Elections en Saxe-Anhalt : les échos de la presse européenne
La CDU du chef de gouvernement régional Reiner Haseloff a triomphé aux régionales qui se sont tenues dimanche en Saxe-Anhalt, engrangeant un score de 37,1 pour cent. L'AfD, le parti de la droite populiste, se maintient en seconde position, avec 20,8 pour cent des suffrages. La presse du continent propose des lectures divergentes du scrutin et conjecture de son impact sur les élections au Bundestag en septembre.
L'Allemagne en voie de trumpisation ?
Le vote d'extrême droite s'est enraciné en Saxe-Anhalt, constate le correspondant à Berlin de Tageblatt, Werner Kolhoff :
«La section AfD de ce land en particulier compte parmi les pires du pays. Ce que plus aucun électeur ne peut ignorer, et pourtant, cela n'a dissuadé personne de voter pour lui. Un constat qui vaut également pour de vastes pans de la partie Est du pays - mais pas seulement pour ce territoire. Les manifestations contre les restrictions sanitaires ont montré que dans la partie Ouest aussi, beaucoup de personnes étaient sensibles au chant des sirènes de l'AfD. ... Faut-il y voir l'amorce d'une 'trumpisation' de l'Allemagne ? En tout état de cause, il serait fatal que les partis modérés continuent de battre le tambour de leur petite campagne comme si de rien n'était. Car les résultats du scrutin de dimanche sont un signal d'alarme on ne peut plus clair.»
La CDU peut prendre Haseloff comme modèle
Der Spiegel, de son côté, souligne que la victoire du ministre-président sortant est aussi une victoire contre l'AfD :
«Il a réussi à l'Est ce qui semblait être si difficile pour les chrétiens-démocrates : ramener les électeurs AfD dans le giron de la CDU. ... Haseloff y est parvenu en suivant une ligne conservatrice authentique, au besoin en dérogeant aux directives de Berlin, notamment pour se démarquer des Verts. Haseloff a su trouver la parade à l'AfD, forte dans ce land, une attitude qui devrait faire école dans la CDU d'Allemagne de l'Est, à la peine ces dernières années. ... Il est clairement conservateur, mais exclut formellement toute coopération avec l'extrême droite pour imposer des positions conservatrices. En suivant la recette Haseloff, la CDU peut à nouveau remporter des élections haut la main dans les territoires de l'ex-Allemagne de l'Est.»
Un coup de pouce pour Laschet
Népszava pense aussi que ce bon score régional est de bon augure pour la CDU avant les législatives de septembre :
«La victoire électorale en Saxe-Anhalt sera probablement pour la CDU un tremplin qui lui permettra de dépasser les Verts au niveau national. C'est le chef du gouvernement local qui a sauvé les meubles pour Armin Laschet - qui n'a aucun mérite en l'occurrence. Et pourtant, le chef de la CDU peut espérer que son image de marque évoluera pour le mieux, et que les paroles de Konrad Adenauer se réaliseront : en politique, il est toujours temps de repartir à zéro.»
Une époque propice aux sortants
Der Standard, quant à lui, estime que le candidat CDU à la chancellerie, Armin Laschet, aurait tort de fonder trop d'espoirs sur le bon score de la CDU en Saxe-Anhalt :
«Laschet ne peut en aucune manière se reposer sur les lauriers de Haseloff. En sa qualité de ministre-président de Saxe-Anhalt, ce dernier a bénéficié de l'atout de l'élu sortant, au même titre que le chef du gouvernement sortant de Bade-Wurtemberg, Winfried Kretschmann, et que la ministre-présidente SPD de Rhénanie-Palatinat, Malu Dreyer, aux scrutins régionaux de mars dernier. En périodes difficiles, en l'occurrence la pandémie, les élus en place ont le vent en poupe. ... Laschet n'a pas ce sésame au niveau national. ... Les bons résultats en Saxe-Anhalt soufflent certes un peu dans les voiles du candidat CDU, mais ils ne le porteront pas automatiquement à la chancellerie.»
Les jeunes votent AfD
Si la CDU devance clairement l'AfD, un examen plus attentif empêche une lecture plus optimiste, souligne Mladá fronta dnes :
«En dépit du recul partiel de son électorat, l'AfD n'a pas enregistré de perte significative. Les statistiques indiquent par ailleurs une tendance désagréable : ce sont surtout les jeunes qui ont donné leur voix à l'AfD. Dans les groupes d'âge de 18 à 24 ans et de 35 à 44 ans, le parti a obtenu le même nombre de suffrages que la CDU. Il a même remporté le vote des 25-34 ans. Et ce bien qu'en Saxe-Anhalt, l'AfD ait été placée sous la surveillance de l'Office allemand de protection de la constitution [agence de renseignement], la formation étant soupçonnée d'être d'extrême droite.»