égard des travailleurs intracommunautaires, s’emporte le journal économique Ziarul Financiar :
«Les pro Brexit font valoir que les migrants corrompent la Grande-Bretagne et sa famille royale, qu’ils ne causent que des problèmes et sont des voleurs dont les mieux qualifiés privent les Britanniques des emplois bien rémunérés, parce qu’ils sont prêts à travailler plus dur pour moins d’argent. … La moitié des Britanniques veut expulser les migrants du pays. Mais à ce moment-là, qui donc fera leur ménage et s’occupera de leurs parents qu’ils ont envoyés en maison de retraite pour en être débarrassés ? Qui leur apportera le bassin pour uriner dans leur lit d’hôpital, qui réparera l’électricité et qui fera la tambouille, le jour où les étrangers seront partis ?… Sans les étrangers, la Grande-Bretagne ne survivrait pas longtemps, car les Britanniques sont aujourd'hui incapables de se charger de la basse besogne. Il n’y aurait plus personne qui travaillerait pour eux et qui financerait leur retraite.»
Cessez ces enfantillages !
Pour convaincre les Britanniques de ne pas quitter le giron européen, Robert Feluś, rédacteur en chef du journal à sensation Fakt, en appelle à leur honneur :
«Votre appartenance à la communauté des peuples européens est tout de même une partie de votre fierté insulaire. Vous mettez un point d’honneur à former un contrepoids fort à l’Allemagne, qui domine actuellement le continent. Voulez-vous vraiment claquer la porte de l'Europe ? En disant non à l’UE, vous vous comporteriez en enfant mal élevé et vexé qui dit : 'J’aime pas votre bac à sable, moi je reprends ma pelle et mon seau et je me casse'.»
La Grande-Bretagne, une grande sœur encombrante
Un Brexit placerait la Suisse devant un dilemme, selon le journal Le Temps :
«Séduits par la réussite des Islandais, Norvégiens et Suisses, une partie croissante des Européens rêve d’une vie hors de l’UE. Il n’est pas sûr que les Britanniques sauteront le pas lors de leur référendum ce jeudi. Mais s’ils le font, cela changera fondamentalement l’architecture du continent et la place que la Suisse y occupe. Depuis 1992, la Confédération s’est habituée à vivre dans une limbe en marge de l’UE, avec ses deux compères nordiques et quelques confettis. … Mais demain, en cas de Brexit, elle se retrouvera flanquée d’une encombrante grande sœur, envers laquelle il lui faudra très vite se positionner. … La Confédération se retrouverait prisonnière d’un bras de fer qui la dépasserait. Ce qui explique que le Conseil fédéral soit presque aussi passionnément attaché au maintien du Royaume-Uni dans l’UE que l’Union elle-même.»
Cameron en sauveur de l'UE ?
Si les Britanniques optaient finalement pour le Bremain, ce serait un véritable revers pour les eurosceptiques des autres pays, juge Helsingin Sanomat :
«Le jeu de Cameron est assez cocasse, car s'il se salit forcément les mains, il pourrait néanmoins sauver l’UE. Si les partisans de l’Europe l’emportaient, ce serait un véritable revers pour les forces europhobes et 'exitogènes' dans les autres Etats membres. Si la sortie de l'UE n’est pas envisageable pour la Grande-Bretagne, elle ne le sera pas non plus pour les autres pays.»
Le Brexit serait une thérapie de choc salutaire
L’Europe est en proie à une crise fondamentale, déplore le journaliste José Vítor Malheiros dans le quotidien Público. C'est la raison pour laquelle il souhaite une victoire du Brexit :
«En mon for intérieur, j’espère ardemment que jeudi, le Brexit l’emporte. Non pas parce que je pense que la Grande-Bretagne serait mieux lotie en dehors de l’UE. Pas plus que ne le serait l’UE privée de la Grande-Bretagne. Mais parce que j’espère que ce sera le choc qui enclenchera enfin un changement politique et un examen de conscience, donnant à l’UE l’impulsion démocratique qui lui fait si gravement défaut. Sans Brexit, il sera impossible à l’UE de se réformer et de se reconstruire dans un autre format (sous le signe de la décence). … Le fait est que l’UE n’est plus cette Europe des valeurs dont nous avions rêvé. L’UE a kidnappé l’Europe et l’a transformée en un bordel. Le rêve a viré au cauchemar.»
L'occasion pour l'Europe de se redéfinir
Le référendum sur le Brexit sera pour l’Europe l’occasion d’engager enfin une discussion sur son avenir. Cumhuriyet en a la conviction :
«La conscience collective de cette population insulaire s'est construite sur l'invasion européenne de 1066, la guerre contre l’Allemagne hitlérienne, l’empire britannique qui s’est étendu sur les sept mers de ce monde et l’héritage du commerce. Et sur l’idée que le pays est le berceau de la démocratie et peut prendre ses décisions de manière autonome. … C’est en Europe qu’il faut chercher le véritable problème. Face aux problèmes engendrées par la crise financière de 2008, l’UE se trouve à la croisée des chemins. … Aux Pays-Bas, en France, au Danemark et en Autriche, les eurosceptiques gagnent du terrain. … Que le Brexit se fasse ou non, l’initiative ne restera pas sans écho dans les autres pays. La discussion sur une Europe nouvelle, abordant les grands thèmes de l’identité nationale, de l'immigration et d’une mondialisation alternative, est à l’ordre du jour.»
Pour prévenir d'autres 'exits', l'Europe doit faire mieux
Si l’UE veut empêcher que d’autres Etats ne tournent le dos à l'UE, elle doit de toute urgence présenter des solutions à ses citoyens, écrit La Stampa :
«Quel que soit le résultat du référendum, l’Europe a épuisé le temps qui lui était imparti. Avant que le prochain pays n’aspire à sortir de l’Union ou que les mouvements eurosceptiques progressent encore plus, les politiques doivent envoyer des signaux concrets aux citoyens : l’Europe peut contribuer à une amélioration des conditions économiques et à la création d’emplois. C’est pourquoi il serait bon qu’après-demain, les chefs d’Etat et de gouvernement prennent des décisions à Bruxelles qui aillent de la simplification de la bureaucratie à l'émission d'euro-obligations pour financer la crise des réfugiés, en passant par une augmentation du budget de l’UE.»
La Pologne pourrait elle aussi quitter le navire
La Pologne pourrait devenir un candidat à 'l'exit', redoute Adam Szłapka, secrétaire général du parti libéral Nowoczesna, sur son blog hébergé par le portail naTemat :
«J'incite expressément les Polonais de Londres à voter en faveur du maintien du pays dans l'UE. Car un Brexit remettrait en cause toute intégration future. Or c'est cette intégration qui a apporté 70 années de paix à l'Europe et une croissance rapide à la Pologne. ... Un Brexit durcirait un peu plus la rhétorique nationaliste du PiS. Aux yeux de nombreux partenaires européens, la Pologne passe aujourd'hui pour être un pays anti-européen, qui ne reconnaît pas les valeurs sur lesquelles est fondée la communauté. Se pose d'ores et déjà la question d'un potentiel 'Polexit' à la suite d'un Brexit. Ces craintes n'étant pas injustifiées, croisons les doigts pour que le camp de l'Europe s'impose en Grande-Bretagne.»
