Le blocage à Berlin menace-t-il l'Europe ?
Après l'échec des consultations jamaïcaines, le président français Emmanuel Macron a fait part de sa grande inquiétude. Le ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas, Halbe Zijlstra, a évoqué une mauvaise nouvelle pour l'Europe. Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker redoute pour sa part que sans gouvernement stable à Berlin, le moteur des réformes de l'UE ne fasse des ratés. La presse européenne ne se montre pourtant pas aussi pessimiste.
Un printemps européen de bien courte durée
Les aléas de la formation du gouvernement allemand bloquent le processus de réforme de l'Europe, déplore NRC Handelsblad :
«A l'issue d'élections difficiles mais qui avaient plus ou moins mis le holà aux forces populistes en Allemagne et en France, un genre de printemps européen s'annonçait fin septembre : le moment propice pour s'atteler aux grands dossiers, notamment celui de la défense, de la zone euro et de l'immigration. Le Conseil européen avait présenté, le mois dernier, un agenda bien fourni de super-sommets visant, selon ses propres déclarations, à défaire les 'nœuds gordiens' ou mieux : les trancher. Or le laps de temps disponible pour développer la volonté politique que ces rencontres nécessitent est limité. Dans un an et demi, les électeurs seront à nouveau appelés à élire leurs eurodéputés et tout le monde passera en mode 'campagne'.»
L'Europe en eau trouble
La situation politique allemande ne laisse rien présager de bon pour l'Europe, selon le journal économique Naftemporiki :
«Si personne n'est à la barre même quand la tempête gronde, le navire risque de s'échouer sur des écueils. ... Une Allemagne privée de gouvernement, cela signifie également le gel des décisions sur l'avenir de l'Europe, sur le Brexit, sur la question grecque et sur les propositions de Macron pour une meilleure intégration de la zone euro et un renforcement de l'Europe. Tant que le navire allemand sera sans capitaine, il partira à la dérive et suivra un mauvais cap. Et sans le vaisseau amiral allemand, le reste de la flotte européenne sera vulnérable et désorientée.»
Pas de quoi paniquer
Ces atermoiements n'ont rien d'alarmant, estime Neue Zürcher Zeitung :
«L'Allemagne est à court d'options pour la formation d'un gouvernement majoritaire. C'est une première. Au demeurant, et c'est la contrepartie, le pays peut tout à fait se permettre une phase prolongée d'insécurité politique, d'explorations et d'expérimentations. L'Allemagne est extrêmement forte et stable, sur les plans économique, social et institutionnel. Si l'échec de la formation d'un gouvernement plongeait bel et bien le pays dans une crise, les leaders des partis feraient probablement un effort pour trouver un terrain d'entente. Il n'y a pas de quoi paniquer. L'Allemagne, l'économie et l'UE, qui espère des réformes, peuvent se payer le luxe d'une phase prolongée de quête de solutions.»
Sans Merkel, le Brexit serait évitable
L'éventualité toute hypothétique d'un départ d'Angela Merkel pourrait rebattre les cartes dans le dossier du Brexit, conjecture The Independent :
«Et si le nouveau ou la nouvelle leader de la CDU était plus sceptique sur le thème de la libre circulation des travailleurs ? Et si ce nouveau leader voulait que ce principe de base soit révisé dans l'ensemble de l'UE ? C'est d'ailleurs la cause défendue par une nouvelle initiative portée par d'anciens représentants de l'industrie allemande, favorables à un maintien de la Grande-Bretagne dans le giron de l'UE. L'ex-Premier ministre Tony Blair avait laissé entendre, par allusions assez évasives, qu'un certain nombre de dirigeants politiques européens envisageaient ce genre de réforme il y a quelques mois. Si cette réforme devait se faire, la première raison du Brexit disparaîtrait d'un seul coup. Et d'autres Etats la soutiendraient également vigoureusement.»