Macron/Le Pen : la fièvre monte
A deux jours du second tour de la présidentielle, les Européens ont les yeux rivés sur la France. Si le président sortant Emmanuel Macron est donné favori par les sondages, sa victoire n'est nullement assurée. Le vote des indécis et des électeurs de gauche pourrait être décisif. Les commentateurs évoquent un scrutin déterminant pour l'avenir de l'UE.
Voter au moins pour la démocratie
Aucun des deux candidats n'est vraiment crédible pour les électeurs de gauche, juge Upsala Nya Tidning :
«Le bruit court que dimanche, beaucoup d'électeurs de gauche glisseront dans l'urne un bulletin blanc. La France n'est pas un pays facile à unifier. Mais s'il est un point sur lequel les citoyens devraient se mettre d'accord, c'est la nécessité de faire entendre la voix de la démocratie, mais aussi de voter pour la démocratie dans le monde.»
La frustration de choisir le moindre mal, une fois de plus
Pour El Periódico de España, les cinq années à venir s'annoncent sinistres, quelle que soit l'issue du vote :
«Les citoyennes et citoyens de France, mais aussi des autres pays, semblent en avoir assez de devoir voter non pas pour mais contre un projet, et d'opter pour le moindre mal, à leur corps défendant. ... Au delà du résultat des élections, il serait utile de comprendre, pour notre avenir, pourquoi, dans de plus en plus de pays démocratiques, un nombre croissant d'électeurs se tournent vers des candidats d'extrême droite. ... Les Français sont de plus en plus nombreux à penser que dans les années à venir, la situation va se détériorer, tant au niveau national qu'au niveau individuel. Et huit citoyens sur dix s'attendent à d'importants mouvements sociaux ces cinq prochaines années.»
Pas de blanc-seing pour l'Europe de Macron
L'hebdomadaire Marianne craint que Macron ne dévoie le sens de sa victoire, s'il devait l'emporter :
«Le fonctionnement de l'UE, ses institutions, et les projets d'aller plus loin dans l'intégration suscitent toujours une méfiance majoritaire, quand ce n'est pas carrément un rejet. … Expliquer que dimanche serait un référendum sur l'UE ne constitue-t-il pas un moyen cynique de préparer une interprétation du résultat de dimanche, qui sera alors relayé à l'envi ? Le président alors réélu n'en conclura-t-il pas que sa victoire serait aussi celle de sa manière d'appréhender les sujets européens, alors qu'elle serait avant tout le résultat d'un barrage contre l'extrême droite reconstruit à la hâte entre le 11 avril et le débat d'hier soir ? Ce couplage entre sa victoire et celle de l'UE constituerait alors un blanc-seing inquiétant.»
Une ingérence qui se justifie
Le chancelier allemand, Olaf Scholz, et les Premiers ministres du Portugal et d'Espagne, António Costa et Pedro Sánchez, ont appelé les Françaises et les Français à voter Macron. Une immixtion que Frankfurter Allgemeine Zeitung ne condamne pas :
«Au second tour de la présidentielle française, c'est la survie de l'UE qui se joue. Quand on sait que beaucoup de citoyens préfèrent le 'franc parler' aux conventions, il n'y a rien à redire au fait d'avouer clairement aux Français la peur qu'une présidence Le Pen inspire à l'Europe. Scholz et ses homologues n'impressionneront probablement pas les partisans du RN. Mais si l'appel des leaders sociaux-démocrates européens pouvait inciter à aller voter ne serait-ce que quelques-uns des électeurs de gauche excédés par le libéralisme de Macron, cette rupture de tabou aurait déjà valu la peine d'être faite.»
Accorder davantage de poids à l'opposition
Jérôme Gautheret, correspondant du journal Le Monde à Rome, appelle la France à réformer le droit électoral en s'inspirant de son voisin transalpin :
«L'opposition entre stabilité et représentation est au cœur de la réflexion des politiques italiens dès qu'il s'agit de changer la loi électorale – et ceux-ci le font au gré de leurs intérêts. De notre côté des Alpes, la nécessité d'introduire une dose de proportionnelle est souvent professée durant les périodes de campagne, et aussitôt remisée au rayon des promesses sans lendemain après les élections – nul gouvernant ne renonce facilement à réduire ses marges de manœuvre. ... [Emmanuel Macron], gagnerait pourtant à s'emparer prioritairement de cette question en cas de réélection, sous peine de revivre cinq années de plus les mouvements de colère sociale ... .»