Liberté ou servitude ?
Les nations européennes pourraient bien mieux se défendre face aux menaces internes et externes si elles formaient des Etats complètement autonomes, assure la chroniqueuse pro-Brexit Melanie Phillips dans The Times :
«L'objectif fondamental du projet européen consistait à contenir le militarisme allemand. Or les temps ont changé et l'Allemagne est aujourd'hui une démocratie. Par ailleurs, l'UE alimente elle-même l'essor des partis néofascistes, qui instrumentalisent les intérêts nationaux bafoués par l'UE. Pour que les sociétés libérales européennes puissent se défendre face à leurs ennemis - que ceux-ci viennent du monde musulman, de Russie ou d'Extrême-Orient - il faudra des Etats autonomes luttant pour leur propre avenir en s'alliant avec d'autre Etats autonomes. ... Liberté ou servitude ? C'est le choix que nous devrons faire jeudi.»
Les Britanniques pourraient rapidement regretter le Brexit
Les Britanniques anti-UE déplorent le principe de libre circulation, qui aurait selon eux généré l'afflux incontrôlé de migrants intracommunautaires. Or c'est précisément cette liberté qu'ils pourraient amèrement regretter en cas de Brexit, selon The Irish Times :
«L''immigration nette' en Grande-Bretagne ces dernières années est en réalité le reflet du succès économique britannique, notamment en termes de garantie du plein emploi. ... L'immigration nette peut aisément se transformer en 'émigration nette' lorsqu'une économie vacille. Si la Grande-Bretagne choisissait le Brexit, l'économie du pays pourrait entrer en récession, comme le suggèrent la plupart des analyses économiques. Ceci 'résoudrait' le 'problème' de l'immigration. Dans un tel cas de figure, Il serait ironique que les travailleurs britanniques ne puissent pas émigrer librement dans d'autres pays de l'UE - Irlande incluse - pour y trouver du travail.»
Un débat sur le 'Nexit' porterait préjudice aux Pays-Bas
En cas de Brexit, les Pays-Bas n'échapperont pas au débat sur une sortie de l'UE, prévient le chroniqueur Peter Waard dans De Volkskrant :
«Les conséquences économiques d'un Brexit pourraient être considérables - non pas en raison d'un potentiel recul des exportations, mais parce que les Pays-Bas sombreraient dans un débat sans fond sur le 'Nexit'. Les 'gardiens de la nation' néerlandais domineront les émissions de débat, en préconisant l'organisation d'un référendum dans le pays. ... S'il n'y a pas de majorité favorable à cette initiative au Parlement, les partis seront néanmoins confrontés à une pression considérable avant les prochaines élections [de mars 2017]. La voix du populisme est puissante. ... Les répercussions indirectes d'une instabilité politique à La Haye représenteraient un risque bien plus grand pour l'économie que la perspective d'un Brexit. Si les Britanniques disent oui, le virus de 'l'exit' se propagera aux Pays-Bas. Geert Wilders et consorts y verront une victoire sur la bureaucratie de Bruxelles.»
Un 'Bremain' ne sauverait pas l'UE
Même si les Britanniques décidaient de rester dans l'UE le 23 juin, l’Union resterait un édifice bancal, selon Le Figaro :
«Il n’est pas surprenant que dans une Europe qui stagne, qui ne crée pas d’emplois et qui monte les communautés les unes contre les autres en menant des politiques d’austérité considérées par les uns comme abusives, par les autres comme insuffisantes, on observe une montée des groupements hostiles à l’UE. ... Les problèmes soulevés par les europhobes ont beau être réels, cela ne fait pas pour autant de leurs propositions (sortie de l’UE, retour à la monnaie nationale, expulsion des immigrants) des solutions valables. C’est toutefois précisément la politique de l’autruche de l’establishment européen et son inaction qui leur donnent de la crédibilité. Une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’Union serait sans nul doute catastrophique pour le projet européen. Néanmoins, quand bien même les partisans du maintien l’emporteraient, l’Union demeurerait sous la menace de l’embrasement de sa périphérie, de la stagnation de son économie et de l’aliénation d’une grande partie de ses citoyens.»
La renaissance des Etats-nations au sein de l'UE
Quelle que soit l’issue du référendum sur le Brexit, l’UE doit remiser son arrogance envers les Etats-nations, estime Jyllands-Posten :
«L’UE doit retrouver l’équilibre entre Bruxelles et les Etats membres. Il ne suffit pas de rivaliser d’ardeur à déclamer l’essai le plus enlevé sur l’UE. La coopération européenne est foncièrement juste et trop précieuse pour qu’après l’échéance de jeudi, on puisse ignorer le résultat du référendum et continuer de faire comme si de rien n’était. Bruxelles et les Etats membres doivent essayer de tirer les leçons des nombreuses erreurs de ces dernières années, et de transformer le climat eurosceptique en un soutien positif, favorable à une Europe qui n’a jamais été aussi libre et pacifique qu'aujourd'hui. Admettre la renaissance de l’Etat-nation est un bon point de départ. Ceci dit, l’UE peut fournir un cadre excellent à une coopération européenne absolument indispensable.»
S'inspirer de l'histoire britannique
L’Europe devrait se pencher sur l’histoire de l’empire britannique et en tirer des enseignements, lit-on dans Welt am Sonntag :
«Son effondrement a aiguisé l'intelligence des Britanniques plus que ne l'avait fait son acquisition. Il s'agit de la sagesse dont nous aurons cruellement besoin à l’avenir. Ce peuple est aujourd’hui notamment gouverné par des lords féminins d’origine pakistanaise, ce qui atteste de sa capacité à intégrer des personnes étrangères, et de particularités que l’on ne trouve nulle par ailleurs. ... Si la Grande-Bretagne y est parvenue, c'est parce qu’elle s’est retirée de ses colonies de manière plus intelligente et plus précautionneuse que d’autres. Après 1945, elle a suivi la formule 'manageable decline' - déclin gérable. Une notion censée décrire une manière de lâcher prise sans essuyer de pertes. Une manière de continuer de gagner même quand on ne décide plus des règles. Si l’on ne veut pas se faire encercler, il faut veiller à une certaine équité. C’est la formule que l’Europe entière doit apprendre.»
L'Europe a besoin de la Grande-Bretagne
Sans la Grande-Bretagne, l’Europe ne pèserait pas bien lourd, explique Kristeligt Dagbladet :
«Un des arguments les plus probants en faveur du maintien dans l’UE est le constat que pendant les décennies d’après-guerre, l’UE a été un projet de paix. Pourrait-on aujourd’hui sérieusement s’imaginer une Europe sans une collaboration, de quelque nature qu’elle soit ? Bien évidemment non. … La vérité qui se profile dans la perspective du 23 juin est que l’Europe a tout autant besoin des Britanniques sur le continent que les Britanniques ont besoin de l’UE. Le profond scepticisme britannique envers le centralisme, les rêves sociaux de l’Union et le projet de l’euro est indispensable à l’ensemble. Car à y regarder de plus près, cet ensemble est le fruit des accords passés par les chefs de gouvernement des différents pays. De ce point de vue, nous avons besoin des Britanniques.»
