Moldavie : deux gouvernements se disputent le pouvoir
La Moldavie dispose depuis quelques jours de deux gouvernements et de deux présidents. Conséquence des élections du mois de février, un nouveau gouvernement, formé de l'alliance pro-européenne ACUM et du Parti des socialistes de Moldavie (PSRM, pro-russe), s'est constitué. L'ancien gouvernement, dominé par le Parti démocrate (PDM) de l'oligarque Vlad Plahotniuc, refuse toutefois de céder les rênes du pouvoir et il a l'appui de la Cour constitutionnelle. Les éditorialistes détaillent les enjeux de ce bras de fer.
Un choc pour les experts
Ukrinform évoque la surprise suscitée par la formation de cette nouvelle alliance :
«Le matin du 8 juin, les journalistes ont été informés de la tenue d'une séance extraordinaire du Parlement sur la formation d'une coalition provisoire entre le Parti des socialistes de Moldavie (PSRM) et le bloc social-libéral ACUM. Pour l'écrasante majorité des responsables politiques et des experts, cette nouvelle a été un choc. Personne ne s'attendait à une telle coalition, formée de partis idéologiquement opposés. ... Ce qui a aussi considérablement favorisé la formation du nouveau gouvernement mené par Maia Sandu [issue des rangs d'ACUM], c'est la disposition du personnel technique du Parlement à coopérer. ... Le Parlement est à nouveau en mesure de travailler.»
De dangereuses illusions
Michał Potocki, du journal Dziennik Gazeta Prawna, redoute une immixtion russe en Moldavie :
«J'ai demandé à un député d'ACUM que je connais s'il ne redoutait pas un scénario dans lequel, après l'effondrement du gouvernement, les socialistes prendraient le pouvoir et mettraient la main sur les moyens financiers et politiques. Il a admis qu'un tel risque existait, mais qu'il fallait 'd'abord se débarrasser de Plahotniuc et se défendre de la Russie ensuite'. Mon interlocuteur attend donc des socialistes qu'ils prennent acte de la réalité, et qu'en dépit de leur rhétorique, ils renoncent à renforcer les liens avec le Kremlin. Les vœux pieux peuvent parfois se réaliser, mais en l'occurrence, je crains qu'il ne se leurre.»
L'attrait de l'Est
La direction qu'emprunte la Moldavie paraît de plus en plus claire, estime le portail Hotnews :
«Les élections, même celles de février 2019, qui ont précédé la crise actuelle, ont toujours été dominées par une question : le pays doit-il mettre le cap à l'Ouest ou à l'Est ? La Moldavie est un petit pays, qui souffre d'une véritable saignée - le départ de ses citoyens en direction de la Roumanie et de l'Europe occidentale. Les possibilités d'influence dont la Russie dispose dans le pays sont énormes. En outre, on note actuellement un affaiblissement de l'influence occidentale au niveau mondial, notamment en Syrie ou au Venezuela, où la Chine et la Russie ont le dessus. Les failles transatlantiques se sont approfondies, et l'UE est elle-même ébranlée par des crises internes. ... Dans ces conditions, la Moldavie tend de plus en plus à s'orienter vers l'Est.»