Poursuivre la résistance
Pour Le Courrier, voter Macron permettra au moins de sauvegarder le droit à la protestation :
«Laisser Marine Le Pen accéder à la présidence, c’est ouvrir la voie à un parti fasciste, qui s’empressera d’étendre son emprise sur l’ensemble de l’administration, démantèlera la justice et s’attaquera à toute forme d’opposition. ... L'alternative Macron est tout sauf réjouissante. Elle résonne avec répression des mouvements contestataires, politique d'asile durcie, incapacité de porter un projet social et écologique. Mais elle ne réduit pas en cendres l'appareil d'Etat. L'existence d'une opposition à l'Assemblée, et surtout dans la rue, reste possible. C'est là que la résistance devra continuer à s'exercer.»
Des candidats sans vision pour la France
Le Figaro déplore un duel brouillon et technocrate :
«Financements, mesures catégorielles se sont accumulés sans que jamais se développe une vision qui ordonnerait ce grand désordre de propositions. On peut craindre qu'un nombre important de citoyens aient parfois éprouvé un sentiment de désappartenance devant l'exercice. La force immatérielle de la nation - son histoire, ses institutions, sa beauté, sa langue, son prestige, sa culture, son école - a peiné à surnager dans cet océan de chiffres. La politique, pourtant, n'est pas réductible à la technocratie réglementaire.»
Portée par la dynamique du populisme de droite
Timios Fakalis, journaliste au quotidien Ethnos, s'intéresse à la popularité de Le Pen :
«Rappelons-nous les paroles de Giorgos Stefanidis, président de l'Institut scientifique gréco-francais ELGA : au premier tour, un autre parti en lice était encore plus à l'extrême droite, celui d'Eric Zemmour : 'Autrement dit, Le Pen a été présentée comme l'incarnation non pas de l'extrême droite, mais d'une extrême droite «raisonnable». Quand on a à sa droite un parti plus extrémiste, on paraît moins extrémiste.' ... Autre élément qui booste la cote de Le Pen dans les sondages : elle glane beaucoup de voix chez l'électorat classique de droite, qui est apparu divisé et indécis au premier tour.»
La victoire de Macron dépend des mélenchonistes
Pour remporter le second tour, Macron doit convaincre les électeurs de gauche, analyse Aftonbladet, qui juge toutefois l'affaire mal engagée :
«Suite à la mobilisation des gilets jaunes en 2018, le président avait dû rétropédaler et retirer la taxe carbone sur les carburants. Le programme de Marine Le Pen semble ne pas séduire beaucoup d'électeurs de gauche. Le plus gros risque pour Macron, dimanche prochain, ce serait que les électeurs de Mélenchon restent chez eux. Tenant du libéralisme économique, le président a tout simplement trop peu fait pour les convaincre. Depuis 2017, il mène une politique de droite. Il lui reste quatre jour pour virer à gauche.»
Une opération de comm' peu crédible
Tages-Anzeiger se penche sur la nouvelle image que Macron véhicule de sa personne sur les réseaux, la chemise ouverte, laissant apparaître un torse velu :
«On ne compte plus les articles, les ouvrages et les études sociologiques qui tentent de sonder le phénomène de la haine de Macron, toutes couches sociales confondues. ... Son éloquence omnisciente, son attitude d'homme cultivé et cosmopolite, combinées à la jeunesse agaçante d'un fayot, à la fois précoce et pédant. ... L'équipe de Macron s'efforce donc de rectifier le tir et de diffuser l'image d'un président qui n'a pas tout le temps le nez fourré dans les dossiers. ... Problème : à vouloir corriger une image du jour au lendemain par une mise en scène contrastée, on fait d'autant plus ressortir ses faiblesses, qu'elles soient présumées ou réelles.»
Une issue imprévisible
Falter voit rouge pour l'intégration européenne :
«Si une élection de Le Pen est peu probable au vu des sondages, rappelons-nous que l'on avait cru impensable que Donald Trump puisse entrer à la Maison-Blanche. La France d'aujourd'hui est devenue aussi imprévisible que les Etats-Unis. ... Le président sortant doit rassembler les forces de droite et de gauche pour empêcher que le pays ne sombre dans un nationalisme autoritariste. Le défi qu'il a réussi il y a cinq ans est plus compliqué à relever cette fois-ci. La colère citoyenne a mis en pièces les partis de l'establishment, LR et PS. Macron a besoin des voix du camp du populiste de gauche Jean-Luc Mélenchon, qui ne peut pas se résoudre à donner une consigne de vote pour le président.»