Tout le monde joue sur la peur
Depuis deux semaines, la campagne de David Cameron tourne autour des conséquences économiques d’un Brexit. Une maladresse sur le plan politique, critique Le Soir :
«C’est Cameron et les siens qui ont maintenant développé leur propre argument de la peur, celui de la déchéance économique. Montant d’un cran, le ministre des Finances George Osborne vient d’annoncer une récession immédiate en cas de Brexit, qui nécessiterait des coupes budgétaires et des augmentations d’impôts. Face à cette menace qui confine au chantage, les Britanniques ont raison de douter : comment penser que David Cameron ait pu promettre à ses concitoyens un référendum, s’il avait pensé un seul instant que l’une de ses deux issues possibles serait l’effondrement économique ? Pauvres Britanniques, réputés si raisonnables, et qui ne se voient offrir que la terreur comme argument pour sortir ou rester dans l’Union européenne.»
Après un Brexit, pas de retour en arrière possible
Le vote de jeudi prochain sera pour les Britanniques un point de non retour, met en garde l’économiste Tomáš Sedláček dans sa chronique pour le journal Hospodářské noviny :
«Une sortie de la Grande-Bretagne de l’UE serait une décision définitive. Cette sortie est bien sûr possible. Nous vivons dans un monde libre. Mais par la suite, il n’y aura pas de nouvelle adhésion. Nous ne sommes pas fous. La porte de l’UE restera fermée. Oui, l’Europe est une épreuve. Si nous brisons aujourd’hui ce que nous avons construit après la guerre, nous ne pourrons jamais recoller les morceaux. Si, par contre, nous résolvons ensemble les problèmes actuels, rien ne pourra plus nous séparer.»
L'Euro de foot, un impact sur le référendum ?
Les résultats de la sélection anglaise à l’Euro de football pourraient fortement influencer le débat sur le Brexit dans la dernière ligne droite, souligne le journal New Statesman :
«Le championnat d’Europe est l’exemple de notre participation active à l’Europe - une participation qui passionne les citoyens bien plus qu’elle ne les ennuie ou ne les exclut. L'Euro pourrait apporter une dose nécessaire de passion dans les derniers jours de la campagne électorale. … Une gifle infligée à la fierté nationale à un moment où l’on se pose des questions fondamentales pourrait avoir des effets étranges et imprévisibles sur la perception de notre place dans le monde, et donc de notre place en Europe. Comme l'a dit un jour le légendaire président du club de Liverpool, le socialiste Bill Shankly : 'Certaines personnes pensent que le football est une question de vie ou de mort. Je peux vous assurer que c’est bien plus que cela'.»
Le grand gagnant : le populisme
Les partisans du Brexit ont fait campagne dans le registre émotionnel, ce qui a transformé le débat en une bataille purement populiste, critique Göteborgs-Posten :
«Malgré la crise de la dette, le marché unique européen reste et demeure la plus grande source de croissance et de prospérité que l’Europe ait jamais connue. Pourtant, les pro-UE n’ont pas réussi à imposer les arguments selon lesquels une sortie serait préjudiciable aux exportations et à la croissance. Comme les pro-Brexit, qui ont porté la campagne sur un terrain purement émotionnel, les pro-Bremain auraient pu faire de ce référendum une question de valeurs. … Quelle que soit l’issue du scrutin, le Brexit laissera derrière lui une Grande-Bretagne profondément divisée. Le débat sur le Brexit a ouvert grand la porte du populisme ; les autres pays de l’UE doivent y voir un avertissement. Même si les Britanniques se décident pour une sortie, cela ne changera rien aux problèmes des disparités régionales, des prix vertigineux de l’immobilier et des sombres perspectives d’avenir pour la main d’œuvre peu qualifiée.»
Les pro-Brexit récupèrent les concessions de l'UE
Les concessions faites par Bruxelles à Londres pour convaincre les Britanniques de rester dans le giron européen pourraient avoir l’effet inverse à celui escompté, redoute La Vanguardia :
«Les efforts consentis par Bruxelles pour accorder davantage de souveraineté à David Cameron et limiter la libre circulation des travailleurs semblent s’être volatilisés sans le moindre effet. De surcroît, les partisans du Brexit s’emparent de ces concessions. Surtout après la reconnaissance mardi par la Cour de justice de l'UE du droit de Londres à conditionner à la détention d'un certificat de résidence légal l’octroi d’un certain nombre de prestations sociales aux travailleurs issus d'autres pays de l'UE. 'Les juges nous donnent raison', affirment-ils.»
L'UE n'a jamais bridé l'économie britannique
Contrairement à ce qu’affirment volontiers les partisans du Brexit, l’UE n’a pas entravé le développement économique de la Grande-Bretagne, qui a par ailleurs suivi un modèle différent de celui des autres Etats européens, écrit le chroniqueur Daniel Finkelstein dans The Times :
«Depuis notre adhésion à l’UE en 1973, notre économie a évolué plus vite que les économies allemande, française et même américaine. Depuis l’entrée en vigueur du marché unique en 1993, notre économie a enregistré une croissance de 62 pour cent, contre 35 pour cent pour l’Allemagne. On peut bien sûr avancer l’argument que cette croissance s’est faite malgré l’UE et non grâce à elle. Et que si nous réussissons, c’est parce que nous avons adopté un modèle économique différent de celui de nos partenaires. Mais cet argument a des implications : l’UE ne nous dicte pas nos lois et notre modèle économique. Nous avons eu toute latitude de diverger, et non de converger avec nos voisins.»
Un arrêt des transferts monétaires vers la Roumanie ?
L’hebdomadaire Revista 22 pointe les répercussions négatives sur l’économie roumaine d’une éventuelle sortie de la Grande-Bretagne de l'UE :
«Un Brexit pourrait placer dos au mur les Roumains qui travaillent en Grande-Bretagne et qui, selon les estimations de la banque BCR, envoient annuellement plus d’un demi milliard d’euros dans leur pays. Quelque 170 000 Roumains vivent actuellement en Grande-Bretagne, dont 85 pour cent exercent une activité. En cas de Brexit, soit ils rentreront chez eux, soit ils se mettront en quête d’un emploi dans un autre pays européen. Mais si les Roumains qui travaillent à l’étranger cessaient d’envoyer de l’argent au pays - un transfert qui constitue au total 0,3 pour cent du PIB - le déficit des opérations courantes pourrait s’en ressentir sensiblement et la devise nationale s’en trouverait encore plus sous pression.»
L'avènement de l'aile droite des Tories ?
