La France ébranlée par l'attentat de Strasbourg
Après l'attentat meurtrier sur le marché de Noël de Strasbourg, les forces de l'ordre sont toujours à la recherche du suspect, âgé de 29 ans et fiché S. Deux personnes ont perdu la vie et plusieurs autres ont été blessées lors de l'attaque, commise à l'arme à feu et au couteau. Les enquêteurs évoquent un motif islamiste. Quels en seront les effets, dans un pays déjà en ébullition ?
Les revendications déraisonnables de l'opposition
L'opposition de droite a critiqué la politique de sécurité du gouvernement et réclame un durcissement des lois. Cela va trop loin, estime Laurent Joffrin, le rédacteur en chef de Libération :
«Est-ce digne ? Est-ce raisonnable ? L'état d'urgence a déjà été inscrit, pour une bonne partie, dans la loi ordinaire. L'internement préventif des 'fichés S', outre qu'il est proscrit aujourd'hui par la loi, et même par la Constitution, supposerait un changement institutionnel majeur. Il revient, il faut le souligner, à enfermer quelque 10 000 personnes pour une durée indéterminée, forcément longue, sans motif juridique précis, à partir d'un fichier qui n'est qu'un outil de surveillance et non une liste de criminels. Rituelle, désormais, cette proposition a été maintes fois réfutée, y compris par des responsables policiers comme Frédéric Péchenard, ancien directeur général de la police nationale.»
Macron réagit comme un despote du Proche-Orient
L'attentat de Strasbourg renforce la position du président en cette période de troubles, juge Dnevnik :
«Une attaque terroriste en pleinmouvement social. La conséquence logique de cette attaque : des mesures d'exception, qui mettront également fin aux rassemblements politiques. La réaction de Macron aux attaques terroristes sort tout droit du manuel spécifique à la culture politique du Proche-Orient : on accorde d'abord des compétences accrues à la police et l'on déploie des soldats en ville. Parallèlement, de façon plus ou moins discrète, on restreint les libertés des citoyens. Si des soldats armés en ville sont une évidence, alors d'autres mesures deviennent également acceptables. Les groupes politiques arabes les plus radicaux sont parvenus, en quelques actions seulement, à changer la culture politique européenne. Chapeau bas ! Même les Russes, en 50 ans de guerre froide, n'y étaient pas arrivés.»
L'ennemi de la démocratie
Le terrorisme attaque les sociétés dans leur ensemble, peut-on lire dans Iltalehti :
«Ces dernières années, l'espace public en Europe est devenu le théâtre de la violence et la menace terroriste assombrit le quotidien. Même si la peur est devenue omniprésente, cela ne change rien au fait qu'à chaque fois, les attentats ébranlent profondément le sentiment de sécurité des citoyens. ... Cette attaque a pour but d'aggraver un peu plus l'instabilité de la situation politique française, qui s'est encore dégradée avec les violences de samedi dans le centre de Paris. ... Le terrorisme est l'ennemi sournois de la démocratie, car il ne fait qu'amplifier l'impuissance et le doute. Le président Trump s'est déjà servi de l'attentat de Strasbourg pour justifier la construction de son mur à la frontière avec le Mexique.»
La prison, vivier du terrorisme
Les djihadistes recrutent parmi les criminels, relève Neue Zürcher Zeitung :
«Si le 'califat' de Daech en Syrie et en Irak a disparu et si le nombre d'attentats a diminué en Europe, les idéologues islamistes continuent à trouver de nouvelles recrues en Europe, notamment dans les prisons. Un récent rapport du renseignement belge met en garde contre une nouvelle génération de 'gangsters djihadistes'. D'après ce rapport, jamais les prisons n'avaient été confrontés à un groupe aussi important d'individus liés au terrorisme, avec un risque élevé que ces détenus ne radicalisent d'autres prisonniers. Mais surtout, toujours selon ce document, les membres de Daech revenus en Europe sont susceptibles de participer, à leur libération d'ici trois à cinq ans, à une nouvelle vague d'attaques dans le pays.»