Présidentielle : quel choix fera la France ?
Les sondages donnent le président sortant Emmanuel Macron et la candidate d'extrême droite Marine Le Pen favoris du premier tour de la présidentielle française. La presse européenne critique la campagne électorale et appréhende les résultats du scrutin.
Une élection que l'Europe doit suivre de près
Zeit Online ne cache pas sa crainte de voir se fissurer le front uni contre la Russie :
«Si elle était élue présidente, Marine Le Pen a dit qu'elle retirerait le pays du commandement intégré de l'OTAN. Ce faisant, la France ne quitterait pas l'alliance, mais elle en prendrait ses distances. Les troupes françaises stationnées actuellement dans les pays baltes et en Roumanie devraient probablement partir. Les conséquences seraient considérables. L'OTAN, qui est sur le point de renforcer son flanc Est, serait affaiblie - de même que l'unité occidentale. Ce serait une bonne nouvelle pour Vladimir Poutine. Certes, c'est un peu cliché, mais cela n'en reste pas moins vrai : dans les semaines à venir, la France décidera aussi de l'avenir de l'Europe. Il vaut mieux s'y intéresser de près.»
L'UE a besoin du leadership de Macron
La réélection d'Emmanuel Macron serait primordiale pour le tandem franco-allemand, observe Denik N :
«Macron est une figure politique importante en Europe, surtout aujourd'hui, alors que le nouveau chancelier allemand Olaf Scholz ne s'est pas encore imposé sur la scène politique. Macron a l'ambition de donner le ton en Europe. ... La France et l'Allemagne restent la force motrice de l'UE ; ensemble, elles peuvent faire adopter de grandes innovations. ... La perspective de voir Macron perdre face à Marine Le Pen, candidate europhobe et incompétente sur le terrain européen, est un cauchemar.»
Pour un projet progressiste
Dans Les Echos, les chercheurs Laurent Davezies, Alain Ehrenberg, Sylvain Kahn et Jacques Lévy appellent de leurs vœux une démocratie plus progressiste :
«Nous pensons que le processus doit s'intensifier pour inventer un espace de débat public qui aide les citoyens à dessiner des futurs vraiment ouverts. Après le En même temps !, c'est un Droit devant ! qui s'impose. Nous voudrions avec tous ceux qui se reconnaissent dans cette démarche, favoriser l'émergence et la dynamique d'un pôle progressiste fort sur la scène publique et dans le débat d'idées. Elargir l'horizon des imaginaires, c'est aussi une condition pour avancer pas à pas aux rythmes où la société peut se mettre concrètement en mouvement.»
Le néolibéralisme a abandonné les ouvriers
La trahison de la classe ouvrière renforce des forces comme le RN, analyse le politologue Halil Karaveli dans Expressen :
«Emmanuel Macron représente une classe moyenne urbaine qui n'est plus solidaire de la classe ouvrière. Pourtant, c'est la classe ouvrière qui avait obtenu la démocratie en France, de concert avec la bourgeoisie progressiste, et l'Etat providence était basé sur une alliance de classe entre les ouvriers et les employés. En France, cette alliance n'a plus cours aujourd'hui. ... Lorsque le Parti socialiste s'est tourné vers le libéralisme économique, l'extrême droite a commencé à s'installer durablement et à gagner des votes ouvriers. ... Le néolibéralisme [de Macron] n'est pas une stratégie pérenne permettant de protéger la démocratie de la menace de l'extrême droite.»
La 'grandeur de la nation' n'intéresse que les médias
Dans NRC Handelsblad, le chroniqueur Bas Heijne, spécialiste de la France, juge que le débat élitiste sur la perte prétendue de la "grandeur française" fait l'impasse sur les préoccupations de la population :
«On en parle à la télévision et sur Twitter, dans les livres et dans des revues importantes, mais rarement dans la vie de tous les jours. ... Ce qui préoccupe une large majorité des Français, c'est leur 'mode de vie', une identité difficile à saisir. Pour le moment, tout va bien, mais sommes-nous à l'abri d'une mauvaise surprise ? Ces doutes sont probablement la raison pour laquelle les sombres prophéties d'Eric Zemmour et consorts ont tant le vent en poupe, et pourquoi la présence du drapeau européen sous l'Arc de triomphe a soulevé un tel tollé dans les médias.»
Les Français ont d'autres soucis que l'immigration
Les débats électoraux, phagocytés par l'extrême droite, occultent les préoccupations réelles des électeurs, constate Mérce :
«La principale préoccupation des Français est le 'pouvoir d'achat' - c'est-à-dire les prix et les salaires - ainsi que le système de santé, les retraites ou encore l'Ukraine. Un tiers des électeurs à peine a cité l'immigration parmi les trois enjeux essentiels et un dixième seulement la laïcité (prétendument menacée par 'l'essor de l'islam'). ... Pourtant, la question qui accapare actuellement la campagne est celle de savoir qui du féminisme ou de l'antiracisme est en train de 'libaniser' et de détruire le pays.»