Panne de courant en Espagne et au Portugal

Une panne de courant généralisée a privé plus de 60 millions de personnes d'électricité lundi après-midi en Espagne, au Portugal, et dans certaines parties de la France. Internet et les réseaux mobiles ne fonctionnaient plus, les transports se sont retrouvés à l'arrêt, commerces et foyers étaient plongés dans le noir. Les causes de la panne restent encore inconnues. Les éditorialistes tirent leurs propres conclusions.

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El País (ES) /

Une crise de plus en des temps incertains

El País s'inquiète de l'extrême vulnérabilité éprouvée pendant la panne :

«L'électricité a subitement disparu dans les salles d'opération ; des milliers de personnes sont restés bloquées dans des ascenseurs, des tunnels de métro et des trains à travers le pays. ... Des scènes qui semblaient impensables dans un pays européen développé. ... Une confusion et une agitation qu'on n'avait plus vues depuis les premiers jours de la pandémie. Cette panne d'électricité est le dernier exemple en date de la série de crises graves de ce siècle. Cette fois-ci, une grande partie de la population s'est endormie avec un sentiment d'extrême vulnérabilité. ... Cette crise rajoute une dose préoccupante de malaise à la forte incertitude ressentie ces derniers temps.»

eldiario.es (ES) /

Pour une fois, on aura parlé des trains qui arrivent à l'heure

Irene Lozano, rédactrice du portail Eldiario.es, pense avoir tiré le meilleur parti possible du black-out :

«J'ai passé un après-midi fabuleux - un après-midi d'un autre temps -, à écouter la radio et à lire dans mon fauteuil à oreilles. J'ai eu le temps de réfléchir et de noter ces réflexions dans mon carnet personnel. J'ai commencé à écrire cet article, et je l'ai couché sur le papier - sans être interrompue ou distraite. Le soir, je suis allée promener ma chienne. ... Elle a gambadé dans le parc, a mangé sa pâté, est allée dormir. Pour elle, ce fut un jour comme les autres - à cette différence près qu'elle a dû monter cinq étages à pattes. ... C'est à ce moment précis que la lumière est revenue dans les chaumières. Les journalistes ont annoncé une nouvelle qu'ils ne font jamais : tout fonctionne. On n'a pas l'habitude qu'un fait du quotidien fasse enfin les gros titres.»

Diário de Notícias (PT) /

Prendre au sérieux la protection des personnes

La bureaucratisation inutile de l'appareil d'Etat a plombé la réponse des autorités à la crise, croit savoir Diário de Notícias :

«Depuis plus de dix ans, un plan de communication placé sous la responsabilité du service de sécurité SSI est prévu pour les situations de crise, mais on en ignore tout. Institutions et organisations prolifèrent dans ce pays, des compétences se chevauchent si bien que personne ne se sent vraiment responsable. ... Nous avons de la chance d'avoir été épargnés jusque-là par de grandes catastrophes - naturelles ou non -, comme un attentat terroriste. ... Si nous prenions davantage au sérieux la protection de toutes les personnes, nous pourrions empêcher des tragédies plus graves encore.»

Eesti Päevaleht (EE) /

Les réseaux électriques, un talon d'Achille

Eesti Päevaleht tire plusieurs conclusions :

«Premièrement, les cyberattaques sont indéniablement une menace réelle. S'il devait être confirmé que 50 millions de personnes ont été plongées dans le chaos par un simple ordinateur, il s'agirait d'une faille sécuritaire de premier ordre dont tous les pays devraient tirer des enseignements. Deuxièmement, il faut moderniser les réseaux électriques. Une tâche certes considérablement onéreuse. Mais tandis que l'OTAN reproche par exemple à l'Espagne d'être la lanterne rouge de l'Europe en matière de dépenses de défense, l'épisode illustre toute l'importance du bon fonctionnement d'autres services cruciaux. Troisièmement, la question de l'intégration européenne reste essentielle. Pour garantir la stabilité, nous devrions développer le raccordement de notre réseau avec ceux de nos voisins

The Daily Telegraph (GB) /

Le résultat de la neutralité carbone

Pour éviter une panne similaire au Royaume-Uni, le gouvernement Labour doit renoncer à son objectif de sortie des énergies fossiles d'ici 2030, fait valoir The Daily Telegraph :

«Les répercussions de la transition vers les renouvelables sur le réseau électrique ont-elles été suffisamment prises en compte ? La mise à l'arrêt de vieilles centrales nucléaires dans les trois prochaines années, les retards pris dans la construction de nouvelles et la hausse des besoins en électricité placeront le Royaume-Uni dans une situation précaire à l'horizon 2028. La probabilité que l'éolien, le solaire et autres énergies renouvelables comblent cette lacune est faible. Les citoyens attendent de leur gouvernement qu'il garantisse l'approvisionnement électrique. ... Pour les politiques qui échoueraient dans cette mission, le retour de bâton promet d'être violent.»

El Periódico de Catalunya (ES) /

Aucune transparence

El Periódico de Catalunya déplore l'absence d'informations et d'explications :

«Il faut se garder, aujourd'hui, de céder à la tentation de remettre en cause la transition énergétique. Nous disposons de trop peu d'éléments tangibles, et on ne peut se laisser influencer par des préjugés ou des partis pris idéologique. Cela prévaut en général pour la propagation de fake news ou d'informations invérifiables, contre lesquelles le Premier ministre nous a mis en garde hier. Le fait est que l'on peut éviter les risques d'infox en privilégiant une communication rapide et transparente. Les déclarations officielles, après plusieurs heures, se sont limitées à dire que rien n'était exclu. Cela ne fait qu'attiser les spéculations sur les causes de cette panne et sur les raisons pour lesquelles celles-ci n'ont pas été communiquées. Et si vraiment personne n'était au courant, ce n'en est pas moins préoccupant.»