La Bundeswehr va se retirer de la base d'İncirlik
Berlin dit être favorable à un transfert en Jordanie des avions de reconnaissance allemands stationnés sur la base aérienne turque d'İncirlik. Suite à une énième tentative de médiation assurée par le ministre allemand des Affaires étrangères Sigmar Gabriel, Ankara a refusé à nouveau d'autoriser la visite de parlementaires auprès des soldats. Qui devait céder dans cette partie de poker ?
Gabriel a été trop modéré
Le site tagesschau.de déplore que le ministre des Affaires étrangères Sigmar Gabriel ait fait autant de concessions à la Turquie :
«Il a implicitement reconnu que l'Allemagne n'avait pas fait preuve de suffisamment d'empathie suite au coup d'Etat perpétré il y a un an, et il a assuré à la Turquie que Berlin examinerait de près les flux financiers liés au PKK. Deux éléments qui peuvent être évoqués, mais peut-être pas le jour où l'on essuie un refus. ... Le lundi de la Pentecôte n'a décidément pas été très productif pour le ministre des Affaires étrangères.»
Le bluff de Merkel a mal tourné
Angela Merkel s'est tiré une balle dans le pied, constate Hürriyet :
«Il est difficile de dire quelle intention suivait Angela Merkel avec son annonce de transférer les troupes allemandes en Jordanie, suite au refus par la Turquie d'ouvrir la base d'İncirlik aux députés allemands. Car ce bluff a mal tourné. Le retrait des Tornados allemands n'intéresse pas la Turquie et n'aura aucune incidence non plus dans la lutte contre Daech - d'autant que leur contribution est de nature symbolique. Si cela est problématique pour l'Allemagne de stationner avions et soldats dans un pays de l'OTAN comme la Turquie, qu'en sera-t-il dans un pays du Proche-Orient comme la Jordanie ? Le Bundestag a déjà fait de mauvaises expériences auparavant en Afghanistan. Bref, le bluff tenté par la chancelière à İncirlik se retourne contre elle.»
Une initiative justifiée
Le gouvernement allemand a raison de vouloir retirer ses troupes d'İncirlik, juge Berliner Zeitung :
«Pas seulement parce que le régime du président turc Tayyip Erdoğan avait interdit par le passé à des députés allemands de visiter la base, bien que la Bundeswehr soit une 'armée parlementaire'. Si l'Allemagne et la Turquie font toutes deux parties de l'OTAN, les deux pays n'ont plus rien en commun aujourd'hui, et surtout pas les valeurs. Berlin s'est régulièrement vu reprocher ces derniers temps de vouloir se contenter de limiter les dégâts - à savoir une résiliation de l'accord sur les réfugiés ou un rapprochement entre la Turquie et la Russie. Il y a également eu des appels à ne pas laisser tomber l'opposition turque - c'est bien là l'argument principal ! ... Un retrait de la base d'İncirlik serait le bon moyen de dire : notre patience a des limites !»
İncirlik n'est qu'un symptome
Les menaces allemandes ne sont pas le véritable problème, assure la chroniqueuse Beril Dedeoğlu dans Daily Sabah :
«Ces soldats peuvent aisément être remplacés par d'autres troupes de l'OTAN. Une telle mesure ne ferait par ailleurs que dégrader un peu plus les relations germano-turques. Au même titre que le génocide arménien, la question d'İncirlik ne peut permettre d'expliquer pourquoi les relations entre les deux pays sont aussi exécrables aujourd'hui. On ne peut s'empêcher de se demander si la Turquie n'est pas devenue un obstacle sérieux à un ensemble d'objectifs que s'est fixé le gouvernement allemand. ... N'oublions pas, bien entendu, que les tensions entre la Turquie et l'Allemagne ne sont pas étrangères aux évolutions du système hégémonique mondial.»