Livraison de missiles à l'Ukraine : Berlin envisagerait un 'troc'
En octobre, le gouvernement allemand avait rejeté une demande de Kyiv datant de mai, concernant la livraison de missiles de croisière Taurus, au motif que leur rayon d'action était trop important. D'après des informations du journal Handelsblatt, Olaf Scholz serait disposé à accepter une proposition britannique : Berlin fournirait des Taurus à un pays partenaire de l'OTAN qui, en contrepartie, fournirait des systèmes de missiles équivalents à l'Ukraine. Que penser de cette idée ?
Des responsabilités à assumer
Le quotidien Süddeutsche Zeitung n'est pas convaincu par cette proposition :
«Cela fait certes longtemps qu'on ne peut plus accuser le gouvernement allemand de ne pas faire grand-chose, d'un point de vue militaire, pour l'Ukraine. L'échange envisagé est toutefois un moyen de se soustraire aux responsabilités - cela avait aussi été le cas avec les véhicules de combat d'infanterie et les chars d'assaut. L'Ukraine avait certes obtenu le soutien désiré, mais cela n'avait pas été, dans un premier temps, le meilleur matériel possible. Celui-ci a finalement été livré, pour l'essentiel, mais souvent trop tard. Il est désormais essentiel que le chancelier allemand soit à la hauteur du leadership qu'il affirme revendiquer dans le soutien à l'Ukraine. Cela implique de livrer les missiles Taurus !»
Toujours mieux que rien
Les modèles de missiles franco-britanniques ne peuvent rivaliser avec les Taurus en termes de portée et de précision, fait valoir le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung :
«Mais c'est précisément ce que recherche Berlin. Les missiles, du reste, ne transiteraient pas par l'Allemagne. Et cet échange dégarnirait quand même les stocks de la Bundeswehr. On peut juger cette 'valse totalement cinglée', pour reprendre l'expression de Marie-Agnes Strack-Zimmermann [politique FDP, présidente du comité parlementaire sur les questions de défense]. Mais les Ukrainiens se diront sûrement : mieux vaut avoir des missiles moins performants que de ne pas en avoir du tout.»
L’Allemagne se ménage-t-elle une échappatoire ?
Rzeczpospolita s'irrite des retards dans la livraison des Taurus :
«Berlin n'a pas dit non, mais elle continue d'ajourner sa décision. Cela s'inscrit dans la stratégie habituelle privilégiée par le gouvernement Scholz depuis le début de l'invasion russe. Alors que des véhicules de combat d'infanterie, des canons automoteurs et des chars Leopard ont finalement été envoyés sur le front, la situation semble différente avec les Taurus. ... Toute la question est de savoir si les atermoiements allemands ne cachent pas la crainte que la livraison de Taurus compromette une éventuelle reprise des relations avec Moscou une fois la guerre terminée.»