Rencontre entre Scholz et Macron : fini les désaccords ?
Le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholf se sont réunis à Paris mercredi dans le but affiché de resserrer leurs liens. A l'issue d'une rencontre qui a duré trois heures, Scholz a affirmé que les discussions sur la hausse des prix, l'approvisionnement énergétique et les projets d'armement avaient été positives. Il est prévu que des groupes de travail communs soient constitués pour investir ces questions. Les chroniqueurs s'interrogent sur le couple franco-allemand.
De bonnes raisons d'être agacé
La Franche reproche à l'Allemagne nombre de ses décisions, analyse Jutarnji list :
«Tout d'abord, l'Allemagne et la France n'ont pas été d'accord lorsque les Etats membres de l'UE se sont écharpés sur le fait que la Commission puisse qualifier de 'verte' l'énergie nucléaire. Puis l'Allemagne a mis la France en colère, de même que la plupart des Etats membres, en proposant un plan d'aide à hauteur de 200 milliards d'euros. ... On ne peut pas non plus parler d'amitié sincère dans le cadre du projet de construction du gazoduc ibérique. ... Mais ce qui semble surtout chiffonner Paris, c'est cette décision de l'Allemagne de renforcer ses capacités militaires en achetant des technologies et des armes américaines.»
Voir la réalité en face
L'UE n'est pas en phase avec la nouvelle donne, fait observer Le Point :
«Elle doit envisager, relativement à elle-même, que ses membres n'ont pas toujours le même agenda, et ce afin d'éviter que les divergences d'opinions n'empirent sous des formes meurtrières. Voilà pourquoi elle est aujourd'hui prise au piège de son équation Paris-Berlin, dont elle croyait avoir résolu l'inconnu en promettant la paix perpétuelle. L'Europe ne peut se construire qu'en fonction de sa véritable histoire, sans illusions, sans hypocrisie, en tenant les nations pour ce qu'elles sont : changeantes, imprévisibles et, hélas, égoïstes.»
L'heure n'est pas au romantisme
Gregor Waschinski, correspondant du journal Handelsblatt à Paris, appelle à prendre en compte les différents intérêts :
«Pour mettre le partenariat franco-allemand sur de nouveaux rails, il est indispensable que chaque partie se montre plus compréhensive vis-à-vis de ce que veut l'autre. Prenons l'exemple de la politique de défense : la France vise une communauté européenne de défense, autonome dans le domaine de l'armement. Car Paris entend également défendre les intérêts de ses usines d'armement. L'Allemagne a une vision plus transatlantique de la chose. ... Ces divergences ne sont pas catastrophiques et le couple franco-allemand reste solide. Il est toutefois indispensable de redéfinir ces relations. La ligne directrice doit être la suivante : moins de romantisme, plus de réalisme.»
Le moteur franco-allemand est incontournable
Paris et Berlin devraient agir de concert, fait valoir Financial Times :
«Malgré des différences de style entre le pragmatisme technocratique de Scholz et l'idéalisme de Macron, il y a largement de quoi trouver un terrain d'entente. Un discours que le chancelier allemand avait prononcé en août, appelant à une Europe 'géopolitique' et 'souveraine', chérissait les thèmes de prédilection du président français, même s'il était davantage question de réformes institutionnelles que de défendre un idéal. Il est nécessaire de repenser le fonctionnement de l'UE. Mais à l'heure actuelle, alors que l'UE se prépare à traverser les pires difficultés depuis le début de la guerre en Ukraine, il est indispensable d'activer le moteur franco-allemand, pour que l'Union soit pleinement opérationnelle.»
Il n'y a rien de dramatique
Le couple franco-allemand pâtit des bouleversements géopolitiques actuels, analyse Luuk van Middelaar dans sa chronique pour NRC Handelsblad :
«Il ne faut pas dramatiser ces discordes politiques. Les grands changements géostratégiques ont créé un malaise inavoué. L'invasion russe est le plus grand bouleversement qu'ait connu l'Europe depuis la fin de la guerre froide. Tout comme en 1989, cela crée des déséquilibres sur le continent et donc des remous dans la relation franco-allemande. ... Le centre de gravité de l'Europe se déplace vers l'Est, et la position centrale de la République fédérale s'en trouve renforcée. La France, qui se considère comme le fer de lance de l'Europe, reste en retrait sur le flanc Ouest de l'Atlantique.»