Nucléaire iranien : Etats-Unis et Iran brisent-ils la glace ?
Des négociations sur le programme nucléaire iranien ont eu lieu samedi entre les Etats-Unis et l'Iran. Bien qu'une rencontre directe des deux délégations n'ait pas été prévue initialement, il y a eu une brève entrevue entre le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghtchi, et l'émissaire spécial américain, Steve Witkoff. Les parties ont convenu de poursuivre les pourparlers cette semaine. Echo modérément optimiste dans les médias.
Un bon début au vu des dangers encourus
Il faut enrayer la production iranienne d'uranium militaire, écrit Der Standard :
«Le plus étonnant dans ces nouveaux pourparlers sur le nucléaire entre les Etats-Unis et l'Iran, c'est le simple fait qu'ils aient lieu. ... Sous l'effet des sanctions, l'économie iranienne est exsangue, la population est à bout. Le réseau stratégique de l'Iran dans la région, l''axe de la résistance', n'est plus opérant, les systèmes militaires du pays ont grandement pâti de l'attaque israélienne menée en octobre dernier. Le président américain menace de guerre si l'on n'aboutissait pas à un nouvel accord sur le nucléaire. Mais il faut croire que cette menace n'a pas été dégainée samedi : Witkoff a choisi de se glisser dans le rôle du gentil. ... La priorité la plus urgente actuellement, c'est de faire cesser l'accumulation d'uranium susceptible de servir à la production d'armes.»
Un dialogue déterminant pour le Proche-Orient
Corriere della Sera voit une lueur d'espoir :
«On ne peut être optimiste à un moment aussi complexe, mais les Etats-Unis et l'Iran ont dialogué, même si cela s'est fait via la médiation du ministre des Affaires étrangères d'Oman, Badr ben Hamad Al Boussaïd. ... Il va de soi que ce dialogue, qui vient à peine de commencer, peut être décisif pour changer la donne à l'avenir, dans la poudrière du Proche-Orient - mais pas seulement. Pour ce faire, il faudra convaincre l'ayatollah Khamenei de faire des concessions, et le pousser à reconnaître les faiblesses de son régime dangereux, qui a récemment essuyé plusieurs défaites.»
Téhéran n'a pas le choix
L'Iran se trouve le dos au mur, souligne taz :
«Trump mise sur la carotte et le bâton : les incitations en termes économiques et les menaces en termes militaires. Il affirme vouloir que l'Iran devienne un 'pays heureux'. ... Il montre toutefois clairement que l'Iran encourrait un 'grand danger' si les négociations devaient échouer. Les Etats-Unis ont déjà positionné des avions furtifs B 2 dans l'océan indien, et un deuxième groupe de porte-avions a été dépêché au Proche-Orient. ... Un second round de négociations entre l'Iran et les Etats-Unis doit avoir lieu cette semaine. Et le fait que l'Iran soit à la table en dit long sur la faiblesse de la position iranienne. Khamenei sait que l'avenir de son régime dépend de l'issue de ces négociations.»
La dernière chance de réussite pour Trump
Pour le journaliste israélien Sergueï Auslender, l'Iran est en position avantageuse, comme il l'écrit dans un post Telegram repris dans Ekho :
«Les Iraniens ne sont pas idiots, ils ont tout de suite compris le principal problème de Trump : il veut pouvoir se prévaloir d'un résultat tangible dans les 100 premiers jours à la présidence. Un cessez-le-feu en Ukraine ? Négatif. La libération des otages israéliens et la fin de la guerre à Gaza ? Négatif. Guerre commerciale ? On ne voit pas du tout à quoi elle rime, donc négatif aussi pour l'instant. Reste l'Iran. C'est pourquoi, si l'on en croit le Wall Street Journal, les Iraniens ont posé un tas de conditions sur la table des négociations, dans lesquelles la récurrence du mot 'immédiatement' frappe. ... Espérons que les Iraniens pousseront le bouchon trop loin, que Trump prendra la mouche, et on sait ce qui se passera alors.»
Un risque d'échec élevé
Spécialiste du Proche-Orient, Igor Semyvolos ne se fait pas de grandes illusions, comme il l'écrit dans un post Facebook cité dans Espreso :
«L'hypothèse la plus vraisemblable est que les deux camps signent un accord limité : l'Iran donnera son accord provisoire à des restrictions sur son programme nucléaire et les Etats-Unis assoupliront partiellement les sanctions. ... Mais l'accord restera fragile, en raison de la méfiance viscérale que se vouent les deux protagonistes et de la pression d'Israël et de l'Arabie saoudite, qui le jugeront insuffisant. ... Le risque d'échec restera élevé, surtout si Israël ou l'Iran se mettent à se provoquer. L'hypothèse d'une guerre généralisée est peu probable, mais des attaques ponctuelles ou asymétriques pourraient perturber le dialogue.»