Orbán demande la démission d'une commissaire européenne
La vice-présidente de la Commission européenne en charge des Valeurs et de la transparence, Věra Jourová, a reproché au Premier ministre Viktor Orbán de "bâtir une démocratie malade", invoquant ses attaques contre l'Etat de droit et la liberté des médias. Réaction indignée d'Orbán, qui a crié à "l'humiliation" et réclamé la démission de la commissaire tchèque. L'affaire échauffe les esprits dans les pays des deux protagonistes.
Jourová, une bombe idéologique
Pour Mladá fronta dnes, les relations de bons voisinages entre Tchéquie et Hongrie sont en danger :
«Ce qui s'est produit est ce à quoi il fallait s'attendre dès l'instant où la commissaire européenne Věra Jourová a accepté le portefeuille futile de vice-présidente en charge des Valeurs et de la transparence. N'ayant pas grand chose à faire à ce poste, elle se met donc à faire des leçons aux Etats membres sur leurs prétendus déficits démocratiques. Si Jourová devait continuer pendant cinq ans à torpiller nos relations avec nos voisins, il serait peut-être opportun de songer à consolider la défense de nos frontières.»
Une offense à la population hongroise
De tels propos ne sont pas dignes de la vice-présidente d'une Commission européenne, critique le quotidien progouvernemental Magyar Nemzet :
«Depuis que la coalition Fidesz-KDNP gouverne le pays, la Hongrie a été maintes et maintes fois rappelée à l'ordre par les bureaucrates de l'UE, et, dans la majorité des cas, le gouvernement a essayé de coopérer avec la Commission ; quand la critique était justifiée, il a modifié ou retiré les lois incriminées. ... Mais Jourová relève d'une autre catégorie. Elle s'est abaissée à un niveau qui ne sied pas à une commissaire. A présent, elle s'en prend non pas au gouvernement, mais aux Hongrois, et ses piques méprisantes sont aussi mensongères et sottes que celles débitées en Hongrie par beaucoup de politiques de gauche et de pseudo-experts ces dernières années. Jourová estime en effet que les Hongrois ont un esprit moutonnier et qu'ils sont incapables de se forger une opinion indépendante.»
Une commissaire dans l'exercice de ses fonctions
Lidové noviny se montre plus compréhensif envers la commissaire tchèque :
«Tous les avis sont permis sur ce qui a été dit. On peut estimer que Jourová est allée trop loin. Qu'elle n'a fait que répéter comme un perroquet les poncifs habituels reprochés à la Hongrie. Ou que la Hongrie a surréagi. C'est un fait que Jourová a accepté un mandat de membre de la Commission européenne. A ce titre, elle ne défend ni les intérêts tchèques, ni ceux du groupe de Visegrád, mais ceux de la Commission européenne. Par voie de conséquence, il ne faut pas attendre de sa part des déclarations envers la Hongrie ou la Pologne dans un autre esprit.»
Une maladie dont on voit chaque jour les effets
C'est aujourd'hui que la Commission européenne doit présenter son dernier rapport sur la situation de l'Etat de droit dans ses Etats membres. Népszava a la conviction qu'Orbán cherche à faire diversion pour discréditer toute critique justifiée :
«Si le chef du gouvernement hongrois estime que Jourová a offensé les citoyens hongrois, en réalité, elle a simplement qualifié la Hongrie de 'démocratie malade'. ... Malheureusement, pas un jour ne passe sans que ce constat ne se vérifie. De toute évidence, le calendrier de cet accès de colère ne doit rien au hasard : la lettre de protestation du Premier ministre arrive pile avant la publication du rapport de Bruxelles sur l'Etat de droit. Le verdict de la Commission sur la démocratie hongroise devrait être désastreux. C'est pour cette raison que le gouvernement tente de décrédibiliser Jourová avant la publication du rapport.»