Consignes sanitaires : la lassitude rendrait-elle égoïste ?

Prendre le métro sans masque, manifester sans observer les distances de sécurité, sortir pour s'amuser sans concessions ... Après des mois de pandémie, de plus en plus de personnes semblent ne plus être prêtes à accepter les restrictions dans leur quotidien - ou capables de le faire. Les commentateurs réfléchissent aux moyens de gérer le problème et à la notion de liberté.

Ouvrir/fermer tous les articles
Večernji list (HR) /

Les privations comme expression de responsabilité

Le président italien Sergio Mattarella a déclaré vendredi que la liberté ne donnait pas droit à contaminer autrui. Večernji list se range à cet avis :

«En Italie aussi, une part de la population a la conviction que le port du masque est inutile et que les mesures qu'on est appelé à respecter sont une restriction inutile de notre liberté. Or contaminer autrui ne relève pas de votre liberté. ... Il ne faut pas confondre liberté et refus de l'obligation de porter le masque et de se faire vacciner, au risque de compromettre la santé d'autrui. Il est triste de constater que certains politiques ne le comprennent pas, une attitude par laquelle ils ne défendent pas la liberté, mais nuisent à eux-mêmes et à autrui.»

Aargauer Zeitung (CH) /

La liberté passe par la raison

Le quotidien Aargauer Zeitung analyse la situation actuelle à travers le prisme de la philosophie hégélienne :

«La liberté, selon Hegel, ne consiste pas à faire ce que l'on veut, mais à avoir la possibilité de faire ce qui, après mûre réflexion, nous apparaît raisonnable. Si cette démarche n'exclut pas l'erreur, du moins exclut-elle l'arbitraire. ... On ne peut que conjecturer sur la délimitation précise qu'il opérerait entre les restrictions des droits individuels et les mesures épidémiologiques que l'on connaît aujourd'hui. Une chose est sûre : il ne condamnerait pas un Etat qui cherche à protéger la santé des personnes. Et il se peut que les personnes qui considèrent comme leur bon droit de mettre en danger la santé physique et psychique d'autrui ne manqueraient probablement pas de le contrarier. ... La raison peut impliquer un renoncement à l'exercice de sa liberté aujourd'hui à dessein de la préserver pour demain.»

El Periódico de Catalunya (ES) /

Eviter à tout prix la stigmatisation

Au vu du nombre en hausse des contaminations de jeunes et des photos qui circulent montrant des jeunes faire la fête sans masque et sans distanciation sociale, d'aucuns accusent déjà les jeunes d'être responsables de la "seconde vague". Or la situation est plus complexe qu'il n'y paraît, rappelle El Periódico de Catalunya :

«Il est beaucoup plus efficace d'opter pour la pédagogie, en faisant preuve d'une clarté et d'une cohérence qui ont souvent fait défaut jusqu'ici, que pour la voie de la sanction. Et il n'est pas déplacé d'être à leur écoute. ... Ceux qui sont nés au 21e siècle se trouvent confrontés à un marché du travail qui leur ferme ses portes, à une crise économique qui assombrit leurs projets d'avenir. Et le confinement qu'ils ont vécu a exacerbé leur désir de sortir. Les taxer d'irresponsabilité, sans chercher à comprendre leurs raisons, ne nous mènera nulle part»

.
taz, die tageszeitung (DE) /

Un phénomène de ras-le-bol

Ce week-end à Berlin, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté contre les mesures sanitaires - sans les observer, pour la plupart d'entre elles. Pour taz, il serait une erreur que d'y voir une foule d'esprits obtus et incapables de réfléchir :

«Que des milliers de personnes prennent sur eux un trajet en bus d'une journée pour participer à une manifestation est un geste qui doit être pris au sérieux. ... Il n'est probablement pas très difficile de se retrouver dans ce groupe, même quand on a est ouvert d'esprit et réceptif à la science. Il suffit d'en avoir ras-le-bol du masque, d'avoir une méfiance somme toute saine envers l'Etat ou d'avoir dû payer un arriéré d'impôts, et peut-être aussi d'avoir une bonne amie un peu trop portée sur l'occultisme et hop, nous voilà de l'équipée. En tout état de cause, il est devenu impossible de réduire ce mouvement à un clivage droite-gauche, comme le fait l'écrasante majorité des commentateurs dans le débat sur le coronavirus.»

Tageblatt (LU) /

Sanctionner les comportements égoïstes

Le quotidien Tageblatt trouve inadmissible que les manifestants n'aient respecté ni le port du masque, ni la distanciation sociale :

«Et que la police les ait laissé agir à leur guise pendant des heures. Le droit de manifester est certes un précieux acquis constitutionnel. Mais si son exercice implique le non-respect délibéré de consignes sanitaires, l'Etat doit répondre avec intransigeance. Ceci ne se limite pas aux défilés contestataires. Au cours des trois dernières semaines de juillet, 30.000 infractions au port du masque ont été signalées dans les transports publics de la capitale allemande. Or 200 cas seulement ont fait l'objet d'une amende. Dans ce contexte de laxisme, l'appel à durcir les sanctions n'apparaît pas très crédible.»

Primorske novice (SI) /

Une question de considération

Primorske novice insiste sur le respect d'autrui :

«Il s'avère que nous devrions respecter ceux qui nous entourent, nos parents, amis, voisins, collègues de travail et de manière générale toutes les personnes avec lesquelles nous coexistons. Il en va tout bonnement du respect humain. C'est tout simplement la marque d'une disposition bienveillante envers tout le monde et de la volonté de ne nuire à personne. L'observance des mesures sanitaires, envers nous-mêmes et envers notre entourage, est une conséquence logique de ce respect. A l'époque du coronavirus, il existe des gestes sanitaires simples qui sont même à la portée des enfants.»