Corée du Nord : quel pourra être l'impact des sanctions ?
Des sanctions supplémentaires votées à l'unanimité par le Conseil de sécurité de l'ONU visent à dissuader la Corée du Nord de poursuivre son programme nucléaire. Pour de nombreux commentateurs, les sanctions ne vont pas assez loin.
Les Etats-Unis feignent d'ignorer le fond du problème
Pour Global Times, il faut prendre en compte les préoccupations nord-coréennes en matière de sécurité :
«Les Etats-Unis ne font aucun cas des raisons qui ont poussé Pyongyang à poursuivre son programme nucléaire. ... Les Américains ont manifestement du mal à comprendre qu’il est impossible de résoudre la question nucléaire sans aborder les préoccupations de Pyongyang en matière de sécurité. ... Washington devrait sérieusement étudier la proposition chinoise d’une 'dual suspension' [la Corée du Nord arrête ses tests nucléaires, en contrepartie, les Etats-Unis et la Corée du Sud cessent leurs exercices militaires communs] et d’un 'dual track' [dénucléarisation assortie d'un dialogue].»
Des paroles vaines, comme toujours ?
Les dirigeants nord-coréens ne viendront à la table des négociations que lorsqu’ils ressentiront les conséquences douloureuses des nouvelles sanctions, assure Financial Times :
«Tout dépend de la volonté de la Chine, qui en sa qualité de voisine et de puissance protectrice est la plus à même d’exercer une forte pression économique, et de celle de la Russie de faire respecter la résolution de l’ONU. Face aux sanctions adoptées par le passé, les deux pays se sont souvent contentés de belles paroles. Même certains alliés américains ont fait preuve d’une certaine nonchalance lorsqu’il s’agissait de les faire appliquer. ... Dans les relations avec la Corée du Nord, il n’y a pas de bonnes options. Mais les sanctions et l’espoir que celles-ci ramèneront Kim à la table des négociations, sont encore le meilleur choix qu’il nous reste.»
L’absence totale d’une stratégie à long terme
Les sanctions ne suffiront pas pour inciter la Corée du Nord à céder, craint Helsingin Sanomat :
«Les étapes qui pourraient suivre pour dissuader la Corée du Nord de continuer son programme destructif restent floues. … Les armes nucléaires de la Corée du Nord présentent certes un réel problème pour la Chine et la Russie. Mais il serait aussi problématique pour eux si la Corée du Nord accédait à la sphère d’influence occidentale. Une réunification entre les deux Corées entraînerait un coût économique et humain considérable. … En l’absence d’un programme stratégique pour l’avenir, la Corée du Nord continue ses menaces.»
Une unanimité toute relative
Neue Zürcher Zeitung souligne que la politique de la Chine envers la Corée du Nord a récemment obtenu le soutien de la Russie et que les deux pays avaient mis en garde non seulement la Corée du Nord, mais également les Etats-Unis contre des actes de provocation :
«Ils se sont bien trouvés, ces deux-là, on dirait. Et c'est pourquoi on aurait tort de surestimer le soutien de la Russie et de la Chine à l'initiative américaine de durcissement des sanctions. Si celles-ci étaient appliquées à 100 pour cent, elles auraient des conséquences indésirables pour les deux pays. Sans forcément parler d'un effondrement du régime ; la Chine voisine aurait déjà du mal à faire face à une hausse du nombre de réfugiés fuyant une famine. Mais l'approbation de la Chine et de Moscou à New York les met à l'abri du reproche de rester les bras croisés face aux menaces de Kim.»
La Chine et la Russie sauvent leur peau
Les rangs s’éclaircissent autour des dirigeants de Pyongyang, constate Adevârul :
«Ses alliés traditionnels, Russie et Chine, ont vite fait de faire machine arrière. … Ils ont mesuré la gravité de la situation et n’ont aucune envie de se laisser entraîner dans une situation de conflit grave sur la presqu’île coréenne. La Russie a ses propres problèmes – extrêmement complexes – avec les sanctions que les Européens et les Américains ont prises contre Moscou. La Chine travaille sur un vaste projet de nouveau chemin de la soie. ... La Chine ne peut pas compromettre ce projet par amour pour un dictateur paranoïaque et imbu de lui-même.»
Le Conseil de sécurité veut calmer les faucons
Le consensus qui règne au sein du Conseil de sécurité de l'ONU est dû à la crainte d'un possible coup militaire des Etats-Unis, analyse Sme :
«Les sanctions économiques ne dissuaderont pas le régime nord-coréen de poursuivre son programme nucléaire. Le vote unanime du Conseil de sécurité, Chine et Russie comprises, montre pourtant que les grandes puissances ont compris que Donald Trump était prêt à porter un coup préventif contre la Corée du Nord et que cette éventualité était plus proche que jamais. Une telle attaque représenterait une menace pour la vie de millions de personnes. ... Le ministre des Affaires étrangères Rex Tillerson n'est pas favorable à des frappes préventives trop hâtives. ... Ce sont le ministre de la Défense James Mattis et le conseiller à la sécurité Herbert McMaster qui détiennent le réel pouvoir. Et ils sont d'accord pour dire qu'une attaque de la Corée du Nord est une 'possibilité réelle'.»
Les Nations unies finiront par céder
Les nouvelles sanctions priveront Pyongyang d’au moins un tiers de ses revenus actuels, sans pour autant inciter le régime à céder, croit savoir Frankfurter Rundschau :
«A chaque fois que l’ONU a infligé une peine, Pyongyang l'a subie de plein fouet. Le régime peut se fier au fait qu’à la fin des cycles de sanctions, la communauté internationale finira par céder. Car le manque de revenus provoque des pénuries alimentaires en Corée du Nord. Des aides sont devenues nécessaires pour des raisons humanitaires. De nombreux éléments laissent penser que la seule issue possible à cette spirale d’escalade consiste à réunir les adversaires décisifs autour d’une table pour négocier. Mais ce n’est pas pour demain.»
Des menaces dignes de la Guerre froide
To Vima est inquiet pour la paix dans le monde :
«Pas plus tard que la semaine dernière, des missiles intercontinentaux ont menacé la côte occidentale des Etats-Unis. En réaction, des bombardiers américains ont survolé la Corée du Nord. Parallèlement, la marine russe et l’armée chinoise ont démontré leur puissance par parades impressionnantes. A cela s’est ajoutée la décision du Congrès américain en faveur de nouvelles sanctions à l’encontre de la Russie qui avait déjà prévu une série d’exercices importants en Biélorussie, décision qui a provoqué une réaction horrifiée de la part des Etats baltes et de l’OTAN. L’ensemble de ces événements contribue à faire revivre une ambiance dangereuse de Guerre froide – ambiance qu’on croyait enterrée suite à l’effondrement de l’Union soviétique. Cette résurgence est particulièrement dangereuse à un moment où quelqu’un comme Trump se trouve à la tête de l’Occident.»