Stratégie vaccinale européenne : fait-on face à un échec ?
Après la Hongrie, la Slovaquie autorise à son tour le Spoutnik V, tandis que les gouvernements polonais et tchèques disent y réfléchir sérieusement. Quant à l'Autriche et au Danemark, ils ont tous les deux misé sur une alliance avec Israël. Le Chancelier Sebastian Kurz et la Premier ministre Mette Frederiksen vont d'ailleurs rencontrer ce jeudi Benjamin Netanyahou. Les avis sont partagés sur la question. Si certains condamnent l'égoïsme des pays qui font cavalier seul, d'autres en revanche rappellent que les Etats sont acculés à faire ces choix.
Se mettre en quête de nouveaux partenaires
Les Pays-Bas devraient suivre l'exemple de l'Autriche et du Danemark, insiste De Telegraaf :
«Ces pays estiment à juste titre qu'il faut tout faire pour obtenir un maximum de doses de vaccin. ... Notre pays est confronté à une pénurie de vaccins liée en partie aux décisions prises au sein de l'alliance européenne. ... Les Etats membres de l'UE sont chacun responsables de leur propre stratégie vaccinale et ont toute latitude pour conclure des accords avec des tiers. Il serait également possible d'accélérer le processus d'autorisation en adoptant une ordonnance spéciale. Les Pays-Bas veulent agir dans le cadre de l'UE, mais ils feraient mieux de chercher à sauter sur le train en marche de la nouvelle 'alliance du vaccin'.»
Une tentation dangereuse
L'acquisition de doses de vaccins supplémentaires à l'échelon national est un exercice périlleux, rappelle El País :
«On peut comprendre que la situation tendue du marché et de l'exaspération croissante pousse les pays à se mettre en quête de solutions individuelles. Une démarche louable, s'il s'agit de compléter les stratégies européennes, mais lourde de conséquences si elle implique de quitter la voie de l'action collective. Ensemble, il sera plus facile de surmonter cette crise. Céder à la tentation de l'individualisme, c'est semer la graine de crises ultérieures, de la discorde et de la division. A bon entendeur, salut. »
Pas de deal au détriment des Palestiniens
Politiken condamne l'action du gouvernement danois :
«Au lieu de se laisser corrompre avec des vaccins, Mette Frederiksen devrait saisir l'occasion de rappeler à Benyamin Netanyahou que le Danemark n'a pas oublié les Palestiniens et qu'il n'acceptera pas les vaccins qui leur étaient normalement destinés. En pleine pandémie, l'égoïsme national doit avoir ses limites - même si tout porte à croire qu'Israël l'ait oublié.»
La valse des fiascos
Polityka souligne l'échec de la stratégie européenne d'achats de vaccins :
« Force est de constater que jusqu'à présent, l'UE n'a nullement critiqué les 'traîtres' et n'a visiblement aucune idée de la façon dont elle pourrait aborder la question. ... Il n'existe pas de stratégie commune pour surmonter la pandémie au niveau européen. ... Une politique commune d'achat de vaccins avait normalement été prévue, or dans les coulisses, il se trame toute une kyrielle de négociations nationales. Aujourd'hui, c'est le règne du chacun pour soi où chacun est prêt à acheter n'importe quel vaccin disponible. Un fiasco en chasse l'autre dans l'Union européenne. »
Un rêve à deux doigts de se briser
L'Echo ne se fait plus guère d'illusions :
«Au plus fort de cette crise, on s'est pris à rêver d'une unité européenne, voire mondiale, dans la production d'un vaccin, mobilisant au service de l'humanité les capacités des technologies les plus avancées du XXIe siècle. Les égoïsmes nationaux, les vieux réflexes géostratégiques, la difficulté du politique de générer une vision dépassant son cheptel électoral, ou simplement le doute envers les vaccins empêchent de donner corps à ce rêve. Mais il n'est jamais trop tard pour construire cette unité par une plus grande coopération industrielle et en tirant exemple des bonnes pratiques.»