Les extrémistes croates compliquent la formation d'un gouvernement
A l'issue des législatives en Croatie, les conservateurs du HDZ, vainqueurs du scrutin, sont en quête d'un partenaire de coalition. Selon la presse, le parti de la minorité serbe refuse de faire coalition avec le HDZ si le ministre de la culture sortant Zlatko Hasanbegović, controversé pour les déclarations révisionnistes et nationalistes, était maintenu à son poste. Le chef du HDZ peut-il se passer des tenants de la ligne dure dans les rangs de son propre parti ?
Le chef du HDZ devra ménager la droite extrême
Le chef du HDZ Plenković devra effectuer une habile pirouette s’il ne veut pas se mettre à dos le camp de Hasanbegović, prédit Vecernji list :
«L’aile conservatrice du HDZ s’attend à deux choses : que Plenković maintienne Hasanbegović au poste de ministre de la Culture et ne laisse aucun représentant de la minorité serbe entrer au gouvernement. Hasanbegović n’a pas vraiment simplifié la situation en répondant à Pupovac [représentant de la minorité serbe] qu’il entendait bien conserver son fauteuil de ministre. Mais en diplomate chevronné, Plenković saura gérer cette situation avec la diplomatie de mise. Le contexte étant ce qu'il est, il ne gardera ni Hasanbegović comme ministre, ni n’acceptera de membres du [parti indépendant serbo-croate] SDSS au sein de son gouvernement. Mais Hasanbegović, ayant un poids politique considérable, ne peut pas se contenter d'être un député lambda. Il serait donc logique de le destiner à une haute fonction parlementaire, par exemple celle de vice-président.»
Pas de révisionnistes au gouvernement
Si le chef du HDZ Plenković veut tenir sa promesse de renouveler le parti conservateur en se démarquant de son prédécesseur Karamarko, il ne doit pas confier de responsabilité au sein de son gouvernement au politique d’extrême droite Hasanbegović, écrit Novi list :
«La reconduction à son poste du ministre de la culture sortant Hasanbegović serait une grande victoire pour la formation Karamarko et pour son révisionnisme historique. S’il y renonçait, il pourrait poursuivre le processus de renouveau du HDZ et ces grandes transformations au sein du parti que, selon les déclarations du chef du parti, 'toute la société croate ne manquera pas de remarquer bientôt'. … Car placer les Croates devant le fanatisme et le radicalisme de Hasanbegović, bien que les partis à droite du HDZ n'aient récolté qu'un très faible score, serait pour Plenković marquer un but contre son propre camp.»
Le départ de Milanović ne résout rien
Suite au revers électoral essuyé par les sociaux-démocrates du SDP – son pire résultat depuis 2007 – le chef de file du parti, l’ex-Premier ministre Milanović, a fait savoir qu’il ne brigait plus la direction du parti. Pour Novi list, des réformes conséquentes s’imposent au sein du SDP :
«Ce parti n’a pas réussi à proposer une alternative de gauche au modèle économique actuel, qui est désastreux. … Le problème est que personne dans sa direction actuelle n’est en mesure d’impulser une quelconque alternative politique. Malheureusement, sur le plan des candidats comme sur celui des idées, ce parti a été phagocyté par l’ego de Milanović. C’est pourquoi le départ de Milanović ne suffira pas à résoudre le problème du SDP, encore moins si on le substitue par le clone de l'ancien Premier ministre, par exemple [le ministre sortant des transports] Siniša Hajdaš Dončić. S’il ne veut pas péricliter, le SDP doit engager une réforme en profondeur de ses cadres et de ses idées.»
Un chef de file qui n'est plus en phase avec la réalité
Milanović est le premier responsable de la sévère dégringolade de son parti, constate Dnevnik :
«Zoran Milanović est le prototype du politique qui, après avoir occupé pendant des années les plus hautes fonctions de son parti et de l’Etat, en a oublié ses convictions politiques et le rapport à la réalité. On aurait pu s’attendre à ce qu’au bout d’une carrière aussi longue, un politique soit aguerri aux finesses du grand art politique et ait tiré des enseignements de ses victoires et de ses défaites. Mais l'exercice du pouvoir pendant de si longues années, associé à son autosatisfaction, son arrogance et son ignorance, ont empêché l’ex-Premier ministre et chef de file des socio-démocrates de goûter à la sagesse en politique, qui lui aurait au moins valu le respect en dehors de son parti – puisqu'il n'est même pas soutenu par ses électeurs.»
Rien de nouveau et rien de réjouissant
Faute d’offre meilleure, les Croates se sont accommodés, comme d’habitude, de ce qu’avait à offrir le marché politique, constate Novi List avec regret :
«On voit une fois de plus que les Croates ne changent pas si facilement d’avis, qu’ils n’aiment pas prendre de risques et finissent par voter pour les leurs. Par voie de conséquence, le résultat de ces élections ressemble à celui des précédentes : une impasse. Peu importe qui finira par échaffauder un gouvernement : il n’y a pas de gagnant à ces élections, il n'y a que des perdants. La participation électorale en baisse constante est un signe clair que pour la moitié de la population sur le marché croate des idées et des dirigeants politiques, il n’y a rien de nouveau, rien de souhaitable et rien de bien prometteur. Personne n’a été investi du mandat de gouverner. Une fois de plus, les fossés qui divisent idéologiquement et territorialement la Croatie se sont creusés et les frontières se sont renforcées.»
Pas de temps à perdre en vaines querelles
Tandis qu’on assiste à une vague d'expatriation des jeunes croates, les partis ne trouvent rien de mieux à faire que de s'écharper, déplore Večernj List :
«A en croire les projections électorales, la Croatie aura une fois de plus un gouvernement nombriliste. L’électorat est fortement polarisé. Quand on voit le nombre important de ceux qui ont déjà voté, à savoir en quittant la Croatie en quête d’une vie meilleure à l’étranger, nous devrions comprendre que nous n’avons pas les moyens de continuer à perdre du temps en querelles politiciennes infructueuses. L’exode de masse rompra l’équilibre précaire qui avait permis aux citoyens de tenir la tête hors de l’eau pendant la longue crise économique. Le nouveau gouvernement devra agir rapidement. Car un Etat déserté par des dizaines de milliers de jeunes qui constituent ses forces productives n’a pas d’avenir.»
Affrontement de deux politiques ambitieux
Delo prend la température de la scène politique croate, dominée par les chefs de file des deux grands partis, Andrej Plenković pour le HDZ et Zoran Milanović pour les socio-démocrates du SDP :
«Il ne fait aucun doute qu’il s’agit des deux grands leaders politiques croates. Et que tous deux nourrissent de grandes ambitions et se projettent aux plus grandes fonctions de l’Etat. Milanović l’a déjà prouvé à plusieurs reprises. Il a assez bien réussi à démontrer sa supériorité dans l’arène politique face au très rétrograde ex-leader du HDZ, Tomislav Karamarko. Mais suite au départ forcé de Karamarko à la tête du HDZ, remplacé par Andrej Plenković, cette supériorité n’est plus aussi flagrante. Après le départ de Karamarko, qui était de la vieille école et de surcroît un piètre orateur, Plenković présente toutes les qualités de Milanović : il est habile, affable et disert.»