Dans l’hypothèse d’un Brexit, c’est l’aile ultraconservatrice et europhobe des Tories qui s'imposerait au gouvernement, prévient le chroniqueur Jon Danzig dans The Independent :
«Imaginez notre gouvernement actuel se muer en un nouveau cabinet uniquement composé d’eurosceptiques de droite, avec la mise à l’écart des conservateurs pro-européens modérés suite à leur défaite au référendum. Un nouveau gouvernement conservateur qui ne serait plus soumis aux règles progressistes et aux garde-fous de l’UE - notamment au plan des droits des travailleurs, de la liberté de circulation et de la protection de l’environnement. Si vous êtes l’un de ceux qui clament 'Nous voulons récupérer notre pays !', réfléchissez une seconde au pays que vous récupéreriez si nous abandonnions l’UE, et à ceux qui le dirigeraient alors. Vous représenteraient-ils vraiment ?»
Le retour de la 'ligne Oder-Neisse'
Une sortie de la Grande-Bretagne de l’UE aurait pour conséquence une nouvelle partition Est-Ouest de l’Europe, redoute le chroniqueur Jan Hartman sur son blog hébergé par le site du magazine Polityka :
«Le Brexit contraindra l’Allemagne, la France et les Etats du Benelux à former une 'mini-UE'. Une entité à laquelle il est peu probable que nous appartenions. Car la Pologne, la Hongrie et une majeure partie de la République tchèque et de la Slovaquie n'y auraient pas leur place. C’est le cas aujourd’hui, et ce le sera aussi à l’avenir. L’Ouest restera toujours l’Ouest, et nous serons toujours l’Est. Le rêve de la civilisation et de la culture politique occidentales s’évanouira en Pologne. En avançant le prétexte d’un risque terroriste ou de la nécessité de résoudre les problèmes migratoires, on refermera les frontières - et ce certainement le long de la ligne Oder-Neisse.»
Du pain bénit pour les séparatismes
Dans l’hebdomadaire Expresso, le journaliste Ricardo Costa évoque les possibles conséquences d’un Brexit :
«Il ne s’agirait pas seulement de la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE. A long terme, on pourrait également assister au départ de l’Ecosse du Royaume-Uni et à court terme, à l’établissement d’une frontière classique entre l’Irlande et l’Irlande du Nord. L'anticipation de ces trois scénarios devrait donner la chair de poule à tous les Européens. Mais les secousses que ce séisme provoquerait de notre côté de la Manche font encore plus froid dans le dos. Car si une Ecosse indépendante était acceptée au sein de l’UE, ceci servirait de modèle à la Catalogne et à d’autres régions, qui aspirent à une pleine autonomie tout en voulant rester dans le giron de l’UE.»
Pour une Europe sociale
Dans le cadre du débat sur le Brexit, les politiques doivent inciter l'UE à donner une perspective à ses citoyens, écrit Jurek Kuczkiewicz, du quotidien Le Soir, dans un commentaire repris - entre autres - par La Repubblica :
«Il faut aujourd’hui apporter aux Européens … un projet qui leur apporte un bénéfice direct et tangible, qui calme au moins l’un des sentiments d’insécurité qui traversent le continent. Voici un champ rêvé : le social. … On n’ose rêver d’une allocation européenne de chômage. Mais pourquoi pas un complément européen d’allocations (chômage, enfants, éducation, maladie ou pension ?) qui remplirait une fonction économique et sociale, et solidifierait un pacte social européen gravement fissuré ? … Au lendemain d’une décision britannique de quitter l’Union européenne, les dirigeants européens seraient bien inspirés de venir avec un projet concret, clair, fédérateur, directement utile à un grand nombre de citoyens, et perçu comme tel. Sinon, on ne donne pas cher de cette Union.»
La France doit montrer la voie de l'avenir
Il revient à la France, Etat fondateur de la Communauté européenne et chantre de la poursuite de l’intégration européenne, de donner un nouveau souffle à un projet européen en crise, presse l’ex-président Valéry Giscard d'Estaing dans Le Point :
«D'une manière étrange et paradoxale, le référendum britannique restitue à la France son rôle – bien oublié – de pays fondateur de l'Europe. Que la réponse soit positive ou négative, elle sépare définitivement les deux projets du Grand Marché et de l'intégration européenne. Ce sont donc deux démarches distinctes qui devront désormais être conduites. La France, qui porte, depuis la déclaration de Robert Schuman il y a maintenant soixante-six ans, le projet d'une avancée graduelle en direction d'une Europe plus intégrée – et qui l'a déjà fait cheminer jusqu'à la monnaie commune –, doit proposer de nouvelles étapes à ceux qui comprennent la nécessité d'une Europe puissante dans un monde nouveau.»
La démocratie britannique n'a jamais été aussi vivace
Le référendum sur le Brexit a permis d'amorcer des débats fondamentaux en Grande-Bretagne, se réjouit la chroniqueuse Mary Dejevsky dans The Independent :
«Il s’agit d'un référendum national, non d'un scrutin mené à l’échelle des circonscriptions, et les points de vue sur l’Europe dépassent les lignes partisanes. Cela favorise ainsi un dialogue national et la prise de conscience d’une politique nationale. Quand des ministres s’affrontent publiquement sur les enjeux relatifs à la City de Londres ou aux emplois ouvriers, sur le type et le niveau d’immigration désirés, ou encore sur la rétrocession pratique de souveraineté au XXIe siècle, on assiste en fait à la dissection de questions fondamentales qui auraient depuis longtemps mérité d'être débattues ouvertement. … Cela fait bien des décennies que je n’avais pas vu autant de démocratie à l’œuvre en Grande-Bretagne.»
L'UE doit se pencher sur ses déficits
Le référendum sur le Brexit devrait être pour l’UE l’occasion d’engager une réflexion sur elle-même, préconise Neue Zürcher Zeitung :
«C’est peut-être un vœu pieux. Mais l’UE ne devrait pas snober cette rare occasion de démocratie directe et en profiter pour se pencher de plus près sur ses propres déficits, qui sont manifestes. Faute de quoi on pourrait assister à un effet boule de neige, et les Pays-Bas, le Danemark ou la Finlande pourraient eux aussi entamer des débats de sortie épuisants. Les deux camps seraient plus avancés s’ils s'engageaient de manière constructive pour un meilleur fonctionnement de l'Europe. Si Londres et Bruxelles étaient mariées, on leur conseillerait de suivre une thérapie de couple.»
Cameron ne met pas en valeur les atouts de l'UE
En Grande-Bretagne, le camp pro-européen du Premier ministre David Cameron devrait bien plus insister sur les acquis historiques de l’UE, exige The Wall Street Journal :
«Une campagne pro-européenne sûre d’elle pourrait envoyer un message fort sur le rôle essentiel de l’UE en tant que mécanisme permettant à 28 Etats souverains de trouver des solutions communes à des problèmes communs, sur un continent en proie à une instabilité historique. On comprend mal pourquoi Cameron ne fait pas davantage valoir l’importance de l’UE face aux défis internationaux, des menaces terroristes au changement climatique en passant par l'immigration illégale. Enigmatiques aussi, ses réticences à parler de sa métamorphose personnelle - de pourfendeur de Bruxelles, il est devenu fervent défenseur de l’adhésion à l’UE - et de ce que ce parcours a pu lui enseigner sur les réalités de la diplomatie internationale.»
