Dispute gouvernementale en Italie : Conte menace de démissionner
En raison des querelles qui minent la coalition gouvernementale, lesquelles n'ont fait que s'amplifier à l'issue des européennes, le Premier ministre italien, Giuseppe Conte, a menacé lundi de claquer la porte. Il a demandé aux chefs de file de la Ligue et du M5S, Matteo Salvini et Luigi di Maio, de réaffirmer leur volonté de coopération. Mais de l'avis des commentateurs, cet avertissement risque d'être un coup d'épée dans l'eau.
Une sortie peu constructive
Huffington Post Italia n'est guère satisfait de l'intervention de Conte :
«Non, M. le Premier ministre, ça ne va pas. ... Car dans la conférence de presse d'aujourd'hui, vous avez donné une gifle (de moyenne intensité) aux deux vice-Premiers ministres, en évitant soigneusement toutefois d'aborder les problèmes actuels. Vous avez fustigé, à raison, l'animosité excessive qui existe au sein de la majorité, sans pour autant indiquer de voie alternative. Vous avez affirmé que vous n'aviez pas l'intention de rester à tout prix, tout en laissant entendre que vous aimeriez continuer. Vous avez évoqué tous les points litigieux entre la Ligue et le M5S, en vous abstenant cependant de prendre position sur chacun des sujets qui fâchent.»
Une nouvelle marionnette sera vite trouvée
Večernji list juge lui aussi la menace inopérante :
«Même si Conte démissionnait, comme il a menacé mardi de le faire, dans l'hypothèse où la Ligue et le M5S continuaient à se disputer, cela ne marquerait pas la fin du cabinet. ... Après Conte, on essaiera de trouver une autre marionnette, susceptible de tenir jusqu'à la fin de l'année ou jusqu'à l'adoption du budget de l'année prochaine. Ce n'est qu'à ce moment-là, au printemps 2020, que l'on envisagera peut-être des élections anticipées. Pour le moment, l'éventualité d'une dissolution du gouvernement ne convient ni à la Ligue, qui préfère continuer de ratisser les voix des autres partis de centre-droit, ni au M5S.»
Salvini cherche la confrontation
Salvini restera sourd à l'appel de Conte, commente De Telegraaf :
«Quoi qu'il en soit, des décisions difficiles devront être prises après l'été. Il y aura du pain sur la planche. Conte affirme être parvenu à grand peine à éviter, à la fin de l'année dernière, une procédure d'infraction de la Commission européenne contre l'Italie. Il dit être déterminé à vouloir éviter cette perspective aujourd'hui encore, et donc à maintenir le déficit budgétaire sous contrôle. ... Mais Salvini préfère défier l'UE. S'il provoque des élections anticipées et reprend la barre à la place de Conte, on aura un nouveau gouvernement, d'extrême droite, en Italie. ... Salvini ira dès lors à la confrontation avec Bruxelles. L'UE se souviendra alors de Conte comme d'un Premier ministre honorable, avec lequel on pouvait dialoguer. Et l'isolement de l'Italie ne fera que s'accentuer.»
Le pouvoir est entre les mains des investisseurs
Rzeczpospolita gage que la réaction des marchés financiers aura le dernier mot dans le conflit :
«Pour l'heure, les marchés sont dans l'expectative. Il est vrai que pour la première fois en dix ans, la prime de risque des titres obligataires italiens a dépassé celle des titres grecs, même si le taux de 1,8 pour cent (pour les emprunts sur cinq ans) reste inférieur à celui des titres comparables émis par la Pologne. Mais avec des dettes de presque 2,6 milliards d'euros, une perte de confiance des investisseurs dans le programme de Salvini amènerait le ministre italien à obtempérer aux ordres de Bruxelles. Faute de quoi il ne serait plus en mesure de financer le fonctionnement de l'Etat.»