Ce ne sont plus les mêmes
La Stampa analyse l'évolution des positions des deux aspirants à la présidence depuis le dernier scrutin :
«Ce sont les mêmes candidats qu'il y a cinq ans, mais ce ne sont plus les mêmes. Le Pen a fignolé sa dédiabolisation, pour s'émanciper de son image d’extrême droite. Fait inattendu, la candidature d'Eric Zemmour a rendu service à Le Pen dans ses efforts de normalisation. Macron a un mandat à son actif, cinq années marquées par le mécontentement des gilets jaunes, le Covid, la guerre en Ukraine et une campagne qu'il a prise trop à la légère, jusqu'à la parution de sondages alarmants le créditant d'une victoire à 51 pour cent.»
Les écueils du programme de Le Pen
Une victoire de Le Pen dimanche menacerait l'Europe d'une crise profonde, écrit la politologue Sandra Fernandes, de l'université du Minho, dans le quotidien Público :
«Marine Le Pen se réserve la possibilité de consulter le peuple sur une sortie de la France de l'UE. ... Sa première mesure en tant que présidente serait la tenue d'un référendum sur l'immigration et le statut des étrangers, visant à les criminaliser et à abolir le droit du sol, garant de la naturalisation. Un 'tsunami bleu marine' pourrait signifier l'invalidation d'institutions et une vague de populisme comparable à ce que le Premier ministre Viktor Orbán a fait en Hongrie. Mais aussi une normalisation des relations avec la Russie, ainsi qu'une profonde césure dans les relations franco-allemandes.»
La France dans le sillage de la Pologne et la Hongrie ?
Rzeczpospolita affirme qu'
«une victoire de Le Pen assènerait un coup violent, peut-être fatal, à ces institutions occidentales qui ont valu à la Pologne sécurité et prospérité, pendant la dernière génération. ... Depuis des années, l'UE est affaiblie par les désaccords avec la Hongrie et la Pologne. Cette discorde pourrait être un des facteurs qui ont amené Poutine à tabler sur une absence de consensus en Occident s'il envahissait l'Ukraine. Si la France empruntait la voie de la Pologne et de la Hongrie, cela aurait des conséquences nettement plus lourdes. Sachant que la réconciliation entre la France et l'Allemagne est la pierre angulaire de l'Union européenne, sans Paris, l'UE pourrait-elle compter sur Berlin pour assumer son leadership ? Ce n'est pas ce que nous enseigne l'histoire.»
Les jeunes électeurs désabusés
Il n'y a rien d'étonnant à ce que beaucoup de jeunes Français décident de bouder les urnes, commente le sociologue Didier Fassin dans Libération :
«Toutes celles et tous ceux qui sont devenus majeurs au cours des dix dernières années n'ont connu, pour l'élection présidentielle, que le choix entre la droite et l'extrême droite. Les jeunes, dont beaucoup votent traditionnellement à gauche, n'ont plus la possibilité d'exprimer cette préférence. … Pour toutes ces femmes et tous ces hommes, le fameux 'there is no alternative' thatchérien est donc passé du domaine économique à la sphère politique. ... Pourtant, par une curieuse inversion des rôles, c'est eux que l'on culpabilise s'ils décident de s'abstenir ou de voter blanc quand il leur semble au contraire que ce sont les responsables politiques qui, par leurs discours et leurs programmes, les y contraignent.»
Le Pen n'est plus la protégée du Kremlin
Cette fois-ci, le Kremlin aurait davantage de raisons d'être favorable à une victoire de Macron, estime Radio Kommersant FM :
«Si, il y a cinq ans, dans un duel opposant les mêmes candidats, le Kremlin avait plus de sympathie pour le camp Le Pen (elle a même été reçue par Poutine), la préférence n'est pas aussi nette aujourd'hui : Le Pen préfère ne pas se rappeler ses attaches avec la Russie. Après la tragédie de Boutcha, elle a revendiqué un rappel de l'ambassadeur français à Moscou, alors que Macron n'était pas prêt à faire un geste aussi radical. Par ailleurs, elle entretient d'étroits contacts avec le gouvernement ultraconservateur polonais, partisan de dures sanctions envers la Russie. Macron, pour sa part, insiste sur la nécessité de maintenir le dialogue avec Poutine - ce qui lui vaut justement les critiques acerbes de la Pologne.»