Certains des arguments des pro-Brexit confinent au racisme
En Grande-Bretagne, les immigrés issus de pays membres de l’UE sont les boucs émissaires des partisans du Brexit - une injustice que dénonce The Irish Times :
«C’est bien au chapitre de l’immigration que la distorsion de la vérité a été le plus cynique et a le plus frôlé le racisme [dans le débat sur le Brexit]. Les pro-Brexit capitalisent sur la crainte que le système de santé, qui survit grâce au travail des migrants, et les logements sociaux soient pris d’assaut par les migrants - ceux-là même qui, comme le prouvent les études, paient davantage d’impôts qu’ils ne touchent d’allocations. … Non sans cynisme, les eurosceptiques laissent entendre aux immigrés provenant des pays du Commonwealth que le seul obstacle au regroupement familial sont les migrants européens. … Comme si un gouvernement mené par [le maire de Londres Boris] Johnson et [le ministre de la Justice Michael] Gove serait subitement emballée par l'idée d'une immigration des noirs.»
Une hystérie superflue
Beaucoup de bruit pour pas grand chose. C'est ce qu'on pourrait retenir du débat sur le Brexit, écrit le politologue Hendrik Vos dans De Standaard :
«Toutes les variantes sont envisageables, mais l’accord qui finira par être conclu avec les Britanniques ressemblera comme deux gouttes d’eau aux accords que l’Union a passés avec la Norvège ou la Suisse. Si ces pays ne sont pas officiellement Etats membres, ils le sont dans la pratique. … C’est indispensable à leur survie. Si le Brexit l’emporte, un certain nombre de têtes tomberont en Grande-Bretagne, notamment celle du Premier ministre. En politique, toutes les pirouettes ne sont pas permises. Mais on finira par se demander si le Brexit valait bien toute cette hystérie. On passera avec l’Union des accords compliqués, pleins de clauses et de protocoles. On gaspillera une précieuse énergie politique. Mais il y a de grandes chances que la Grande-Bretagne reste dans l’UE, même si elle la quitte.»
Pourquoi les Suisses salueraient un Brexit
L’idée d’un Brexit ne suscite nulle part autant de sympathies qu’en Suisse, observe Der Tages-Anzeiger :
«C’est naïf, myope et aussi un peu fou – mais ce n’est pas inexplicable. Premièrement, les Suisses se sentent assez proches des Britanniques dans leur aversion pour l’UE. Comme les Britanniques, nous nous considérons comme un cas à part - un pays qui se trouve au cœur de l’Europe sans en faire vraiment partie. Qui se définit de plus en plus par le repli sur soi. Et qui voit dans l’Europe unie moins un projet de paix qu’un magasin dans lequel on peut faire de bonnes affaires, et ce même quand on n’en est pas membre. Deuxièmement, une idée est tenacement enracinée dans la politique suisse : un départ de la Grande-Bretagne résoudrait nos problèmes avec Bruxelles, tout particulièrement au chapitre de la libre circulation des personnes.»
Le Bremain, un atout pour Orbán
Un maintien de la Grande-Bretagne dans le giron de l’Union européenne serait dangereux. C’est du moins ce qu’affirment le sociologue László Bruszt et l’économiste Nauro F. Campos dans le journal Népszabadság :
«Dans l’hypothèse d'un maintien dans l’UE, le pays a déjà négocié la possibilité de rester à l’écart de tout approfondissement futur de l’intégration européenne. Une telle évolution profiterait aux nationalistes antilibéraux dans les PECO, à l’image du Premier ministre hongrois Viktor Orbán, qui aime à défendre le primat de la souveraineté nationale sur Bruxelles. Si les Britanniques restaient en Europe, ceci apporterait de l’eau au moulin d’Orbán et de ses alliés en Europe de l’Est, lesquels s’opposent au transfert de nouvelles compétences à l’Union. … Du point de vue de l’intégration européenne, la perspective d’un Brexit doit donc être perçue de façon positive.»
Repenser le processus d'intégration
Il faut refondre l’Union européenne et la scinder en deux communautés distinctes. C'est la proposition du politologue Sergio Fabbrini dans Il Sole 24 Ore :
«Quelle que soit l’issue du référendum, il faudra clarifier la nature des relations entre le Royaume-Uni et les Etats occidentaux d’Europe continentale, qui appartiennent pour la plupart à l’Union économique et monétaire (UEM). … Il convient d’engager un processus qui suive un double objectif : l’établissement d’une union politique exclusive suivant les contours de la zone euro, et la mise en place d’une communauté économique inclusive bâtie sur le marché unique (comprenant les 28 Etats membres). Il sera plus facile d’effectuer cette révision si la Grande-Bretagne reste à bord. Mais même en cas de Brexit, il faudra - au moins - deux années de négociations, soit le temps nécessaire pour accoucher de deux organisations distinctes, plutôt que de couper les liens entre le Royaume-Uni et l’UE. L’heure est venue de renoncer à l’idée d’une intégration européenne qui se limiterait à une entité unique.»
Le Brexit, aussi dangereux que la faillite de Lehman-Brothers
Une sortie de la Grande-Bretagne de l’UE pourrait avoir des conséquences aussi importantes que celles de la faillite de la banque Lehman-Brothers en 2008, analyse Aivar Rehe, ex-directeur de la filiale estonienne de Danske Bank, dans le journal Äripäev :
«La possible décision des Britanniques et la crise amorcée par Lehman-Brothers présentent des similitudes. Nous devrions donc nous préparer aux répercussions d’un Brexit. Je conseille dès lors aux entrepreneurs de dépoussiérer les notes qu’ils avaient rédigées à l’époque de la crise financière et de réfléchir à des scénarios de crise envisageables. Une décision d’une telle portée générera troubles et incertitudes sur les marchés financiers - on parle également de 'volatilité' dans le jargon de la finance. La crise de Lehman-Brothers avait fortement réduit les transactions à risque dans le secteur de l’immobilier. Un Brexit engendrerait également un conservatisme accru dans la gestion des risques par les banques. Je recommande aussi aux ménages de se constituer un pécule financier de secours.»
De grâce, quittez l'Union !
Jean Quatremer, correspondant de Libération à Bruxelles, conseille aux Britanniques de voter pour le Brexit:
«Autant dire, amis Anglais, que votre maintien dans l’Union évitera une crise immédiate, mais plombera durablement le projet européen jusqu’au délitement final. L’Europe, qui voulait peser dans un monde où l’Occident deviendra inexorablement quantité négligeable, ne sera plus qu’un failed project qui fera sourire les dirigeants chinois, indiens ou même américains. Seul votre départ en fanfare pourrait lui permettre de rebondir. Je ne suis pas un adepte de la 'crise salutaire', mais l’Europe est déjà en catalepsie, et seul un choc de grande ampleur pourrait la réveiller et obliger les dirigeants les plus visionnaires (s’il en reste) à réagir pour éviter un émiettement mortel.»
