La police de Cologne taxée de racisme
En réaction aux agressions visant des femmes qui avaient émaillé le réveillon de la Saint-Sylvestre à Cologne l'an dernier, la police a soumis cette année des centaines d'hommes de type maghrébin à des contrôles systématiques. Cette pratique a suscité la critique de plusieurs politiques et déclenché un débat sur le risque de 'racial profiling'. Le débat trouve un écho hors des frontières de l'Allemagne.
Aborder le racisme sans tomber dans les clichés
Dans Spiegel Online, la chroniqueuse Margarete Stokowski préconise de nuancer le jugement porté sur le travail de la police :
«Entre les deux postulats 'Les policiers sont tous des héros' et 'La police est raciste et soupçonne d’innocents Africains du Nord', il y a une voie médiane, celle qui consiste à dire qu'à Cologne, la police a réussi à réduire considérablement le nombre de crimes par rapport à l’an dernier, mais que toutefois, du moins dans des cas isolés, il se peut qu’elle ait un problème de racisme. … Si problème de racisme il y a au sein de la police – comme dans le reste de la société – au-delà de formulations malheureuses qu’il suffirait de corriger, le phénomène est profondément ancré et peut-être aussi subliminal. Bien avant le réveillon du Nouvel An, des témoignages portent à croire qu’en Allemagne, quelque chose que les personnes concernées assimilent assez clairement à un contrôle au faciès est pratiqué, sans bien sûr que ce soit le terme retenu par la police, parce que c’est interdit. Au point où nous en sommes, nous pouvons en parler ouvertement.»
La coupe est pleine
Le débat sur l’intervention de la police à Cologne lors du réveillon du Nouvel An annonce un tournant en Allemagne :
«L’attitude philanthrope affichée jusqu’à présent envers les criminels – la tentative de comprendre les auteurs de crime et à leur venir en aide – ploie en Allemagne sous le poids des criminels issus d’autres sphères culturelles et religieuses. D’une certaine manière, c’est triste, quand on sait que les héritiers de la terreur nazie ont eu le grand mérite de remettre en cause leur appareil de répression. Or 70 ans plus tard, le problème réside dans la présence d’autres 'cultures', ce qui oblige à redéfinir la sécurité. … L’Allemagne et le reste de l’Europe peuvent préserver la plus grande partie de ce qui les rend plus humains et plus civilisés, mais ils ne doivent en aucun cas tolérer que l’on crache au visage de leur bienfaisance.»
L'Allemagne doit arrêter de se leurrer
Les politiques tels que la chef de file des Verts allemands, Simone Peter, ouvrent grand les portes au terrorisme, tonne le commentateur Zsolt Bayer dans le quotidien nationaliste Magyar Hírlap :
«Peter reproche bel et bien à la police de Cologne d’être raciste ! Elle ferait mieux de se taire ! J’accuse Simone Peter et toutes les crapules qui partagent ses idées ! Car elles sont les premières responsables de l’enfer qu'est devenue l’Europe aujourd’hui. … Simone Peter et ses acolytes encouragent et protègent les apôtres du terrorisme. Ils sacrifient des vies humaines sur l’autel des droits de l’homme, qui ont perdu tout leur sens. … Je reproche à ces crapules d’empêcher le travail des gardiens de la paix par leur accès de folie en public. Les sociétés européennes – en tout premier lieu la société allemande, qui a connu le pire lavage de cerveau – devraient enfin se réveiller et faire face à la réalité.»
La bonne nouvelle aussitôt oubliée
Wiener Zeitung regrette le débat suscité par l'action de la police à Cologne :
«S'il y a vraiment un signal inquiétant laissant présager la poursuite en 2017 du cap funeste suivi en 2016, c'est précisément cette discussion. Car la nouvelle positive et réellement pertinente, à savoir que le réveillon s'est déroulé dans le calme, a été oubliée dès le lendemain. Or seules les mauvaises nouvelles font de bons scoops. Les autorités se sont rapidement efforcées de contenir cette indignation prévisible. L'usage du terme ['nafri', désignant les Nord-Africains, dans un tweet de la police de Cologne] a été qualifié d'erreur tandis que l'accusation de racisme, formulée notamment par la chef de file des Verts, a été vivement récusée. Il est logique, lorsque presque tous les suspects d'un délit appartiennent au même cercle culturel, que la police prête une attention particulière à ces individus.»
Des évènements chocs qui changent les modes de pensée
Pour Le Temps, les discussions déclenchées par les pratiques policières et les allégations de contrôles au faciès préfigurent les nouveaux débats qui attendent l’Europe :
«On peut prendre le problème par tous les bouts, il faudra bien s’habituer à voir changer les paradigmes de pensée qui ont guidé nos sociétés ouvertes tant qu’elles n’étaient pas menacées par le choc auquel elles sont confrontées aujourd’hui. Et intégrer que les citoyens occidentaux sont peut-être plus prompts aujourd’hui à privilégier l’ordre et la sécurité face à une conception inconditionnelle de la liberté et de l’égalité. Cologne, Saint-Sylvestre 2017 nous donne un avant-goût des débats qui nous attendent et vont s’accentuer, partout en Europe et en Suisse.»
L'Etat a annoncé la couleur
L’Etat a enfin adopté des mesures radicales et efficaces pour protéger les citoyens des actes de violence, se félicite Die Welt :
«Le réveillon de la Saint Sylvestre 2016 a été plus paisible que celui de 2015. ... Plus paisible parce qu’indéniablement, l’Etat a enfin pris les devants en matière de sécurité. Il a fait sentir sa présence. Il a contrôlé des groupes de jeunes en raison de comportements suspect – et non de leur apparence. En l’occurrence, l’Etat a fait ce qu’il avait omis de faire dans le cas d’Anis Amri. Il a traité de simples indices d’agressivité latente comme autant de signes d’une potentielle intention d’agir. Il a refoulé cette catégorie de personnes, procédé à des contrôles d’identité et dans certains cas, à des gardes à vue jusqu’à ce que l’identité des intéressés ait pu être clairement établie. Si ces mêmes procédures avaient été appliquées dans le cas d’Amri, les victimes de l’attentat [du marché de Noël] sur la Breitscheidplatz auraient elles aussi pu célébrer la Saint-Sylvestre en 2016.»
La police fait peu de cas de la présomption d'innocence
Le journal Taz reproche aux services de police une condamnation d’office motivée par la couleur de la peau et l’origine :
«Pour problématique que puisse être le traitement particulier réservé aux migrants d’Afrique du Nord : cette année, il y avait peu d’alternatives. Il fallait éviter une répétition du scénario de la Saint-Sylvestre 2015, car l’Etat ne peut tolérer que la peur règne dans les lieux publics. La police aurait été dépassée si elle avait dû surveiller individuellement chacun des suspects. Elle a donc joué la carte de la dissuasion psychologique en procédant à des contrôles à titre préventif. Or quand on opte pour ce genre de procédé, il importe de souligner la présomption d’innocence. C’est précisément ce que le préfet de police Jürgen Mathies a omis de faire. Il a déclaré que 150 noirs africains avaient été observés aux abords de la gare, sans préciser ce qui leur était reproché. Il crée ainsi l’impression que la couleur de la peau est en soi répréhensible. Une impression que la police doit à tout prix éviter.»