L'attentat de Manchester ébranle la campagne électorale britannique
Deux semaines et demie seulement avant les élections législatives du 8 juin, la Grande-Bretagne est ébranlée par l'attentat de Manchester. Les meetings de campagne ont été annulés et la Première ministre Theresa May et son rival Jeremy Corbyn se sont entendus pour éviter toute exploitation politique de l'attaque. Fallait-il suspendre la campagne ? Les commentateurs sont partagés.
Pas le moment de sonner le clairon
Les terroristes n'atteindront pas leur vils objectifs car ils ne font pas le poids face à l’unité, la solidarité et le calme affichés à tous les niveaux, se félicite The Financial Times :
«La classe politique britannique a eu la bonne réaction en suspendant provisoirement la campagne. Après l’attaque, les dirigeants politiques ont appelé à l’unité. La Première ministre Theresa May, le leader de l’opposition Jeremy Corbyn ainsi que le maire de Manchester Andrew Burnham ont trouvé le ton juste pour appeler à garder le calme. ... Ceux qui ont perpétré cet attentat voulaient semer la zizanie et miner les valeurs de la démocratie britannique. La réaction à Manchester, où la population entière – des services d’urgence aux chauffeurs de taxi – s’est mobilisée pour aider les victimes et entourer les familles endeuillées, est la meilleure réponse que l’on puisse apporter aux actes terroristes.»
Ne pas suspendre le cours de la démocratie
Pour que la démocratie soit en mesure de se défendre, il est important que les Britanniques reprennent sans tarder la campagne électorale, estime pour sa part Politiken :
«Nous devons vivre notre quotidien comme auparavant, et le quotidien actuel de la Grande-Bretagne, c’est la campagne. Il est compréhensible et justifié de vouloir marquer une pause aujourd’hui. Mais il est impératif que dès demain, la campagne reprenne son cours. Car ce qui fait la force de la démocratie, c'est l'organisation de la diversité, une société plurielle qui rassemble différentes philosophies. Mais il est une chose que nous ne saurions tolérer dans notre société : nous accommoder de la violence et du terrorisme et reculer devant le mal. Notre cohésion et notre force au quotidien auront raison du terrorisme. Et nous l’emporterons – malgré ces terribles évènements.»
May assurée de l'emporter
L'attentat de Manchester rend la victoire électorale de Theresa May inéluctable, juge Der Tages-Anzeiger :
«Son intervention résolue et ses visites auprès des victimes hospitalisées, telle une 'bonne mère Theresa', sont révélatrices. Dans l'opposition, certaines voix timides s'élèvent certes pour demander si May, qui a été ministre de l'Intérieur pendant de longues années, a mené une action suffisante pour protéger le pays des terroristes. Des accusations qui devraient se multiplier dans les prochains jours, quand 'l'union sacrée' commencera à se déliter. Pour l'instant toutefois, par respect pour les victimes de Manchester, aucun commentateur n'ose aborder ces questions 'politiquement motivées'. Et d'ici à ce que ce débat ait lieu, la Première ministre devrait avoir encore progressé dans les sondages. Peut-on encore arrêter May ? Auparavant déjà, personne ne semblait en mesure de contester son aura de 'leader' ; depuis l'attaque de Manchester, ceci paraît quasiment impossible.»
Le Brexit ne doit pas compromettre la sécurité
Pour le quotidien Der Standard, l’attentat illustre l’importance qui reviendra à la coopération européenne en matière de sécurité, malgré l’imminence du Brexit :
«Par sa sortie de l’UE, la nation s’oriente vers une situation qui modifiera le concept de sécurité tant pour l’UE que pour la Grande-Bretagne. La phrase prononcée par Theresa May fin mars dans sa lettre à l’UE avait fait couler beaucoup d’encre : l’échec à créer un accord de sortie pourrait 'affaiblir la coopération dans la lutte contre le crime et le terrorisme'. Les accusations de chantage qui n’ont pas tardé à fuser furent promptement réfutées par les autorités britanniques. Et pourtant, on ignore tout de la forme que pourrait prendre une poursuite de la collaboration avec Europol au lendemain du divorce avec l’UE. Dans le contexte d’une menace terroriste endémique en Europe, il devrait être dans le plus grand intérêt des deux parties de poursuivre l’échange d’informations confidentielles.»