Le modèle norvégien ne conviendrait pas aux Britanniques
Pour continuer à avoir accès au marché intérieur européen en cas de Brexit, la Grande-Bretagne devrait alors se conformer aux règles de celui-ci sans pouvoir contribuer à les édicter, prévient The Independent :
«Du point de vue britannique, l’UE privée de la Grande-Bretagne serait bien moins attractive. … Or en adoptant une solution 'à la norvégienne', la Grande-Bretagne serait contrainte d’adopter les règles de l’UE pour avoir accès au marché intérieur. Ceci signifie se conformer à des règles majoritairement décidées en France, en Allemagne, en Italie, en Pologne et en Espagne, et qui déplairaient certainement à la Grande-Bretagne. Les Pays-Bas, les pays nordiques et autres Etats revendiquant une plus grande flexibilité se retrouveraient de plus en plus isolés. Mais ce sont surtout les Britanniques qui en pâtiraient le plus.»
Bruxelles est trop passive
La fin de l’Union européenne telle que nous la connaissons depuis des décennies pourrait survenir sans que personne n'oppose la moindre résistance, redoute Der Standard :
«En coulisses, on tremble à l’idée que 'l’impensable' ne se produise. On le voit indirectement à l’attitude des commissaires européens vis-à-vis du Brexit. Ceux-ci évitent actuellement d’effectuer des déplacements officiels en Grande-Bretagne. Juncker lui-même ne prend pas position auprès des Britanniques. On croit manifestement à Bruxelles qu'il vaut mieux se dérober au regard des citoyens pour appuyer le camp des europhiles. C’est un triste constat. L’équipe Juncker était entrée en fonction fin 2014 dans le but affiché d’être une 'Commission politique forte', capable de faire avancer l’UE sur le plan international. … Les Etats de l’UE auraient de nombreuses raisons de s’engager en faveur du 'Bremain'. Mais à l’heure actuelle, il semblerait que l’enjeu du scrutin laisse le continent indifférent.»
Un Brexit accentuerait les clivages au sein de l'UE
Une sortie de la Grande-Bretagne de l'UE pourrait aggraver un peu plus les divisions qui minent déjà l'UE, prévient La Tribune :
«L'attitude de l'UE face au Royaume-Uni sorti de son sein est loin d'être certaine. Les pays exportateurs, Allemagne, Pays-Bas et Irlande en tête, seront soucieux, quoi qu'ils en disent durant la campagne, de 'limiter les dégâts' en limitant l'incertitude et le durcissement des conditions commerciales avec les Britanniques. Pour des raisons politiques, la France pourrait freiner des quatre fers, peut-être avec l'appui de l'Italie, où Matteo Renzi est menacé par le Mouvement 5 Etoiles, allié de l'UKIP au parlement européen. Une chose est certaine : l'UE à 27 risque d'être prise dans des injonctions contradictoires. Et le 'couple franco-allemand' pourrait bien être une victime collatérale d'un éventuel Brexit.»
L'UE, pas moins démocratique que ses Etats membres
Les partisans du Brexit accusent régulièrement les institutions européennes de ne disposer d’aucune légitimité démocratique. Un argument que réfute la journaliste Imke Henkel, sur Europp, le blog de la London School of Economics (LSE) :
«L’UE est distante, difficile à comprendre, souvent opaque. Mais elle n’est pas antidémocratique. A l’instar du gouvernement britannique, les institutions européennes sont légitimées par la démocratie représentative. Le Premier ministre britannique est élu par son parti, pas par les électeurs. … Si l’on devait justifier le caractère démocratique de l’UE, on rappellerait que les commissaires européens sont désignés par les gouvernements nationaux, qui ont été élus par le peuple. … Le Parlement européen est élu par les citoyens européens de chaque Etat. Le Conseil européen se compose des chefs de gouvernement et chefs d’Etat de chaque pays. Enfin, la Commission, comme évoqué précédemment, est nommée par les gouvernements nationaux et soumise à l’approbation du Parlement européen.»
L'Ecosse, dernier bastion européen de la Grande-Bretagne
Dans l’éventualité d’un Brexit, l’Ecosse se séparerait de l’Angleterre pour pouvoir rester dans le giron de l’UE, ne serait-ce que pour des raisons économiques, écrit The Independent :
«S’ils doivent choisir entre sauter dans l’inconnu ligotés à l’Angleterre ou rester au sein d’une Union européenne stable (mais non sans risques), les Ecossais feront le choix de l’Europe. En restant membre de l’UE alors que l’Angleterre la quitte, l’Ecosse ferait plus que d’éviter un saut dans l’inconnu : elle saisirait une opportunité économique inouïe. Toutes les entreprises susceptibles d’envisager de quitter l’Angleterre pour l’Europe continentale en cas de Brexit pourraient se replier vers l’Ecosse. L’Ecosse adopterait probablement l’euro, sa situation géographique est plus commode pour l’Europe continentale que celle de l’Irlande et elle est à la pointe des énergies renouvelables.»
Cesser de brandir seulement des menaces
Les opposants au Brexit ne devraient pas focaliser leur argumentaire sur les risques, souligne le chroniqueur Ferreira Fernandes dans le journal Diário de Notícias :
«Près de trois semaines avant le référendum britannique, les arguments des pro-UE tournent presque tous autour de la peur : peur d’un désastre économique en cas de sortie de l’UE de la Grande-Bretagne, peur d’un désintérêt des investisseurs arabes et chinois et d’un isolement de la City de Londres, et enfin peur de mesures de rétorsion venant de Bruxelles. Ces arguments sont peut-être valables, mais les opposants au Brexit devraient s’efforcer aussi de convaincre à l’aide d’autres arguments, par exemple les intérêts politiques et culturels, où la 'communauté de destin' européenne. Une communauté à laquelle visiblement plus personne ne semble croire encore.»
'Brexit' sonne mieux que 'Bremain'
Si l’on se penche sur les néologismes associés à chaque camp dans la campagne du référendum, on constate que les anti-UE ont une longueur d'avance, écrit The Irish Independent :
«'Brexit' est un terme bien plus cinglant que 'Bremain', qui fait penser à un prénom inhabituel ou à une marque de médicaments. Il n’est donc pas surprenant que le slogan 'Bremain' n’ait jamais vraiment décollé. Mais quelles seraient les alternatives ? … Il n’y a que le Brexit, et le succès du terme est tel que le camp du 'remain' mène le débat dans les termes suivants : faut-il voter oui ou non au Brexit ? C’est déjà une victoire en soi pour les partisans du départ, car en parlant de Brexit, on se prépare inconsciemment à la perspective d’une sortie de la Grande-Bretagne de l’UE.»
Et si les Britanniques restaient ?
