Après le retrait américain, quid de la population afghane ?
Favorisés par le vide laissé par les troupes occidentales, les talibans ont déjà repris le contrôle de près de la moitié de l'Afghanistan. Plusieurs milliers de personnes ont été blessées ou tuées lors de ces opérations. Selon la presse, certaines personnes sont particulièrement menacées par ce développement et l'Occident a une responsabilité à leur égard.
L'Europe devra accepter les demandeurs d'asile
Les Européens ont la responsabilité politique et morale d'aider les personnes qui fuient aujourd'hui devant l'avancée des talibans, souligne Der Spiegel :
«L'UE devrait donc faire deux choses. D'une part, négocier avec le gouvernement turc, comme après 2015, un accord qui propose des aides financières à la Turquie si celle-ci accorde en contrepartie aux Afghanes et aux Afghans le statut de réfugié et la protection qui en découle, leur ouvre son marché du travail, et leur donne accès aux soins médicaux et à l'éducation. Dans le même temps, il faut que l'Allemagne et d'autres Etats de l'UE acceptent eux aussi, de manière ciblée, des réfugiés afghans, ceux notamment qui ont travaillé pour des institutions étrangères comme la Bundeswehr ou l'Agence allemande de développement (GIZ), et dont la vie se trouve menacée du fait de cette activité.»
La Turquie n'est pas le camp de réfugiés de l'UE
Dans un entretien, le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, a estimé que des "Etats voisins" comme la Turquie étaient plus aptes que l'UE à recevoir les réfugiés venus d'Afghanistan. Yetkin Report fait part de son indignation :
«Comment des responsables politiques racistes et d'extrême droite peuvent-ils avoir l'impudence de considérer la Turquie comme la régulatrice des flux migratoires ? Ce n'est pas seulement leur propre idéologie hypocrite, discriminatoire et de plus en plus raciste qui leur donne cette audace, mais aussi la politique erronée que la Turquie mène depuis dix ans en matière de réfugiés. Le ministère turc des Affaires étrangères a fait savoir que 'La Turquie [n'était] ni le camp de réfugiés ni le poste frontalier de l'UE' ; une déclaration justifiée, mais tardive. Il aurait dû la faire il y a dix ans, au commencement d'une guerre civile syrienne qui devait entraîner la Turquie dans la tourmente.»
Une campagne peu propice à la solidarité
Prague n'a pas encore décidé si, après le retrait des troupes, elle accorderait l'asile sur son sol aux Afghans qui ont travaillé pour les soldats tchèques en Afghanistan. Peu avant les élections, la peur des migrants est instrumentalisée, ce que déplore Hospodářské noviny :
«La politique tchèque montre sa mesquinerie et son immoralité : le gouvernement hésite à venir en aide aux interprètes de soldats tchèques en leur garantissant la sécurité, à eux et à leurs familles. D'autres alliés n'ont pas ce genre d'hésitations. Peu avant les élections, la République tchèque fait un amalgame entre cette question et la peur des flux migratoires. En période électorale, l'annonce d'un coup de filet contre les réfugiés ferait davantage recette.»
L'Occident abandonne les femmes
La conquête talibane expose les femmes à un gigantesque retour en arrière, déplore Le Monde dans son éditorial :
«Pendant leurs cinq ans de règne, de 1996 jusqu'à l'intervention des Américains, les talibans ont imposé aux filles et aux femmes afghanes l'interprétation la plus dure de la loi islamique et une soumission totale, punissant sévèrement les rebelles. L'éducation au-delà de l'âge de huit ans leur a été interdite, de même que le travail rémunéré. Pour ces Afghanes que l'Amérique s'est targuée d'avoir aidé à libérer en leur ouvrant la perspective de l'égalité, le retour des talibans serait un gigantesque retour en arrière. Quoi qu'en dise Joe Biden, à cet égard, ce retrait est bien un abandon.»