Un enjeu crucial
Le second tour sera décisif pour l'avenir de l'UE, estime Jutarnji list :
«On ne peut même plus s'attendre à ce que les partis traditionnels s'unissent pour déjouer une issue dangereuse du scrutin. Car les deux partis traditionnels, PS et LR, affiliés aux deux plus grandes familles politiques de l'UE - Parti populaire européen (PPE) et Parti socialiste européen (PSE) - ont essuyé une défaite écrasante. Ils n'ont même pas réussi à dépasser la barre des cinq pour cent qui leur aurait garanti le remboursement des frais de campagne, ce qui expose les candidats à un risque de faillite personnelle. Le second tour, le 24 avril, prend des airs de référendum sur l'avenir de l'UE.»
Un nouveau clivage populaire/élitaire
Les résultats du premier tour donnent à voir une France divisée en trois grands camps, ceux de Macron, Le Pen et Mélenchon. Les familles politiques traditionnelles sont devenus insignifiantes, constate Contrepoints :
«Le clivage gauche/droite est en train d'être supplanté par celui entre un bloc élitaire et un bloc populaire. Seulement, le bloc populaire est lui-même fracturé entre son aile nationaliste et son aile communiste, ce qui donne un avantage au bloc élitaire qui arrive au premier tour avec Emmanuel Macron. L'ancien clivage entre PS et LR est mort. Entre une Anne Hidalgo à 2 pour cent et une Valérie Pécresse à 4,7 pour cent, l'ancienne classe politique n'a pas su utiliser les cinq années d'opposition pour se rénover. La sanction est sans appel, PS et LR disparaissent au profit des nouvelles formations aux discours plus tranchés et plus manichéens.»
On ne vote plus pour des partis
Ces cinq dernières années, la vie politique française s'est transformée du tout au tout, commente l'économiste Daniel Cohen dans L'Obs :
«D'abord ce constat sans appel : les partis politiques traditionnels ne jouent plus aucun rôle en France. Macron, Le Pen, Mélenchon et Zemmour ont en commun de ne s'être soumis à aucun processus véritable de désignation. Tous ont créé un parti à leur image (sauf Le Pen qui en a hérité), dont ils ont été à ce jour les seuls candidats (avec Jean-Marie Le Pen). Cette transmutation traduit la rencontre entre une opinion qui ne supporte plus les corps constitués et une dégénérescence de la Ve République où tout se résume à l'élection d'un homme ou d'une femme.»
Les accointances entre Le Pen et Poutine oubliées ?
Helsingin Sanomat s'étonne de ce que la cote de Marine Le Pen ne fléchisse pas :
«Vu de Finlande, on est surpris de voir que les Français aient si rapidement oublié les liens de Le Pen avec la Russie, ou qu'ils aient décidé de ne pas lui en tenir rigueur. Espérons que ce point sera abordé dans les débats qui précéderont le second tour. Les Français ont accès aux mêmes images d'exactions en Ukraine que celles que nous voyons chez nous, et elles ne devraient laisser personne indifférent. Dans les démocraties libres, les citoyens peuvent certes voter comme ils l'entendent. Mais leur décision dans l'isoloir devrait être motivée par une idée des candidats conforme à la réalité.»
Des électeurs de gauche déçus
Le président sortant ne pourra compter sur les voix de la gauche comme en 2017, croit savoir le politologue Alexandru Bussi sur le portail Contributors :
«Il y a cinq ans, Macron avait lui-même mené une campagne populiste anti-système, mais pro-européenne. Son mouvement avait été qualifié d''extrême centre', dirigé contre la classe politique. Cela laisse des traces. Macron a fait beaucoup de déçus. Notamment ses électeurs issus de la gauche qui, comme le montre l'analyse des migrations électorales, sont devenus mélenchonistes. Peu d'entre eux voteront Macron le 24 avril. La frustration des électeurs de gauche à l'endroit de Macron est d'autant plus importante qu'il avait promis, il y a cinq ans, d'endiguer la montée de l'extrême droite.»
La France a besoin d'une Assemblée renforcée
Le plus beau cadeau que Macron puisse faire aux électrices et aux électeurs déçus serait une réforme institutionnelle, estime Julia Borutta, correspondante de l'ARD à Paris, sur le site tagesschau.de :
«Il faut en finir avec la République présidentielle, dirigée par un président tout puissant derrière lequel tout le monde doit se rassembler. A la place, il faudrait renforcer l'Assemblée nationale par une représentation proportionnelle des partis qui serait le reflet fidèle des convictions des Françaises et des Français, y compris des positions extrémistes, qui participeraient ainsi au contrôle parlementaire. La démarche en coûterait certes à un Macron jupitérien. Mais in fine, ce serait le seul moyen d'épargner à la France l'alternative à laquelle elle fait une fois de plus face aujourd'hui.»