Après la mise en garde du ministre des Finances britannique quant aux conséquences d'un Brexit, il serait bon de développer une stratégie à suivre dans le cas de figure d'un maintien dans l'UE, lit-on dans Le Monde :
«Fort de sa victoire, M. Cameron voudra imposer son agenda politique en Europe, avec une relance du marché unique, une dé-technocratisation de l’UE et un rôle plus actif pour les Parlements nationaux. Ces aspirations sont louables, mais il convient de ne pas sous-estimer la dynamique politique qui s’ensuivra : un 'Brexin' risque de renforcer une convergence économique entre l’Allemagne et le Royaume-Uni, les deux premières économies d’Europe. … Pour ne pas être marginalisée, la France doit préparer un vrai plan B, pour la zone euro et l’UE à Vingt-Huit. Si les Britanniques restent, les Français doivent tirer les premiers.»
Un Brexit accroîtrait l'importance de la Pologne
La possible sortie de la Grande-Bretagne de l’UE est une opportunité pour la Pologne, estime en revanche le quotidien conservateur Rzeczpospolita :
«Les liens entre la Grande-Bretagne et l’UE en matière d’économie et de défense sont si étroits qu’un Brexit n’y changera pas grand-chose. Il y a donc une vie après le Brexit. … Cette perspective ne représente pas la fin de la communauté, elle lui offre seulement la possibilité de se réformer entièrement. La Pologne est le plus grand pays de l’UE à ne pas faire partie de la zone euro. Un rôle important devrait donc lui échoir au sein de l’Union. Efforçons-nous de présenter le Brexit comme la possibilité d’apporter notre contribution à cette refonte, plutôt que de crier au loup.»
Un scénario catastrophe pour l'Irlande
Une sortie de la Grande-Bretagne de l’UE engendrerait des problèmes politiques, sociaux et économiques considérables pour l’Irlande et l’Ulster, prévient The Irish Times :
«La perspective d’un Brexit devrait faire peur à l’Irlande. Car elle pourrait avoir de graves répercussions économiques et entraîner la restauration de contrôles aux frontières, comme le prévoit l’UE pour un Etat non membre en dehors de l'espace Schengen. Elle pourrait par ailleurs raviver les tensions en Irlande du Nord. Cette probabilité n’est pas liée à un quelconque changement survenu en Irlande ou à l’apparition de problèmes dans les relations entre Dublin et Londres. Non, ceci découlerait des difficultés que connaît la Grande-Bretagne avec l’UE. En d’autres termes, les rapports anglo-irlandais ne sont plus déterminés par une simple dynamique bilatérale, mais par une dynamique européenne à plus grande échelle.»
Tous les arguments parlent contre un Brexit
Le camp du Brexit occulte les conséquences négatives d’une sortie de l’UE, critique Dagens Nyheter :
«Les partisans du non à l’UE affirment que la Grande-Bretagne pourra prochainement signer des accords avec l’UE lui assurant un accès libre au marché commun. Mais rien n’indique que l’UE ménage autant un déserteur. Tous les traités européens exigeraient un maintien de la liberté de circulation des travailleurs, comme ceci est exigé de la Norvège et de la Suisse. Plus le Royaume-Uni réclame d’autonomie, plus il amenuisera ses chances d’accéder au marché européen. … Les arguments économiques et politiques plaident en faveur du maintien dans l’UE. Les partisans du Brexit se bercent d'une utopie de l’indépendance qui ne devrait leurrer personne.»
Pour les petits Etats membres, le danger serait grand
Le risque inhérent à un Brexit en termes de politique n’est pas évalué à sa juste valeur, estime Satakunnan Kansa :
«Il ne fait aucun doute qu’en cas de Brexit, l’UE perdrait de son influence dans la politique mondiale autant que la Grande-Bretagne. De petits pays comme la Finlande en subiraient les conséquences de plein fouet. Dans le contexte politique mondial actuellement tendu, l’effritement du front commun de l’Union européenne joue en faveur de ceux qui veulent la provoquer et la mettre sous pression. … Un Brexit entraînerait une multiplication des demandes de sortie de l’UE parmi les Etats membres. Y compris en Finlande. Pour la Finlande, l’UE a été un projet autant économique que politique, qui a montré aux Finlandais qu’ils faisaient partie de l’Occident. Les partisans du Brexit font valoir des arguments économiques mais oublient la dimension politique d’une sortie de l’Union. Pour la Finlande, l’UE représente un lien vital à l’Occident en matière de politique de défense. Sans UE, nous serions directement soumis à l’influence de la Russie.»
Les partisans du Brexit se contrefichent de Daech
Selon David Cameron, Daech se réjouirait d’une sortie du Royaume-Uni de l’UE. C’est ainsi que le Premier ministre a renouvelé mardi sa mise en garde contre les dangers d’un Brexit. Cette sortie verbale risque d’avoir des conséquences politiques fâcheuses, peste The Daily Telegraph :
«Ces propos sont non seulement insultants, mais également imprudents sur le plan politique. Près de la moitié des électeurs et une grande partie des tories sont pour le Brexit. Ils ont des motifs honorables et la conviction que c’est la meilleure solution pour leur pays. Cameron suggère néanmoins qu’ils cautionnent un culte de la mort prônant le massacre collectif, le viol et l’asservissement. Si, au lendemain du référendum, le chef du gouvernement se trouve confronté à des accusations amères émanant des électeurs et de son propre parti, il ne pourra s'en prendre qu'à lui-même.»
Un jeu politique dangeureux
La décision de Cameron de soumettre au vote des Britanniques le maintien ou non du pays au sein de l’Union européenne est une erreur monumentale, selon le quotidien Jyllands-Posten :
«Le pays est divisé et rien ne laisse présager une claire majorité. L’avenir du Royaume-Uni est sous la responsabilité du premier ministre David Cameron. Sa décision de mettre en place un référendum n’était ni réclamée par les électeurs ni une revendication politique pour parvenir à une décision ultime à propos de l’appartenance à l’UE. Ce vote résulte uniquement de la tentative ratée de Cameron de mettre un terme définitif aux sempiternels débats conservateurs au sujet du Brexit. Il voulait faire taire les eurosceptiques de l’aile droite de son propre parti et freiner la perte d'électeurs au profit du Parti pour l’indépendance Ukip. Pourtant, ce projet est une énorme erreur stratégique, un jeu politique dangereux.»
Moscou mettrait le grappin sur la Hongrie
En Hongrie, certains craignent qu’un Brexit amène Viktor Orbán et son gouvernement à sortir de l’UE. Dans un tel cas de figure cependant, Orbán serait pieds et poings liés à Moscou, écrit Péter Béndek sur le blog 1000 A Mi Hazánk :
«Orbán aurait tôt fait de perdre l’aura dont il jouit en Hongrie et la trace qu'il laisserait dans l’histoire serait on ne peut plus négative. Dans son propre intérêt, il ferait bien d’éviter un pareil scénario. … En quittant l’UE de son propre gré, Orbán pousserait délibérément son pays dans les bras de Moscou. … Voici ce que je voudrais dire à ceux qui, en Hongrie, crient à la perte de notre indépendance et de notre souveraineté au sein de l’UE : vous seriez étonnés de voir à quelle vitesse, suite à une sortie de l’UE, la souveraineté du pays se volatiliserait. Il y a fort à parier que la Hongrie serait mise sous la tutelle de Moscou et que Orbán ne resterait Premier ministre que tant qu’il servirait les intérêts de Poutine.»
