130 pays adoptent un taux minimal d'impôt sur les sociétés
130 Etats, Chine incluse, ont adopté jeudi une réforme fiscale qui prévoit un taux d'imposition minimal de 15 pour cent pour les grandes entreprises, comme l'avait préconisé le G7. L'accord, censé lutter contre le dumping fiscal, devrait rapporter 126 milliards de dollars de recettes supplémentaires par an, selon les estimations de l'OCDE. Sont concernées les sociétés dont le CA annuel dépasse 750 millions d'euros. L'écho de la presse est mitigé.
Un jalon pour le multilatéralisme
Pour Handelsblatt, c'est un énorme progrès :
«Pour comprendre l'avancée accomplie, il faut passer en revue les années écoulées, qui ont regorgé de conflits commerciaux. Les Etats-Unis et la Chine se sont livrés à une guerre commerciale ; lorsque des pays comme la France avaient introduit une taxe numérique nationale, les Etats-Unis avaient brandi la menace de sanctions commerciales. L'accord sur un taux minimal d'impôts sur les sociétés dans le monde a mis fin à ces litiges entre les Etats-Unis et d'autres pays ; Chine et Etats-Unis sont par ailleurs dans le même bateau. L'accord génère davantage d'équité fiscale, mais il constitue aussi un jalon pour le multilatéralisme, que l'on pensait enterré depuis la présidence Trump.»
Une mesure pour saper la concurrence déloyale
Jørn K. Broch, rédacteur en chef de l'édition numérique de Jydske Vestkysten, se réjouit lui aussi :
«Les entreprises les plus importantes payent bel et bien leurs impôts - la plupart du temps. Mais elles ont d'autres options dans un monde où les impôts se fondent sur des principes qui ont été supprimées avant que le commerce ne s'internationalise - et ne se numérise. Elles peuvent dès lors s'acquitter de leurs impôts là où les taux sont les plus faibles, et il se trouve toujours un paradis fiscal. Il s'agit là d'une concurrence tout à fait déloyale. Cette pratique impacte également la concurrence dans votre ville. Le monde est vaste, mais il est aussi petit.»
On entrave la libre concurrence
Les Echos critique l'accord :
«Le risque, en vérité, est que cette réforme débouche sur une incroyable complexité fiscale et les pays développés ne seront pas les seuls à en pâtir. Des multinationales aujourd'hui capables de créer de nombreux emplois dans des économies émergentes, où elles sont attirées justement par une fiscalité incitative sur leurs bénéfices, auront moins d'intérêt à s'y implanter et à s'y développer du moment où elles devront acquitter le différentiel d'impôt. La régulation ne devait jamais tuer la concurrence loyale. C'est vrai aussi en matière fiscale.»
Un nivellement par le bas ?
Il est encore trop tôt pour pouvoir évaluer la portée de cet accord, juge Kauppalehti :
«Ce taux minimal d'impôt sur les sociétés pourrait devenir un taux maximal. ... Il pourrait donner lieu à une concurrence entre les pays, qui s'efforceront de réduire au plus vite leur impôt sur les sociétés pour le porter à 15 pour cent. La Finlande pourra-t-elle maintenir son impôt sur les sociétés à 20 pour cent ? Les répercussions de la réforme fiscale internationale sont encore indéfinies. Il est probable que les grands pays et les marchés importants en bénéficieront davantage que les petits pays axés sur la technologie et sur les exportations, comme la Finlande. D'autre part, il existe peu de grandes entreprises en Finlande susceptibles d'être affectées par ce nouveau modèle fiscal.»