Frexit ou leadership européen ?
Le vote aura des répercussions sur le rôle de la France dans le monde, souligne Slate :
«Voilà bien où se situe l'essentiel : voulons-nous rester en Europe pour continuer d'y prétendre à un leadership que les autres Européens, plus souvent qu'on ne le dit, nous reconnaissent ? Ou voulons-nous placer la France sur le funeste chemin que lui a dessiné Boris Johnson, celui d'un Frexit qui ne dirait pas son nom ? Voulons-nous tourner le dos à nos alliances alors même que le dictateur Poutine réinstalle la guerre au cœur de l'Europe et cherche à fédérer autour de lui les mouvements d'extrême droite qui existent sur le Vieux Continent ? Oui, le vote du 24 avril prochain sera une manière de dire au reste du monde qui nous voulons être.»
La France ne doit pas devenir la Hongrie
El Mundo place ses espoirs dans la raison des électeurs :
«L'abstention occupe à nouveau le devant de la scène, avec un taux record de 26 pour cent au premier tour. Plusieurs analystes font un rapprochement entre le taux d'abstention et le score de Le Pen. Cependant, il n'est pas anodin que les principaux perdants aient appelé à ne pas voter pour Le Pen, notamment le candidat de gauche Jean-Luc Mélenchon - qui a obtenu plus de 20 pour cent des voix - , mais aussi Valérie Pécresse, Yannick Jadot et Anne Hidalgo. Ils continuent d'associer Marine Le Pen à un projet anti-européen et xénophobe, même si elle a édulcoré son discours et se concentre davantage sur l'économie. Au second tour, les électeurs doivent prendre leurs responsabilités : la France ne doit pas devenir la Hongrie. Il ne faut pas laisser une telle expérience se renouveler.»
Ce ne sera pas simple pour Macron
L'hebdomadaire Documento estime que dans ce nouveau duel contre Le Pen, le président sortant est moins bien placé qu'il ne l'était en 2017 :
«Son passage au pouvoir a flétri son image, les Français lambda voient en lui le 'président des riches'. Macron mise donc plutôt sur les voix des classes moyennes urbaines, tandis que Le Pen, avec sa rhétorique populiste, cible plutôt les couches sociales inférieures vivant à la périphérie. En gros, Macron ne peut pas dire : 'Votez pour moi pour faire barrage à Le Pen', car les Français n'ont pas peur d'une présidence de Le Pen.»
Une transformation de façade
L'accession Marine Le Pen à la présidence serait une mauvaise nouvelle pour l'Europe, estime Sme :
«Le Pen ne perd rien de son pouvoir délétère, qui, si elle devait l'emporter, compromettrait ce dont l'Europe démocratique a le plus besoin actuellement : unité et coopération pour faire face au conflit en Ukraine, relance de l'économie après la pandémie, transition vers une économie verte. ... Jamais l'extrême droite n'a été aussi proche de la victoire aux présidentielles françaises. En période de crise, ce n'est pas un constat agréable. Le Pen a beau s'efforcer de lisser son orientation pro-russe et islamophobe, sa nature politique n'a pas changé pour autant.»
Les forces anti-système sont fortes
Corriere della Sera tire la sonnette d'alarme :
«La bête souverainiste rugit plus fort que jamais. Et ce au pays des Lumières, de la raison, de la fraternité et des droits de l'homme universels.. ... Le score retentissant de 24 pour cent obtenu par Marine Le Pen hier au premier tour de l'élection présidentielle ont davantage de poids que la majorité des deux tiers de son ami Viktor Orbán. Car si l'on ajoute à ses électeurs ceux de l'extrême droite d'Éric Zemmour et de la gauche radicale de Jean-Luc Mélenchon, ainsi que ceux des formations trotskistes et souverainistes, l'électorat antisystème dépasse le seuil fatidique des 50 pour cent. »
Poser les questions qui fâchent
Pour Rzeczpospolita, la perspective d'une victoire de Le Pen reste plausible :
«Même si Macron sortait vainqueur de la bataille, la France devra se poser des questions difficiles. Le président sortant avait lui-même déclaré au début de son mandat que s'il n'arrivait pas à réformer le pays en profondeur, Le Pen accèderait au pouvoir 'dans cinq ou dix ans'. La gauche, également, doit serrer les rangs : si elle l'avait fait avant le premier tour, Le Pen ne serait pas arrivée au second. Car le danger est toujours là : en 2027, la chef de file de l'extrême droite n'aura pas encore 60 ans.»