Trump démantèle les radios américaines dans le monde

Par décret, le président américain Donald Trump a annoncé des coupes massives au sein de Radio Free Europe-Radio Liberty (RFE-RL) et d'autres radios américaines émettant à l'étranger. Selon les médias, près de 1 300 collaborateurs auraient déjà été mis à pied. RFE-RL est considérée depuis la guerre froide comme une voie indépendante au sein des autocraties et des dictatures du monde entier. Les commentateurs évoquent les réactions possibles.

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Hospodářské noviny (CZ) /

La Tchéquie a une dette morale

Hospodářské noviny appelle le gouvernement tchèque à soutenir Radio Free Europe-Radio Liberty :

«La fermeture de la fréquence nous concerne directement puisque la rédaction a son siège à Prague. Beaucoup de Tchèques se rappellent encore les émissions 'Svobodka' sous l'ère communiste et son rôle dans la chute du régime. ... Nous devrions reprendre le flambeau de la radio dans son esprit initial. ... La République tchèque devrait se placer à la tête des pays qui s'engagent à financer RFE-RL sur le long terme. C'est presque une obligation, comme une dette que nous devons honorer. Non pas envers les Etats-Unis sous leur forme actuelle, mais envers l'idée de liberté. »

Eesti Päevaleht (EE) /

A l'Europe de prendre le relais

Dans Eesti Päevaleht, le chroniqueur Edward Lucas appelle à remplacer rapidement les moyens supprimés par Trump :

«RFE-RL est un projet clé en main qui, dans la guerre de l'information, a la puissance de feu d'un porte-avion pleinement équipé en hommes et en armes. Son siège principal est sis en Europe, à Prague (la suppression de la partie américaine de la bureaucratie permettrait de faire des économies et probablement aussi d'améliorer l'efficacité). ... Il faut agir sans tarder, avant que les collaborateurs ne mettent leur talent au service d'autres projets, que les locaux et les équipements techniques ne soient vendus et que la culture de l'institution ne sombre. Et tout ce gâchis pour économiser l'équivalent d'un seul avion de combat américain F-35 - qui ne fonctionnera sûrement pas le jour où on en aura besoin.»

Mladá fronta dnes (CZ) /

Pas de guerre culturelle avec les Etats-Unis

Mladá fronta dnes appelle ceux qui veulent sauver RFE-RL à faire preuve de prudence :

«La radio ayant son siège à Prague, nous y tenons comme on tient aux bijoux de famille. ... Mais gardons-nous de nous laisser happer dans un tourbillon qui pourrait nous entraîner dans une guerre culturelle avec l'Amérique. Nous aurions tort de conserver RFE principalement pour avoir le sentiment d'avoir fait un pied de nez à Trump. ... Deux jours après la décision américaine de réduire considérablement la taille de Global Media Agency, l'eurodéputé français Raphaël Glucksmann a fait une déclaration. Il a demandé la restitution à la France de la statue de la liberté, dédicacée aux Etats-Unis en juillet 1876 à l'occasion du centenaire de la déclaration d'indépendance. Exactement le genre de dynamique que nous ne voulons pas suivre.»

La voix de la vérité bâillonnée

Sur Facebook, l'historien et député ukrainien Volodymyr Viatrovytch souligne le rôle des deux stations :

«En Union soviétique, Voice of America et Radio Liberty avaient été qualifiées de 'voix hostiles' et leurs ondes avaient été impitoyablement brouillées, pour les empêcher de diffuser la vérité derrière le rideau de fer. L'Union soviétique et le rideau de fer ne sont plus là. Et voilà que l'on fait taire les voix qui avaient propagé la vérité. Pas sous l'effet de brouilleurs d'ondes, mais faute de volonté de promouvoir la vérité et d'actionner des instruments complexes pour la diffuser. Il s'avère plus rapide, moins coûteux et plus efficace de mentir sur les réseaux sociaux.»

Sergueï Aslanian (RU) /

Washington fait le jeu de Moscou

Sur Facebook, le journaliste Sergueï Aslanian tire à boulets rouges sur le président américain :

«Trump est à ce point ignare et primitif qu'il a décidé de détruire 'Voice of America' et 'Radio Liberty'. Pourquoi les Etats-Unis auraient-ils besoin d'une radio face à la mégalomanie de Trump ? Pourquoi dépenser de l'argent pour des mots, si ceux-ci ne rapportent aucun profit concret ? Pourquoi allouer des fonds s'il se trouve un président nanti qui joue avec la guerre et la paix ? La Russie mène la guerre de l'information avec sérieux et avec succès, mais Moscou redoutait, jusque-là, de la perdre. Mais voilà qu'elle obtient la victoire toute cuite des mains de son principal ennemi, les Etats-Unis.»