Royaume-Uni : fallait-il sauver l'aciérie de Scunthorpe ?
Par le biais d'une procédure d'urgence, le Parlement britannique a ouvert la voie samedi au sauvetage de l'aciérie de Scunthorpe. Le groupe chinois Jingye avait mis à l'arrêt l'usine, la seule dans le pays qui produise de l'acier. L'Etat prendra le contrôle de l'entreprise, mais en assumera aussi les pertes considérables, tandis que Jingye en restera officiellement le propriétaire. La presse est divisée.
Une question de sécurité
Le gouvernement britannique n'avait pas d'autre choix que de sauver l'aciérie, écrit The Observer :
«Dans un monde de plus en plus instable et à la merci du protectionnisme commercial de Trump, une dépendance totale de l'industrie britannique vis-à-vis des importations d'acier entraînerait des risques majeurs. Même si l'Europe peut être considérée comme un partenaire commercial fiable, les droits de douane décrétés par Washington sur l'acier, associés à la pression sur l'Europe pour qu'elle accroisse ses capacités de défense sur fond de désengagement américain de l'OTAN, imposent au Royaume-Uni de ne pas compter sur ses alliés européens pour être suffisamment approvisionné en acier. ... La fermeture des hauts-fourneaux de Scunthorpe aurait menacé la sécurité de la Grande-Bretagne.»
Les dépendances subsistent
ll faut se garder de justifier hâtivement la nationalisation de l'aciérie en invoquant des considérations sécuritaires, rétorque The Economist :
«Si le subventionnement de l'acier est considéré comme une dépense de défense, il vaut la peine de se demander s'il s'agit vraiment du goulet d'étranglement potentiel le plus significatif, méritant d'engloutir des sommes considérables qui pourraient être utilisées pour d'autres priorités militaires. Les aciéries britanniques ne sont, quoi qu'il en soit, pas autosuffisantes - elles sont tributaires des importations de charbon et de minerai de fer de pays comme l'Australie, le Brésil, l'Afrique du Sud et la Suède. Même en période de guerre, elles n'étaient pas auto-suffisantes. ... Les arguments économiques en faveur d'une intervention doivent eux aussi faire l'objet d'un examen minutieux.»