75 ans de l'OTAN : quels sont les défis du futur ?
Un agenda chargé
A l'occasion de son 75e anniversaire, l'OTAN est confrontée à ses faiblesses, écrit De Standaard :
«'L'unité dans la diversité' est une maxime qui a son prix. Par ailleurs, presque tous ses Etats membres ne savent plus comment on fait la guerre, et leurs industries ne sont pas adaptées à une économie de guerre. Le financement reste un problème, on a trop économisé sur les budgets de défense. Il est difficile d'inverser la tendance, et une meilleure coopération sera indispensable pour tirer le meilleur parti des investissements. L'OTAN se heurte en outre à de nouveaux défis géopolitiques : le Proche-Orient est devenu une poudrière, et l'attitude de l'allié Israël suscite la consternation. Le continent africain est en pleine déstabilisation et l'influence des mercenaires russes ne cesse d'y augmenter. ... Sans parler de la Chine, qui reste une préoccupation majeure.»
Les garde-fous de l'OTAN, faiblesses aux yeux de Moscou
Sur Facebook, le politologue Petro Olechtchouk attend que Washington affiche davantage de résolution :
«Nous avons tous bien compris que l'OTAN, au fond, ce sont les Etats-Unis. Et les Etats-Unis posent actuellement de très gros problèmes. L'éventuelle ré-élection de Donald Trump n'est pas le seul souci. ... L'administration Biden actuelle, avec ses appels permanents à la 'désescalade', a déjà placé l'OTAN face au risque d''escalade'. ... Il est évident que les Russes considèrent comme autant de signes de faiblesse les bornes à ne pas dépasser délimitées par l'Alliance . ... On verra d'abord des missiles russes, ainsi que des drones Shahed, empiéter occasionnellement sur l'espace aérien de l'OTAN. Viendront ensuite des troupes de sabotage, puis peut-être déjà des chars. Mais cela, les pays baltes sont les seuls à l'avoir déjà compris.»
Un retrait n'apporterait rien aux Etats-Unis
Le portail Protagon relaye un texte de Carla Norrlöf, professeure de sciences politiques à l'université de Toronto et Senior Fellow à l'Atlantic Council, initialement paru sur Project Syndicate :
«Les Américains doivent comprendre que l'OTAN n'est pas seulement un mécanisme de protection des alliés. C'est un élément essentiel au sein d'une stratégie globale qui promeut à la fois les intérêts américains et maintient le rôle de leader mondial de leur pays. Les Etats-Unis ne gagneraient rien à se retirer de l'alliance transatlantique. Au contraire, leur départ réduirait leur influence sans pour autant limiter de manière significative leurs dépenses militaires.»
Les valeurs communes, épine dorsale de l'OTAN
'L'OTAN ne doit pas se laisser diviser par Moscou', a déclaré son secrétaire général Jens Stoltenberg lors du 75e anniversaire de l'Alliance. RFI România pense que les desseins de la Russie vont plus loin encore :
«Moscou veut des garanties que l'Ukraine ne rejoindra jamais l'OTAN, des garanties que l'alliance militaire ne pourra jamais lui donner, pour la simple raison qu'elle enfreindrait ce faisant ses propres textes. ... Depuis la création de l'OTAN, le but déclaré de Moscou est la destruction de l'organisation. Peut-être – si l'on en croit certains experts militaires – en testant le fameux article 5. Les alliés voleront-ils tous au secours d'un pays en cas d'agression ? ... Donald Trump a semé des doutes sur l'infaillibilité de la solidarité. Mais une chose est sûre : l'OTAN survivra tant que ses membres se sentiront tenus d'en respecter les valeurs.»
