Nouvelles sanctions américaines : Poutine sous pression ?
Le ministère des Affaires étrangères américain a prononcé de nouvelles sanctions contre la Russie, invoquant l'empoisonnement de l'agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille début mars en Grande-Bretagne. Si certains chroniqueurs ne pensent pas que Poutine se laisse intimider par la politique en zig-zag de Trump, d'autres prédisent au président russe des lendemains difficiles.
Du grand n'importe quoi
Le quotidien Die Presse déplore l'absence de cohérence dans la politique de Trump avec la Russie :
«Il y a de bonnes raisons de mettre le holà à Poutine. Quand on annexe des territoires étrangers et que l'on viole le droit international, il faut s'attendre à se faire taper sur les doigts. De même quand on se fait pincer en train d'empoisonner ses adversaires ou d'influencer les élections dans des démocraties occidentales, en déployant des armées de trolls qui diffusent des mensonges. ... On cherchera en vain un fil directeur dans la politique russe de Trump, qui ressemble plutôt à un gribouillage sans queue ni tête, à une pelote de fils emmêlés. A Helsinki, il a fait à Poutine des courbettes d'une obséquiosité déconcertante et embarrassante. Trois semaines et demie plus tard, Trump donne son aval à un automatisme de sanctions sans fondement. Il est trop facile d'expliquer cette décision par la volonté du président américain de faire diversion sur le fait que les Russes lui ont prêté main-forte pendant la campagne. Ce type avance à tâtons, il ne contrôle pas la situation.»
Accompagner les sanctions de mesures incitatives
Financial Times conseille aux Etats-Unis de définir clairement ce qu'ils attendent de Moscou en contrepartie d'une levée des sanctions :
«Elles devraient apporter la garantie que si Moscou tourne la page, les sanctions seraient levées. Les sanctions initialement adoptées suite à l'intervention de la Russie en Ukraine ont été muées en loi. Des mesures supplémentaires sont venues s'y greffer. Le Congrès risque ainsi d'amener le Kremlin à en conclure qu'il n'a jamais eu l'intention de lever les sanctions un jour, mais cherche à placer la Russie sous une pression constante. Moscou pourrait alors juger inutile de remplir les conditions et redoubler ses efforts de torpillage de l'Occident.»
Un zèle tout électoral
Fin juin, le Sénat américain avait décidé de sanctionner à nouveau la Russie en raison de la guerre en Ukraine. Si Trump remonte aujourd'hui à la charge, c'est en raison du calendrier électoral - les élections de mi-mandat en novembre - estime Vedomosti :
«Les républicains (et donc Trump) pourraient y perdre leur majorité. Le projet des sénateurs serre encore plus la vis : il restreint les transactions avec les obligations russes, interdit aux banques d'Etat russes d'effectuer des opérations en dollars et condamne la Russie comme sponsor du terrorisme. Les sanctions annoncées par le ministère des Affaires étrangères n'interdisent dans un premier temps que l'exportation de produits électroniques militairement exploitables. ... On a l'impression que Trump essaie de faire sienne l'initiative du Congrès et d'évincer le projet de sanctions des sénateurs.»
Le ciel s'assombrit pour Poutine
Rzeczpospolita fait observer que les sanctions américaines tombent à un mauvais moment pour Poutine, qui fait actuellement face à des vents contraires dans son pays :
«Les sanctions américaines contre la Russie s'accompagnent de la tentative de mettre en place, dans le pays, un référendum sur la loi relative au relèvement de l'âge de départ à la retraite. ... Les deux opérations - celle de Washington et celle initiée par les Russes eux-mêmes - tombent au même moment. Chacune prise individuellement serait déjà en soi un problème pour les dirigeants à Moscou. Leur concomitance potentialise le problème.»