La rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un aura-t-elle lieu ?
La Corée du Nord a menacé d'annuler la rencontre prévue entre Kim Jong-un et le président américain Donald Trump. La raison avancée : l'exigence des Etats-Unis d'un désarmement nucléaire "unilatéral" de la Corée du Nord. Si les éditorialistes ne pensent pas que Kim Jong-un renoncera à l'opportunité historique de rencontrer un président américain, ils n'espèrent néanmoins pas grand-chose de la journée du 12 juin.
Kim Jong-un demande des contreparties
Kim Jong-un s'engage dans une surenchère, estime Neue Zürcher Zeitung :
«Le fait que Trump se soit déclaré prêt à rencontrer un leader nord-coréen - une première pour un président américain - doit déjà être considéré comme une concession pour les observateurs américains. Mais la chose n'est pas évidente pour la Corée du Nord, qui aimerait elle-même être perçue comme une puissance nucléaire à part entière. L'assouplissement des sanctions américaines était envisageable jusque-là. Il est possible, comme ce fut déjà le cas par le passé, que les Américains proposent des fonds et des matières premières au régime nord-coréen. Une mesure censée remettre le pays sur pied économiquement et l'inciter au désarmement. Mais cela ne suffira pas cette fois-ci, comme le dit Pyongyang aujourd'hui.»
Il ne faut pas s'attendre à un miracle
La rencontre entre Trump et Kim Jong-un ne sera ni un échec, ni une percée décisive, prédit Handelsblatt :
«Il est peu probable que Kim Jong-un annule vraiment le sommet prévu avec Donald Trump. Leur rencontre à Singapour est pour le leader nord-coréen la chance historique d'un tête-à-tête avec un président américain. Et pourtant, on aurait tort d'attendre trop de cette rencontre. Jamais Kim Jong-un ne renoncera entièrement et durablement à l'ensemble de son arsenal nucléaire. C'est son assurance vie. L'escalade ciblée en réaction aux manœuvres militaires américaines n'est qu'un avant-goût de ce que pourrait être la suite. … C'était une erreur de la part de Trump que d'annoncer la sortie de l'accord nucléaire avec l'Iran. A présent, il n'a plus de modèle dont il puisse s'inspirer pour élaborer un accord avec la Corée du Nord.»
Un dialogue fragile
Difficile de dire si la rencontre sera un succès, commente Helsingin Sanomat :
«La Corée du Nord s'irrite entre autres du fait que de son point de vue, les Etats-Unis exigent un désarmement nucléaire unilatéral. Cette interprétation bornée est pratique : Pyongyang peut ainsi faire capoter les négociations à tout moment, en exigeant en contrepartie le retrait américain de la péninsule coréenne - ce qui est irréaliste. Il est bien possible que cette menace soit retirée au bout de quelques jours. Il n'en reste pas moins difficile d'évaluer la solidité réelle de la base des négociations actuelles. La Chine est le seul pays à pouvoir exercer une influence directe sur la Corée du Nord. Et aucune information n'a filtré publiquement quant à ses activités en coulisses.»
La Chine, partenaire de prédilection de Pyongyang
Il ne faut pas oublier d'autres facteurs - commerciaux et économiques notamment - dans cette partie de poker, fait valoir la spécialiste de la Chine Garrie van Pinxteren dans NRC Handelsblad :
«Pékin souhaiterait inclure le pays dans le grand projet de Xi Jinping, les 'Nouvelles routes de la soie' ... Les plans sud-coréens et chinois pourraient être bien plus attractifs aux yeux de la Corée du Nord que ceux des Etats-Unis, et les conditions moins strictes. Il est peu probable que les Etats-Unis lèvent rapidement les sanctions si la Corée du Nord ne procède pas tout aussi rapidement au démantèlement total et durable de son arsenal nucléaire. ... La Chine et la Corée du Sud sont par contre potentiellement prêtes à négocier indépendamment de l'action américaine. Si elles acceptaient une levée partielle ou totale des sanctions, en échange de concessions relativement moins importantes, Kim Jong-un se sentirait moins contraint d'approuver la dénucléarisation rapide réclamée par Washington.»