Tout le monde exagère démesurément
Dans le débat sur le Brexit, aucun des camps n’argumente objectivement, critique Süddeutsche Zeitung :
«La figure de style préférée est une exagération débridée. Les eurosceptiques mettent en garde contre une immigration de masse incontrôlable qui soufflerait leur emploi à de respectables Britanniques tandis que les pro-UE font valoir qu’en cas de sortie de l’Union, tous les ménages perdraient des milliers de livres chaque année. Que l’on écoute un bord ou l’autre, en tout état de cause, la Grande-Bretagne est au bord du chaos et de la ruine. C’est assez surprenant quand on sait que les rapports de la Grande-Bretagne avec l'UE ont toujours été caractérisés par le pragmatisme. … On aurait été en droit d’attendre une évaluation plus sobre, suivie par une décision tout aussi sobre. Se doutant toutefois qu’à l’issue d’un examen d’évaluation, il pourrait s’avérer qu’à bien des égards, il soit dans l’intérêt absolu de la Grande-Bretagne de rester au sein de l’Union, les eurosceptiques ont porté le débat à un niveau émotionnel. Et surtout, ils ont réussi à amener les pro-UE à croire qu’ils devaient répondre à l’émotion par des émotions.»
Les Britanniques rêvent encore d'empire
La Stampa, en revanche, ne s'étonne pas de la teneur émotionnelle du débat :
«La question de l’Europe déchaîne les passions en Grande-Bretagne, et ceci n’a rien de nouveau. Car le pays est nostalgique de son passé impérial (et impérialiste) et reste incertain de son appartenance géographique et culturelle à l’Europe. … L’histoire contemporaine de nombreux autres pays européens, avant leur adhésion à l'UE, a été une succession de dictatures, de bains de sang, d’aventures coloniales et de deux guerres mondiales très dures. Or le Royaume-Uni a une histoire alternative, du moins en théorie : un grand empire qui reste ancré dans la mémoire collective par le biais des institutions du Commonwealth. 'Pendant des siècles, nous avons vécu dans un "splendide isolement", protégés par notre marine et par l’empire', selon l’historien Vernon Bogdanor. 'Cet isolement est révolu aujourd’hui, mais il en est resté quelque chose dans la psyché des Britanniques, qui refusent d'avoir des liens trop étroits avec l’Europe'.»
L'ombre du Kremlin
On aurait tort de sous-estimer la menace que représente le Brexit, prévient Rzeczpospolita :
«Le référendum de Cameron est un modèle pour les mouvements anti-européens, qui se renforcent d’année en année. Ce n’est pas un hasard si la Russie soutient politiquement et financièrement ces initiatives. Car celles-ci déstabilisent considérablement l’Occident et sapent la communauté politique et économique que forme l’UE. Les particularistes et les nationalistes jouent aujourd’hui un rôle similaire à celui des pacifistes à l’époque communiste. La seule différence, c’est que ces 'idiots utiles', comme les avait surnommés Lénine, n’avaient aucune chance d’arriver au pouvoir. Ce n’est plus le cas.»
Le Brexit, rempart contre l'antisémitisme
Un Brexit préserverait la Grande-Bretagne de la haine envers les juifs qui sévit sur le continent, souligne la chroniqueuse Angela Epstein dans The Daily Telegraph :
«Et si une folie politique concertée embrasait à nouveau l’Europe ? La Grande-Bretagne serait-elle parée pour faire cavalier seul si nous étions sous le joug d’une alliance légitime avec l’Europe ? … Cela ne fait aucun doute, l’Europe souffre d’un antisémitisme viscéral et sanguinaire. Il suffit de se rappeler les meurtres djihadistes de juifs à Bruxelles, à Paris et dans la capitale danoise de Copenhague commis ces douze derniers mois, ou encore les attaques haineuses perpétrées à Toulouse il y a quatre ans, lors desquelles un enseignant et trois élèves d’une école juive ont été abattus.»
Le Premier ministre infantilise les électeurs
Cameron a évoqué lundi un risque accru de guerre en cas de Brexit. Du pipeau, selon Financial Times :
«Tenir des propos aussi séditieux sur le risque de guerre est le meilleur moyen de se mettre à dos les eurosceptiques et les indécis. Ces derniers ont l’impression que le Premier ministre verse dans l'exagération et dans les scénarios catastrophe pour convaincre les gens de rester dans l’UE. Etant donné que les partisans de l’UE ont les atouts en main en termes d’arguments sur le commerce, l’économie et la stabilité, ces gesticulations n'ont pas de sens d’un point de vue stratégique. … Le Premier ministre sait pertinemment qu’un Brexit n’entraînera pas de guerre ; ce que les électeurs comprennent eux aussi. Il ne devrait pas oublier que nous ne sommes pas des imbéciles et que nous pouvons parfaitement faire la part des choses et distinguer des arguments patents en faveur d’un maintien dans l’UE.»
Cameron est un véritable homme d'Etat
Par le discours qu'il a prononcé au British Museum en faveur d'un maintien dans le giron de l’UE, David Cameron montre qu'il est un grand chef d'Etat, écrit la Vanguardia :
«Tandis que les partisans du Brexit affirment que la sortie de l’UE permettrait au pays de retrouver le contrôle de ses propres frontières, le Premier ministre a pour sa part défendu - avec une vigueur inédite - la thèse selon laquelle le repli sur soi n’a jamais été bénéfique à la Grande-Bretagne. Il a rappelé que la lutte contre le terrorisme passait par l’échange d’informations entre les services secrets des Etats membres. Bien que les sondages fassent plutôt état d'une tendance favorable au Brexit, Cameron se comporte en homme d’Etat selon la définition qu’en faisait Churchill : un acteur qui pense non pas aux élections à venir, mais aux générations à venir.»
Tous perdants
Un Brexit serait très dangereux pour l’Europe, prévient ll Sole 24 Ore :
«Cela ouvrirait la boîte de pandore et provoquerait une vague d’accusations et de velléités de départ : Pologne, Hongrie, Tchéquie voire même certains pays de la zone euro comme la Finlande et les Pays-Bas. En renforçant les mouvements séparatistes et eurosceptiques au sein de certains pays, un Brexit freinerait l’intégration de l’UE, mais aussi et surtout celle de la zone euro. … Le référendum mettrait aussi à nu les faiblesses et les failles de la construction européenne. Il n’est pas constructif, même en termes de débat public, vu la teneur actuelle de ce dernier. Quelle que soit la décision prise le 23 juin, nous avons déjà perdu.»
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