Annulation de la rencontre Paris-Berlin prévue fin octobre
Le Conseil des Ministres franco-allemand qui devait se tenir la semaine prochaine a été reporté au mois de janvier. Le gouvernement allemand estime que certaines questions nécessitent encore une concertation. Il évoque également l'empêchement de certains de ses ministres. Côté français, on a appelé à une "redéfinition stratégique" pour remettre les compteurs à zéro sur certains points. Les commentateurs se penchent sur la question.
L'Allemagne aura encore besoin de la France
Le moteur franco-allemand de l'UE a du plomb dans l'aile, constate Der Tagesspiegel :
«L'ébranlement des anciennes certitudes, suite à la guerre en Ukraine, n'est pas étranger à ce processus. Mais également le peu d'intérêt que la coalition tricolore menée par Olaf Scholz témoigne aux relations avec la France. ... C'est pourtant agir à courte vue que de négliger les relations avec son premier partenaire en Europe occidentale. .... L'Allemagne aura encore besoin de la France, même si le centre de gravité de l'UE se déplace vers l'est et renforce par là-même le rôle de l'Allemagne. A un moment où les gouvernements polonais et hongroisne partagent pas de nombreuses valeurs européennes, menacent de suivre leur propre voie et n'ont pas la volonté ou la capacité de négocier des compromis au sein de la communauté.»
Macron tape enfin du poing sur la table
La France se sent à juste titre menacée par la politique énergétique allemande, constate le philosophe Jean-Loup Bonnamy dans Le Figaro :
«Le nucléaire français ... a pour principal ennemi les manigances allemandes. Que ce soit sur le gaz et les gazoducs … ou sur le nucléaire, la politique allemande est un péril pour nos grands énergéticiens (et donc pour nos ménages et nos entreprises). Paris a donc raison de taper (enfin !) du poing sur la table face à Berlin. Un bémol toutefois. Paris proteste pour de mauvaises raisons. ... [Il ferait] mieux de demander davantage de fédéralisme européen et d'exiger de l'Allemagne qu'elle s'implique davantage, il devrait militer pour moins d'Allemagne et moins d'Europe.»
Une coopération de défense en passe de s'essouffler
La coalition tricolore ne maintient pas la ligne mise en place par Merkel en ce qui concerne les exportations d'armes, croit savoir La Repubblica :
«A Berlin, les doutes qui planent sur le Système de combat aérien du futur FCAS [Future Combat Air System], bien loin de se dissiper, s'intensifient. Macron avait réussi à imposer le projet grâce aux excellentes relations qu'il entretenait avec Angela Merkel et malgré la résistance de l'industrie allemande. Mais aujourd'hui, l'accord semble être dans l'impasse. Alors que Scholz et la ministre de la Défense, Christine Lambrecht, étaient prêts à satisfaire les exigences françaises sur la question des exportations d'armes, le ministre de l'Economie, l'écologiste Robert Habeck, a présenté des conditions beaucoup plus strictes. ... Si elles n'ont pas encore fait l'objet de débats au sein du Conseil des Ministres, on sait d'ores et déjà qu'elles risquent de miner les relations entre Paris et Berlin. »
Une scission inacceptable
Rudolf Balmer, correspondant du quotidien taz en France, espère que les divergences de fond entre les deux pays seront mises ouvertement sur la table :
«Si la coopération entre Paris et Berlin ne se met pas en place sur une base sérieuse, les tendances centrifuges susceptibles d'écarteler l'UE risquent encore de s'accentuer sous l'effet de la guerre et de la crise énergétique. Une scission qui serait inacceptable. ... Dans l'intérêt de toute l'UE, le couple franco-allemand doit nommer les divergences par leur nom et redéfinir son partenariat sur la base de ses véritables points communs. »