France : le gouvernement bientôt renversé ?

La France est en proie à une crise gouvernementale. Suite au recours à l'article 49.3 de la Constitution par le Premier ministre Michel Barnier pour faire adopter sans vote une partie du budget à l'Assemblée, l'alliance de gauche NFP et le parti d'extrême droite RN ont chacun déposé une motion de censure. Les motions seront débattues à partir de mercredi. Les éditorialistes cherchent les responsables de cette situation.

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In.gr (GR) /

Le cordon sanitaire n'a pas fonctionné

L'action du président français a manqué de clairvoyance, déplore le portail In:

«Dans la mesure où Macron a décidé de ne pas former de gouvernement autour du NFP, l'alliance de gauche qui a remporté le plus grand nombre de députés, le gouvernement Barnier repose sur le soutien tacite du RN. Cela veut dire que les décisions de Macron - rappelons qu'il a convoqué des élections législatives soi-disant pour réagir au score de l'extrême droite aux européennes - font de l'extrême droite le régulateur des développements politiques. ... Cela est naturellement très pratique pour l'extrême droite, car elle peut se préparer tranquillement pour la présidentielle de 2027, tandis que ses partisans peuvent se targuer d'avoir obtenu des résultats concrets grâce aux pressions exercées.»

Le Figaro (FR) /

Un trou noir

Le Pen se comporte de manière irresponsable, critique Le Figaro :

«[L]a patronne du RN en voulait toujours plus, au risque de gâcher sa victoire. Elle a choisi de faire chuter le gouvernement de Michel Barnier. Elle va plonger la France dans la grande inconnue politique et financière. Elle expose les plus modestes aux effets mécaniques d'un budget de fortune. Elle entrouvre la porte de Matignon aux socialistes, ce qui ne devrait pas enchanter son électorat. Elle jette aux orties ses galons âprement acquis de femme de gouvernement pour reprendre la tunique tribunitienne. ... Nous avons besoin d'un budget et d'un peu de stabilité. Marine Le Pen a préféré les ruptures aventureuses aux bénéfices de la force tranquille. Elle a multiplié ses lignes rouges au risque de plonger la France dans le trou noir.»

Libération (FR) /

Se souvenir du message des électeurs

Libération appelle Barnier à ne pas faire de nouvelles concessions à l'extrême droite :

«Michel Barnier semble oublier que s'il est à Matignon, c'est à la suite d'un résultat bien particulier aux élections législatives de juillet. Et quel fut le principal message de ces élections ? Le refus massif, et contre toutes attentes, de voir le RN gouverner. Dans le cadre d'un impressionnant front républicain, des millions d'électeurs de gauche ont voté pour des candidats de droite et des millions d'électeurs de droite ont voté pour des candidats de gauche. Le chef de la rachitique majorité devrait donc se soucier, comme il l'avait d'ailleurs promis au moment de son installation à Matignon, de l'avis de la gauche pour obtenir des majorités sur ses textes, plutôt que de se mettre dans la main du RN.»

La Stampa (IT) /

Un simple calcul personnel ?

La posture de Le Pen pourrait s'expliquer par des raisons personnelles, suppute La Stampa :

«Marine Le Pen, accusée d'avoir détourné des fonds du Parlement européen, encourt une peine de prison de cinq ans et une inéligibilité de cinq ans également. Le verdict est attendu pour le printemps et pourrait l'empêcher d'être candidate à la présidentielle 2027. En provoquant une crise parlementaire et en empêchant la formation d'un nouveau gouvernement, Le Pen pourrait espérer provoquer une crise d'Etat - Macron ne peut dissoudre l'Assemblée avant juin prochain -, en exigeant la démission du chef de l'Etat et la convocation d'une présidentielle anticipée dans les prochains mois.»

La Repubblica (IT) /

La morale de l'histoire...

La Repubblica pointe la responsabilité de Macron :

«S'il est permis de tirer une morale de cette histoire, on pourrait dire que son européisme dogmatique, couplés à son absence d'européisme pragmatique, ont fini par se retourner contre lui. S'il était parvenu à accomplir au moins une partie des projets annoncés, s'il avait vraiment osé partager avec ses alliés l'hégémonie militaire et nucléaire dont il dispose sur le continent, alors la France et l'Europe ne seraient pas dans cette situation aujourd'hui.»