Faut-il renégocier l'accord sur le Brexit ?
La chambre basse britannique doit se prononcer ce jeudi sur le sursis sollicité par la Première ministre Theresa May, qui veut plus de temps pour renégocier l'accord de sortie avec l'UE. Le président du Conseil, Donald Tusk, avait exhorté Londres à faire des propositions concrètes pour que la situation se débloque. Les éditorialistes pensent qu'il est encore possible d'éviter le pire.
Un exit au Brexit
Attendu que toutes les parties prenantes perdraient au change, il y pourrait finalement y avoir un Brexit ordonné, analyse la politologue Melanie Sully dans Wiener Zeitung :
«La formation nord-irlandaise Democratic Unionist Party ne veut pas qu'un Brexit sans accord ait pour possible conséquence la tenue d'un référendum sur une Irlande unie. L'aile radicale des Tories veut le Brexit et un accord commercial qui ne sera possible qu'à posteriori. Le Labour cherche une solution qui lui permette de sauver la face, car renoncer au Brexit pourrait être perçu négativement dans les milieux travaillistes. ... Un accord sur le Brexit offrirait une issue à une situation perdant-perdant. L'UE ne veut pas de Brexit 'No Deal' et elle a investi beaucoup de matière grise dans l'accord. Il s'agit désormais d'élaborer une formule qui soit capable de décrocher une majorité à la chambre basse. Une formule qui ne sacrifie pas les principes fondamentaux sacro-saints de l'UE.»
Sauvegarder les intérêts des citoyens
Il faut que May et le Parlement se fixent désormais pour mot d'ordre de limiter la casse, préconise Daily Sabah :
«Quoi qu'il advienne dans les deux prochaines semaines, que May revienne avec ou sans accord au Parlement, il est évident que le Brexit restera un facteur d'incertitude pour les deux protagonistes, la Grande-Bretagne et l'UE. A ce stade, les politiques doivent prendre leurs responsabilités et veiller à minimiser le plus possible l'impact qu'aura le Brexit sur la vie des citoyens, et à éviter un bouleversement de leur vie.»
Le moment de tirer un trait
Les temporisations de May sont proprement irresponsables, lit-on sur tagesschau.de :
«Elle a déjà affaibli l'économie de son pays, exaspère les chefs d'entreprises et oblige les multinationales à se mettre en quête de nouveaux sites où s'implanter et à se tourner vers de nouveaux marchés. Un Brexit dur serait pour les Britanniques une catastrophe, dans presque tous les domaines. ... Face à la gravité des risques encourus, les coups de poker de dernière minute sont déplacés. May doit mettre un terme aux négociations et confronter la chambre basse à la vérité, au lieu de répéter a l'envi ses promesses vides. Si May reste réticente, le Parlement doit lui forcer la main avant qu'il ne soit trop tard et que les dommages soient encore plus graves.»
May doit se sacrifier ou sacrifier le pays
Le chef du Labour, Jeremy Corbyn, avait proposé à May de lui apporter une majorité au Parlement en vue de trouver un accord sur le Brexit. Sa condition : le maintien de la Grande-Bretagne dans l'union douanière. May fait face à un dilemme, estime Marius Chivu sur son blog hébergé par Adevarul :
«Le scénario d'un Brexit soft obtenu avec l'aide des députés Labour pose au gouvernement May un problème véritablement existentiel. La perte de majorité des conservateurs rouvrira le débat de sa démission. Un Brexit dur, en revanche, garantirait la cohésion du gouvernement conservateur et la survie de May. ... La Première ministre britannique fait donc face à un choix cornélien : soit faire preuve de responsabilité en faisant le choix d'un Brexit soft avec l'aide des députés Labour - ce qui revient à monter à l’échafaud et perdre le pouvoir politique, ou conserver la majorité pour gérer le désastre au lendemain d'un Brexit dur.»
La France ne peut pas se permettre un 'no deal'
The Spectator conseille au président Macron de prendre un ton plus conciliant envers Londres dans les négociations sur le Brexit :
«Selon un récent rapport de l'assureur-crédit français Euler Hermes, en cas de Brexit dur, la France perdrait trois milliards d'euros sur ses exportations en 2019, ce qui en ferait le troisième pays de l'UE le plus durement touché après l'Allemagne et les Pays-Bas. Le Brexit pourrait également affecter le plus important excédent commercial que la France réalise en marchandises avec un autre pays - en l'occurrence la Grande-Bretagne. ... Compte tenu du ralentissement spectaculaire de l'économie française, Macron pourrait choisir de promouvoir une voie de conciliation dans les négociations sur le Brexit, qui profiterait à la fois à son propre pays et à celui de son arrière grand-père.»