Le droit de veto, faille de sécurité
IQ pointe le risque inhérent aux intrigues insidieuses au sein de l'alliance :
«Démocratie, droit international et Etat de droit forment le socle de l'alliance la plus puissante au monde. Mais un certain nombre d'Etats oublieux de ces valeurs tentent depuis longtemps de placer leur intérêts mercantilistes au-dessus des décisions cruciales de l'OTAN. On l'a vu dans le cas de l'adhésion de la Suède, retardée par les motivations égoïstes de la Turquie et de la Hongrie, au grand dam des intérêts sécuritaires communs de l'alliance. ... Le droit de veto est un des plus grands défis pour les grandes organisations occidentales. Le meilleur exemple nous est donné par les Nations unies, organisation rendue complètement inefficace par ce même droit de veto.»
Pékin, le grand challenge
A l'avenir, la menace viendra surtout de la Chine, met en garde le quotidien Welt :
«Le pays se remilitarise de plus en plus et gagne en assurance. Dans une quinzaine d'années, la Chine sera sans doute le grand sujet de l'OTAN. L'alliance doit enfin en prendre la mesure : engager le dialogue avec un certain nombre de pays partenaires du Pacifique et des exercices militaires à petite échelle est loin d'être suffisant. Dans ce contexte, Berlin doit arrêter de freiner des quatre fers. Car la menace chinoise concerne aussi l'Europe : si Pékin était en mesure de bloquer les voies commerciales dans la Mer de Chine méridionale, la circulation des marchandises en Europe serait en péril.»
L'aide américaine n'est pas une évidence
L'Europe doit redoubler d'efforts pour maintenir au sein de l'OTAN son plus grand contributeur, tonne The Daily Telegraph :
«Avec la franchise qui était sa marque de fabrique, le premier secrétaire général de l'OTAN Lord Ismay avait formulé l'ambition principale de l'alliance comme suit : 'Garder les Américains à l'intérieur, les Russes à l'extérieur et les Allemands sous tutelle'. ... La menace pour l'avenir de l'OTAN vient de ses propres rangs, surtout en cas de ré-élection de Donald Trump à la présidence cette année. Son ambivalence vis à vis de l'alliance s'explique en partie par son mécontentement : les Etats-Unis contribuent bien plus à la défense de l'Europe que le continent ne le fait lui-même. ... On aurait tort de penser que l'aide américaine coule de source. C'est pourquoi un des objectifs d'Ismay était de maintenir les Etats-Unis dans l'OTAN. A cet effet, les pays européens membres de l'OTAN devront mettre les bouchées doubles et passer à la caisse.»
Grave pénurie de soldats
Večernji list se penche sur le manque de soldats au niveau européen :
«Accorder aux familles des avantages pour permettre un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, augmenter les rémunérations, appeler les femmes à servir sous le drapeau et restaurer progressivement le service militaire obligatoire : voici quelques-unes des mesures susceptibles de mettre fin au recul inquiétant du nombre de soldats actifs dans les forces armées des pays membres de l'OTAN. ... Compte tenu de la nouvelle situation géopolitique et de la guerre aux marches de l'Europe, ce problème devient d'actualité dans presque tous les Etats membres de l'OTAN. ... Outre les menaces extérieures, ils doivent aussi concentrer leurs forces sur les faiblesses venant de l'intérieur.»
Renforcer la résilience démocratique
Dans les colonnes de La Tribune, la députée Renaissance Anne Genetet appelle à envisager d'autres stratégies que les seules des forces armées :
«La défense de l'espace euro-atlantique, c'est non seulement une défense militaire, mais c'est aussi aujourd'hui, plus que jamais ..., la défense d'un ensemble de valeurs partagées. C'est pourquoi je défends l'idée que notre pays pousse le débat sur la création d'un centre de l'OTAN pour la résilience démocratique. … Si sa création est débattue depuis 2019, la guerre hybride menée par la Russie la rend importante et urgente, donc prioritaire. Ce faisant, la France renforcerait son influence au sein de l'OTAN, laquelle doit plus que jamais être notre bouclier face aux ennemis de la liberté.»