Plan chinois pour l'Ukraine : une initiative prometteuse ?

A l'occasion du premier anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine, Pékin a présenté un plan en douze points censé résoudre le conflit. Si le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a salué une volonté de préserver la "souveraineté, l'indépendance et l'intégrité territoriale de tous les pays", Kyiv se montre sceptique sur d'autres éléments. Le président français, Emmanuel Macron, a loué l'initiative et annoncé son intention de se rendre en Chine en avril. Les avis de la presse sont contrastés.

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Denik (CZ) /

Un plan de sauvetage de la Russie ?

Pour Deník, il y a aussi du bon dans le document produit par Pékin :

«L'essentiel, c'est que la Chine commence désormais à coopérer réellement avec l'Occident, l'Ukraine et oui, également avec la Russie dans le but de parvenir à une paix juste. Une paix qui serait basée sur le renoncement pour l'agresseur, la Russie donc, à son butin de guerre. La Russie devrait également payer des réparations pour les dommages causés par son attaque de l'Ukraine sans provocation préalable. Pékin est peut-être arrivé à la conclusion, avant Moscou, que cette guerre est perdue pour la Russie et qu'elle ne peut pas la gagner. La Chine est peut-être en train de sauver son partenaire stratégique de la déconfiture totale et d'une défaite catastrophique aux conséquences incommensurables.»

Times of Malta (MT) /

Des vertus de l'ouverture d'esprit

Le plan de la Chine ne doit pas être balayé d'un revers de mains, sans considération aucune, estime Times of Malta :

«Le Secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, l'a qualifié de peu crédible, puisque Pékin n'a pas condamné l'invasion contre l'Ukraine. Ursula von der Leyen a ajouté que la Chine avait déjà choisi son camp. On peut toutefois observer certains signes d'ouverture à l'initiative chinoise. Le gouvernement ukrainien l'a salué. ... Et Emmanuel Macron a signalé qu'il avait l'intention de se rendre en Chine en avril ; il a continué d'exhorter Pékin à ne pas fournir d'armes à la Russie et à faire pression sur le Maître du Kremlin pour qu'il mette un terme à la guerre. Peut-être commence-t-on lentement à prendre conscience qu'un dialogue demande une plus grande ouverture d'esprit.»

Sydsvenskan (SE) /

Un médiateur loin d'être neutre

Les éléments positifs du plan ne permettent pas de balayer les doutes, estime Sydsvenskan :

«La proposition chinoise comporte assurément des points qui paraissent louables. L'établissement, par exemple, de corridors humanitaires qui permettent d'évacuer la population civile. Mais aussi la nécessité de protéger les installations nucléaires et de proscrire le recours aux armes atomiques dans les combats. En soi, c'est déjà une bonne chose que le pays s'engage sur le front diplomatique. ... Il est peu probable néanmoins que la proposition chinoise se concrétise. Car si la Chine a affirmé sa neutralité dans le conflit, elle est souvent perçue comme un étroit partenaire de la Russie de Vladimir Poutine. L'usage du mot 'crise' à la place du terme approprié de 'guerre' le montre très clairement.»

Público (PT) /

Réagir à l'hypocrisie par l'hypocrisie

Ce serait une erreur que l'Occident rejette d'emblée le plan chinois, estime Público :

«Il est compréhensible que la Chine cherche à se profiler en faiseuse de paix. Dans les louvoiements entre la diplomatie et la guerre, il faut parfois répondre à l'hypocrisie par l'hypocrisie. Le fait que la Russie accepte de devoir reconnaître l'intégrité territoriale de l'Ukraine constituerait une grande victoire pour l'Ukraine et ses alliés. Et même si cette intention ne se concrétisait pas, elle pourrait avoir le mérite d'enfoncer un coin entre Moscou et Pékin.»

eldiario.es (ES) /

Pékin pourrait obtenir des concessions

eldiario.es y voit lui aussi une opportunité :

«Bien que le plan ait de nombreuses carences, la Russie, fortement tributaire de la Chine, ne peut se permettre de le rejeter. Il pourrait même y avoir un cessez-le-feu immédiat si Xi Jinping le proposait, ce qui contraindrait Moscou à faire machine arrière. Quel que soit le contenu du plan, le simple fait que la Chine l'ait proposé s'avère très positif. Il faut espérer que les réactions seront à la hauteur de l'opportunité qui se présente.»

Pavlo Klimkine (UA) /

Une volonté de s'affirmer sur l'échiquier mondial

Dans un post Facebook, l'ex-ministre ukrainien des Affaires étrangères, Pavlo Klimkine, y voit la tentative de la Chine d'étendre son influence internationale :

«Le plan de paix chinois est un texte très prudent, qui comporte de nombreuses embûches. Il ne s'agit pas du contenu - les Chinois savent très bien qu'en l'état, il est inacceptable pour nous, pour l'Occident ou pour la Russie. Ce plan est un plaidoyer pour que la Chine devienne elle aussi un protagoniste, un acteur prêt et disposé à 'jouer' sur la scène internationale. Il s'agit, en soi, d'une candidature à prendre très au sérieux.»

Adevărul (RO) /

La Chine veut afficher sa puissance

Pékin entend envoyer un signal à l'Asie centrale et méridionale, assure l'anthropologue et ex-député Gabriel Hora Nasra dans Adevărul :

«Avant 2022, les Chinois auraient bien importé davantage de pétrole, de gaz et de métaux depuis les pays d'Asie centrale, mais ils devaient être pragmatiques et tenir compte des intérêts russes et du legs soviétique dans la région. Aujourd'hui en revanche, la Chine a toute latitude pour se rapprocher de ces républiques, du fait de la dépendance de la Russie vis-à-vis de la Chine. ... Si les douze points de cette proposition ne sont que des paroles en l'air pour l'Occident, ils constituent en revanche pour la Chine une excellente façon d'affirmer son non-alignement, et d'inciter les pays d'Asie centrale à s'agréger autour d'elle.»