Washington annule son aide à l'UNRWA
Les Etats-Unis ont décidé de ne plus financer l'Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). La Maison-Blanche accuse par ailleurs l'UNRWA de gonfler artificiellement le nombre des Palestiniens éligibles au statut de réfugié. Les journalistes critiquent la politique américaine, mais rappellent que la gestion de l'agence onusienne n'est pas irréprochable.
Une décision simpliste à un problème complexe
Susanne Knaul, correspondante du quotidien taz en Israël, estime que si le gel de l'aide aux réfugiés palestiniens est une erreur, les dysfonctionnements dans son attribution sont légion :
«Les dirigeants palestiniens corrompus n'ont pas investi les dollars et les euros généreusement fournis par la communauté internationale dans la construction du futur Etat, pour guider graduellement les gens vers l'autonomie. Au contraire, ils ont fait de cette main qui demandait l’aumône une institution acceptée par tous et ont empoché les fonds internationaux. Tant que le schéma actuel des paiements sera maintenu, rien ne changera. Et pourtant, on ne peut pas abandonner à leur sort les gens qui ont besoin d'aide. ... C'est trop facile de fermer les yeux devant les élèves qui vivent dans les camps de réfugiés, les malades et les personnes âgées.»
L'éducation, la richesse des Palestiniens
Dans son éditorial, Le Monde condamne également la politique des Etats-Unis :
«Personne n'imagine aujourd'hui qu'une paix juste et durable est à portée de main entre Israéliens et Palestiniens. Ce constat ne doit pas pour autant pousser à se tourner vers un autre mirage : un ultimatum imposé par un camp soutenu par Washington ne suffira pas à faire renoncer le peuple palestinien à ses aspirations nationales légitimes et à sa soif de liberté. ... L'UNRWA n'a pas été pour rien dans le niveau d'éducation des Palestiniens. Il s'agit de la richesse de cette nation. Imaginer l'en priver est aussi absurde que dangereux.»
Trump, défenseur d'une paix pro-israélienne
Une fois de plus, Trump ne fait pas un mystère du camp qui a sa sympathie, constate Neue Zürcher Zeitung :
«Si Trump recherchait une solution équilibrée, il pourrait faire pression sur Israël. ... Or c'est tout le contraire que l'on constate. Sans demander la moindre contrepartie aux Israéliens, le président américain a décidé le transfert à Jérusalem de l'ambassade des Etats-Unis, ville à laquelle il reconnaît le statut de capitale d’Israël. Tandis qu'il réduit à néant les 360 millions de subventions à l'UNRWA, il ne remet pas une seconde en cause les 3,8 milliards de dollars d'aides militaires annuellement octroyées à Israël. Son cœur bat pour Israël et il appelle de ses vœux une paix qui lui fasse la part belle.»
Une erreur lourde de conséquences
Le geste de Trump met en péril le processus de paix, lit-on dans Frankfurter Rundschau :
«Les Etats-Unis abandonnent complètement leur rôle de médiateur, ce qui ne risque guère d'encourager les Palestiniens à faire des concessions. La critique formulée à l'encontre de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) n'est pas sans fondement. On lui reproche de se laisser instrumentaliser par l'organisation radicale islamique Hamas. Si ces accusations sont fondées, il faut mettre fin à cette prise d'influence. Annuler les aides à la Palestine n'est toutefois pas le moyen d'y parvenir. Même les militaires israéliens affirment que la menace de Trump est une erreur. L'économie pourrait s'effondrer dans la bande de Gaza, et provoquer des soulèvements violents.»
L'indigence est mère de radicalisme
Agnieszka Zagner, spécialiste du Proche-Orient au journal Polityka, craint que le manque d'aide ne se traduise par une radicalisation des Palestiniens :
«Ce n'est pas en mettant les Palestiniens dos au mur qu'on les rendra plus enclins à négocier. Au contraire, la détresse les confortera dans leur radicalisme. ... Couper les aides aura un effet négatif sur la vie des petites gens et minera leur confiance dans leur leader à Ramallah. Si [Mahmoud] Abbas n'est pas en capacité de leur garantir une vie digne, une autre organisation risque de se déclarer prête à assumer cette mission. Quiconque connaît la situation dans la bande de Gaza n'aura pas de mal à se figurer quelle pourrait être cette organisation.»